Friday, September 28, 2012

Le Snob de Marguerite Duras



Sieste. Audrey m’appelle au moment où je commencais à me toucher en pensant à Bébé. « Je ne te dérange pas ? » Je lui promets qu’on ira voir ensemble la pièce de Claude Régy – mais, alors, ça me volerait une soirée avec Bébé – et si nous faisions cela à trois ? Audrey et Bébé, je serais bien entouré. Une nuée. Mais Claude Régy ne m’a pas envoyé d’invitation, cette fois-ci. J’imagine que si je l’appelle… Je lis Sagan, les entretiens sont extraordinaires. C’est étrange de lire Françoise Sagan après m’être occupé d’Hélène Bessette. D’un côté l’échec, de l’autre le succès, phénoménal dans les deux cas. J’y pense soudain parce qu’à une question, « Qu’est-ce qui se seraient passé si vos livres n’avaient pas marché ? », Sagan répond : « J’aurais continué. » Voilà un point commun, Bessette, Sagan, deux écrivains, quoi qu’il se passe, écrire  jusqu’au bout. Bessette n’a pas cessé d’écrire, même après que Gallimard l’ait jetée, après la mort de Raymond Queneau qui la soutenait.

Wayne Byars interrompt son cours et se précipite sur moi : « J’ai pensé à toi, l’autre jour, parce que j’étais à un dîner et il y avait un type proprement insupportable… (J’attends la suite.) très religieux – et il a dit : « J’avais une amie, une très grande amie, une très, très grande amie qui était athée, on s’aimait beaucoup, mais je n’ai pas compris, à sa mort, qu’on lui ait donné une cérémonie religieuse (puisqu'elle était athée). C’était une très grande amie à moi, peut-être en avez-vous entendu parler... Marguerite Duras... » – Un snob. – Oh, mais alors, une ca-ri-ca-ture ! » Modèle à l’infini, à Wayne Byars, à moi et Jérôme Bel... (Qu’y puis-je,  si ce thème me poursuit ?)

Tout d’un coup, je me demande si Wayne Byars ne me parle pas de Michael Lonsdale, ce serait bien son genre… Dans ce cas, ce ne serait pas un snob. Michael Lonsdale est très religieux et Marguerite Duras était réellement sa très grande amie. Peut-être que son humilité religieuse le poussait à penser que les autres ne la connaissaient peut-être pas – en tout cas pas aussi bien que lui.

Je m’endormais pour la sieste les yeux ouverts et le soleil brûlant ; je me réveillai : le soleil avait passé et de bons gros nuages définissaient un gris d’été.

La faiblesse de Sagan : la drogue. Sartre ou elle ne concevaient pas d’écrire sans se droguer. Joris Lacoste. On le sent quand elle parle du plaisir d’écrire. C’est très intéressant. Mais elle en parle exactement comme d’une drogue. Vitesse, mécanique « bien huilée (...) l’esprit qui fonctionne presque en dehors de soi-même (...) C'est comme marcher dans un pays inconnu et ravissant. »

Dire quels livres on aimerait écrire suffirait à « faire un livre ». (Toujours cette rêverie.) « J’aimerais écrire des romans dans lesquels il y aurait de moins en moins de circonstances dramatiques, de plus en plus de vie quotidienne, de petits accrochages de chaque jour. C’est la seule direction, si je peux dire, que je voudrais suivre toujours. Parce que le drame est là. Les événements extérieurs sont toujours des accidents. Le drame, c’est de se lever, de se coucher, de s’agiter entre-temps et de se laisser glisser. Le drame, c’est la vie quotidienne… De temps en temps on en prend conscience, mais rarement... »

Bébé me dit que Rousseau lui fait penser à moi. Les Confessions. Je connais mal. Je lui dis que Duras aimait beaucoup Les Confessions.

Les femmes, cette disparition en creux du monde des femmes. Pourquoi ne pas sortir du thème – puisque Sagan l’a si bien traité – de la solitude ? 

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