C omme une aube après une nuit d'amour
Julien Spianti
Monsieur Genod,
Je vous écris et c'est
douloureux.
Il est 5h31, heureusement.
A la même heure, mais le
jour, il me serait impossible de commettre une phrase, d'oser même un mot, sur
cet humiliant écran qui constate plus que tout autre l'abominable misère de mon
apparente existence. Pardonnez.
J'ai vu ce que vous avez
commis — déjà je roule une cigarette, Permettez-moi... Je l'allume, à quoi bon
laisser le tabac froid. Le jour même où je m'avançais d'un pas difficile vers
le Nord et ses Bouffes, je redoutais de me voir séquestré pas les murs d'un
théâtre alors même que je n'avais rien à faire et n'étais capable de rien.
J'avais peur, comme chaque fois que l'on s'avance devant l'oeuvre de quelqu'un,
qu'elle me laisse en dehors, qu'elle oublie l'essentiel, qu'elle convoque des
énergies pour rien.
Mon état était (et est
toujours) à la limite de l'ensevelissement, mais je faisais en sorte de
paraître car je ne sais pas ce qui me ronge (mes vices, mes addictions ou tout
mon être et avec lui le reste tout entier des humains ?), mon état était donc à
la mesure des insipides gazons, pourtant si aimables, qui couronnent les
pavillons ruraux de réussite. Je m'avançais telle une herbe faussement jaune
verte mais en dedans sèche et brûlée par l'été à venir.
Le matin même (j'ai vu la
représentation du dernier jeudi) j'écrivais naïvement mes pensées sur la beauté
et sa consolation, son lien avec la vanité et l'ignoble de l'humain. Ce fût
donc un trouble choc de me trouver (par des circonstances bien mystérieuses car
j'ignorais votre existence et le sujet de la pièce), face à votre oeuvre.
Je passerai ici sur les
commentaires et les éloges que m'ont inspirés votre lucide hallucination.
Mon point. J'aimerais
beaucoup vous rencontrer. Peut-être même dans de mauvaises circonstances, mais
de préférence tard. J'ai peur de toute manière qu'il ne se passe rien, comme
lorsque Dali rencontrait Freud, sans d'aucune manière nous comparer.
Tout m'effraie, ces
jours-ci, mais même si nous parlions simplement du froid qu'il fait ces
jours-ci, cela me satisferait.
Si vous avez un moment,
faites-le moi savoir.
Je vous salue plein
d'admiration.
Julien
Ecoutez, votre lettre m’a
beaucoup amusé ! J’ai pensé que vous vous foutiez de ma gueule surtout à
cause de : « mon état était donc à la mesure des insipides gazons,
pourtant si aimables, qui couronnent les pavillons ruraux de réussite »
(j’ai dû relire plusieurs fois pour comprendre ce que vous vouliez dire). Donc
tout ça m’amuse beaucoup et bien entendu pour se voir « même — et cela
aussi m’a fait rire — dans de mauvaises circonstances et de préférence
tard » Donc ce soir, par ex. C’est un samedi soir, c’est donc une très
mauvaise circonstance, on ne peut plus. Le lieu ? J’imagine n’importe où,
mais comme vous êtes peut-être timide (vu la lettre), ça va pas être facile à
agencer… Moi, j’habite près des Bouffes du Nord, justement. Mon tél (que vous
n’utiliserez pas si vous êtes timide) : 06 84 60 94 58. Plus sérieusement,
je suis allé sur votre page FB et j’ai vu que vous faisiez de la peinture, ce
qui ajoute de la véracité à votre enthousiasme. Je comprends que les peintres
aiment ce travail engagé dans 1er Avril. J’ai aussi vu des photos de votre personne, mon
Dieu, très agréable et, sur certaines d’entre elles, j’ai l’impression bien
nette de vous connaître — ce que votre lettre de la nuit dément… Voyons-nous
pour discuter de tout ça et de notre curiosité !
Julie Rattez
Cher Monsieur Genod,
J'ai assisté à la dernière de
1er Avril samedi dernier.
Cela fait donc une semaine et
je n'ai toujours pas émergée de cette rêverie.
Je ne sais trop quoi vous
dire, je ne sais pas par où m'y prendre.
Vous m'avez fait rire, vous
m'avez émue, vous m'avez instruite.
Votre travail, votre univers
et votre humanité me touchent au plus haut point.
Je suis comédienne et
évidemment je me nourris beaucoup de théâtre, et c'est la première fois depuis
des années qu'une œuvre vivante m'emmène dans un ailleurs que j'aime et
chéris...
Merci d'offrir au théâtre ses
lettres de noblesse.
Bien à vous,
Oh, merci beaucoup !!! Vous
êtes au cours Florent, je vois, quelle chance ! Profitez-en bien ! Et donnez de
vos nouvelles...
Marie Madeleine Framboise
Merci pour ce spectacle
extraordinaire ! et bravo
Bertrand Schiro
Cher Yves-Noël Genod,
nous avons fait rapidement
connaissance au Théâtre du Rond-Point vendredi soir : je suis prof de théâtre
en khâgne (cette année au lycée Molière, à Fénelon à partir de l'an prochain).
