Saturday, May 25, 2013

A la merci des oiseaux noirs



Si je commençais à écrire ? 
Ça avait commencé par 2 arbres. 2 arbres que l’on avait remarqués par leur couleur bleue. Il y avait même 2 nuances différentes dans l’arbre le plus bas dont le nom avait été prononcé par qq’un qui était parti et n’avait laissé aucun souvenir à ceux qui étaient restés. L’arbre le plus haut était un paulownia.
Et ça avait fini par Rose Ausländer, la lecture du livre acheté et avec moi dans le train.
Entretemps... Entretemps, ça restait à raconter.



Fortsetzung

Die wir uns
fortsetzen
durch Liebe

Wir geben uns hin
dem Tod
und nehmen uns
das Leben

von Baum
der
Erkenntnis



Les poèmes de Rose Ausländer étaient tous courts, mais j’avais acheté le livre — bien que mes moyens ne me le permettaient pas — parce que le vendeur avait dit qu’il fermait sa librairie pour aller déjeuner et que tous étaient beaux, les poèmes, et étaient exactement ce dont il était question.
Ecrire est agréable, en un sens, ce n’est pas difficile, ça te laisse la place de prendre le temps avant d’écrire vraiment
C’est comme peindre (salut, Thomas Lévy-Lasne !)
Dans l’appartement où je m’étais retrouvé de manière inattendue, avec des personnages inattendus — et moi-même, qui m’attendait ? —, j’avais trouvé la clé en ouvrant un ouvrage sur la peinture de Lucian Freud.
Nous étions donc dans une toile de Lucian Freud.
C’était cela, la matrix.
A partir de là, tout était possible ; les dés étaient jetés.
...
Au matin, dans la nuit du jour transformé, la peinture m’offrait encore sa splendeur. Et dans le train. Sa « vision ». 
C’était incroyable comme la beauté d’un homme était inégalable — ou d’une femme — et de n’importes lesquels —, si profonde, si  traversable, ce volume. Les peintres montrent la beauté des traits et l’harmonie des traits de n’importe quelle incarnation. Surtout Lucian Freud. C’est le fait de l’incarnation qui est sexy. C’était cette splendeur dans le tunnel du train à laquelle je m’abandonnais. Le tunnel du train traversant le tunnel de la nature comme sous verre, « pour ainsi dire sous verre », comme disait Marcel Proust. Le tunnel de la verdure. Il faisait beau après cet hiver infini — et frais et de bonne augure. Et William avait dit : « Merci Yves de nous avoir apporté le Noël ». Ce qui avait fait rire Elie. Ces 2-là étaient si confus, si perdus, si vivants, si doux et mélancoliques — qu’est-ce que Dieu leur avait fait ? (leur avait fait croire). Ils étaient, ils étaient...
Ne restait plus maintenant pour en parler que Rose Ausländer — et pour parler de moi.



Das Erbe II

Es ist an der Zeit
das Erbe zu verteilen

nimm
den sterblichen
Apfel
und
das unsterbliche
Wort



C’est drôle, un grand poète, de comprendre ce que c’est, un grand poète (un immense poète). Ça tient en un mot  — ou 2 —. Parce qu’elle écrit un recueil de poème qu’elle intitule Blinder Sommer, Eté aveugle.
Ou encore : 

Blumen Maschinen Menschen
ein unaufhaltsamer Brei

fleurs machines hommes
en bouillie irrémédiable



Die Zeit III

Mit zahllosen Händen
greift die Zeit
nach dem
Geflimmer aus
Blumen und Tropfen
nach Hitze und Eis
nach Menschen
auf der Flucht
vor dem Nichts


A un moment, William avait éteint toutes les lumières. Il y avait, par la baie vitrée, un merveilleux bleu de lune. Mais Elie avait demandé qu’il laisse — à peine — un peu de chaud, par le gradateur. « Pleine lune », prononçait-il — et je ne pouvais vérifier.



Seule l’ombre
est restée
quand la lumière
s’est perdue

Dans l’obscurité 
le rêve est 
plus clair



Oui, l’effacement et le recouvrement de la réalité l’un l’autre par le rêve.
Parce que :

Dans les rêves
se récolte le réel

Oui, à un moment, ce moment précis — bien connu, mais si rare, finalement : après — s’était lue la nostalgie. Et le regret. Et le remord. Et la souffrance de n’avoir pas donné selon les espérances qui étaient là pourtant tout près comme de l’autre côté de la mort. 
Au lieu de cela, comme disait même Agnès Gillot dans le supplément du « Monde », ma vie avait été un « couvent », l’opéra d’un couvent.
Me restait à devenir peintre, à l’infini devenir peintre et mémoriser cela. La peinture délectable et détestable, avait les moyens de l’incarnation.
A 15h10, on arrivait en gare de « Paris Nord ». 
Paris Nord, la maison, la stagnation. La déception.

De A à B
c’est un chemin sans fin

Oui, les 3 femmes l’avaient montré : il ne fallait pas avoir peur de l’incarnation. 

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