Tuesday, February 21, 2012

Abonné absent, mais je t'envoie quand même à cette adresse la réponse (enfin ! ) de Liliane, elle est très décevante, bon.

Des bises, chaton

YN

Liliane Giraudon
Oui j'ai lu et très attentivement... crayon en main... comme « document » (et le mot n'est pas péjoratif) c'est très intéressant, mais trop long et le « genre » (ça devient un livre qu'il faudrait signer à deux et avec des pb de noms à transformer because droits à la personne etc...), mais nous avons le temps car ce n'est pas pour 2012 et, en ce moment, une version numérique est à l'étude pour cette collection... Je voudrais que tu prennes le temps de retravailler à partir de ton blog en prélevant ce que tu dis de ton quotidien « travail création » inséparable de ta vie... L'histoire de cet amour est belle, il faudrait réduire, travailler avec de nouveaux prélèvements et monter ça. Prendre le temps de le faire. Mais se voir à paris pour en parler. Réfléchis-y. Ecris-moi sur cette boite mail : liliane.giraudon@wanadoo.fr car je ne consulte pas régulièrement mes messages sur Facebook ! Je t'embrasse
lili






Hello,
La réponse de Liliane ne m'étonne pas. Je n'ai pas publié les notes sur mon blog pour former un livre qui tiendrait dans un volume. C'est effectivement un document, et ce n'est pas une mauvaise chose d'avoir rassemblé ces textes sous cette forme-là, aussi bien de mon point de vue que du tien je crois, pour d'hypothétiques lecteurs à l'avenir (qui sait ?) C'est une entreprise frivole et vaine, comme dit Montaigne. (Enfin, la comparaison avec Montaigne ne peut aller bien loin !) Je réfléchis beaucoup à cette drôle d'idée de la mise à nu qui m'a tenu les deux premières années de mon blog. Je repense à certains de mes textes justement, en lisant des poèmes de Bukowski dans L'Amour est un chien de l'enfer. Cette façon de consigner l'expérience proche et intime est touchante, mais elle ne suffit pas, ne se suffit pas. Non, ce qu'il faut, c'est une Comédie humaine !
Je ne suis pas allé te voir au théâtre de la Bastille pour plein de raisons, mais d'abord parce que j'ai toujours aussi peu de temps libre et qu'en ce moment je lis dès que j'ai cinq minutes devant moi. Je reprendrai bientôt la musique pour une résidence à Tours, et peut-être pour une comédie musicale (un projet tout nouveau pour lequel je viens d'être contacté). Il est possible que je me retrouve dans une mission culturelle quelconque si la gauche passe, mais c'est encore une affaire de réseau sous le coup du secret, et sur le mode hypothétique.
Je viendrai au Rond-Point, en tout cas, c'est une salle que j'aime bien.
Porte-toi bien !
Bisous,
Pierre






Eh bien, moi, ça m'étonne, ça m'a même atterré, je dois dire. Car, alors, qu'est-ce qui me touche, moi, qui ne peut pas toucher les autres ? Et c'est pas la découverte des trois malheureuses pages des brouillons d'Une saison en enfer sauvées des flammes qui vont me faire changer d'avis : elles sont infiniment supérieures à la version définitive, Arthur y est comme vivant. Ce que je trouve vivant, en ce moment, c'est par exemple Chateaubriand, mais il a écrit pour que ce soit publié cinquante ans après sa mort (ça a été publié immédiatement après sa mort, en fait), et c'est aussi une œuvre de consignation...
Et cette manière de Liliane de répondre le crayon à papier à la main...
Moi, quand je fais un spectacle, je fais ce que je veux. On me demande des textes, un livre, mais on ne me laisse pas faire. Si je proposais un livre avec un seul mot par page, ce ne serait pas non plus retenu. On ne peut rien faire. Olivier Seiner a dû tout réécrire et, les épreuves, on les lui a envoyées avec encore des propositions de phrases « plus belles », de paragraphes entiers... mais, là, il a refusé, quand même, cette fois, parce qu'il s'est dit, il m'a dit, que s'il voyait dans un article une phrase citée qui n'était pas de lui, alors, il aurait honte...
J'ai du mal avec la littérature contemporaine, tellement peu libre. Tellement arrangée. Tellement relue et archi-boutiquière. Ça n'a pas de sens.
Sauf la tienne !
Liliane dit souvent, ça m'a toujours étonné, « fabriquer un livre ». Il ne me semblait pas que chez Marguerite Duras ça se passait comme ça. Mais peut-être qu'elle avait tellement intégré le processus qu'elle le portait inconsciemment. Moi, non plus, quand je fais un spectacle, je n'ai pas l'impression de le fabriquer, c'est même ça qui se fait tout seul, c'est le plus facile, ça. Non, ce qui compte vraiment, c'est de défabriquer, détricoter ce qui pourrait nous voler la richesse, la vie, la liberté et le plaisir, mais certainement pas de fabriquer qqch.
Peut-être il faudrait quand même envoyer ça à d'autres, on sait jamais. Evidemment, c'est un document. Moi, quand je fais du théâtre, ce sont aussi des documents. C'est comme ça que dit Stanislas Nordey, il m'a envoyé ma première lettre reçue d'un de mes pairs, ça m'a beaucoup touché. Il a vu le dernier spectacle, il en parle en ces termes, je crois, « consignation », « document », « comédie humaine », certainement pas !
Mais, toi, garde cette ambition qui a sûrement un autre sens pour toi que pour moi. C'est l'ambition Houellebecq, par exemple (que j'aime beaucoup lire sur la plage...)

Je t'embrasse aussi, chaton, content que tu aies daigné me répondre cette fois-ci !

Yves-Noël

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