Je veux vous remercier une fois encore du beau moment de théâtre que m'a fait
vivre votre 1er Avril ;
cela faisait longtemps que je n'avais pas été pris au théâtre par ce sentiment
d'une grâce fragile et prenante, et votre façon de vous saisir d'un lieu dont
je croyais les charmes épuisés m'a tout simplement bluffé : le mur rouge, la
voûte crépusculaire, quelles images ! Merci, merci vraiment. Mes étudiants sont
malheureusement en période de concours, raison pour laquelle je suis venu aux
Bouffes du Nord sans eux. Mais je ne désespère pas de les ouvrir à votre
travail : y a-t-il un site où sont annoncés vos dates de spectacles? Vous avez
paru intéressé à l'idée de venir leur parler de votre démarche ; vous serez
évidemment le bienvenu. A titre personnel, je serais très heureux de suivre
votre parcours ; ne manquez pas de m'y associer ; et si vous avez besoin de
quelqu'un pour écrire sur votre travail, je le ferais très volontiers, même si
je ne doute pas que vous soyez bien entouré. Une dernière fois merci, pour le
théâtre et pour votre accueil,
Ah, merci !
Oui, vous avez tout
ci-dessous (un blog à n'en plus finir et des clips vidéo...)
Bien-sûr, comme je vous
disais, si vous voyez une possibilité que je rencontre les jeunes gens
intelligents, ce serait avec plaisir et une grande curiosité...
Ecrire sur mon travail,
oui, ça me serait d'une grande utilité...
Vous aurez de mes nouvelles
de toute façon, je vous ai mis dans la liste (de la newsletter).
Le prochain spectacle est
un solo à Avignon cet été, à La Condition des soies (malheureusement un solo,
trop cher pour que je fasse venir du monde ni que je fasse de la lumière, etc.,
mais la salle est sublime...)
Très touché de vous avoir
rencontré et curieux de vous connaitre, cher Bertrand,
Yves-Noël
Daniela Labbé Cabrera
J'écris un peu tard... le
temps est passé vite depuis le vendredi 11 avril, mais c'est resté imprégné en
moi. Je voulais te dire combien 1er
Avril était magnifique, te le redire
car je sais que cela à été dit mille et une fois, le dire encore et encore,
comme les choses précieuses qu'on ne se lasse pas de dire à l'infini et qui ont
des milliers de mots pour la décrire. Moi, je ne peux pas décrire ce qui me
bouleverse tant à chaque fois dans tes spectacles, il faudrait en écrire un
autre, un poème, mais te dire seulement que c'est la poésie, au sens véritable
du mot POEME qui est là sur scène sous nos yeux. Tes spectacles sont somme un
air que l'on respire en haut d'un sommet qu'on aurait mis longtemps à gravir,
ou comme une aube qui surgit après une nuit d'amour et qui nous fait voir qu'on
a perdu la notion du temps. Merci, merci de ce cadeau à chaque fois renouvelé,
un infiniment grand fait de tant d'infiniment petits. Bien à toi, Daniela
Merci 1000 fois (1000 et
une fois), Daniela, d'avoir pris la peine de me le dire de mots précieux (je
les ressens, en tout cas). Merci !
Caroline Deryckere
Bonjour ! Merci d'avoir
accepté mon invitation... J'ai assisté à votre représentation du 10 avril,
celle où Bertrand a chanté pour moi le dernier mouvement du Stabat Mater, de Pascal Siankowski. Nous nous sommes aperçus au
bar des artistes après. J'étais très impressionnée. J'ai adoré votre spectacle.
Vous avez su quoi leur dire à la radio ?
You're welcome ! Merci
infiniment ! La radio, je ne sais pas, on verra... Cher Yves Noël,
Floriane Comméléran
J'espère que tu vas bien.
Voici une invitation pour Agatha.
Je serai très heureuse que tu puisses venir. Soleïma m'a dit que tu étais à
Avignon mais sait-on jamais...
Un autre mot, pour te dire
que les jours ont passé depuis le stage à Vitry, mais je me rappelle toujours
et presque intact, le bonheur que c'était. J'ai vu 1er Avril et c'est aussi ce que j'ai ressenti, le bonheur... Ça
n'arrête pas, c'est très fort, envahissant, dans tes pièces. Une sorte de
plénitude, de totalité, celle d'être et de regarder. Foucault dit à propos de
l'écriture : « ce n'est pas l'écriture qui est heureuse, c'est le
bonheur d'exister qui est suspendu à l'écriture » et bien c'est exactement
ce qui se produit en travaillant avec toi ou en regardant les acteurs se
mouvoir dans tes pièces, dans leurs plus beaux rôles, ceux qu'ils sont vraiment
multiples et uniques.
Je t'embrasse et à bientôt,
Floriane
Merci Floriane !
De tout cœur avec toi pour Agatha, quelle belle pièce ! quel beau sujet surtout !
J'aurais adoré t'y voir. Oui, j'essaie de décrocher un peu. Mais aujourd'hui,
tu vois, je suis encore resté chez mes parents, pas à me reposer, mais sur
Internet et au téléphone. Mais, demain, je me le promets ! je pars...
Des bises,
Yvno
Nathalie Feyt
Il me semblait que la
diaphane jeune et si jolie femme blonde en noir dans un ensemble pantalon avec
un haut de tous les décolletés : Dominique Uber était venue les chercher ces
crânes sous nos sièges mais, en fait, ce n'est que projection rêve car nous étions
plus bas au 1er rang là ou l'ecclésiastique ou SDF ou marginal ou ombre
ou lépreux était venu nous chatouiller les pieds. Je me demande si c'était
réalité ou confusion avec mes rêves. La jeune femme avait un pistolet qui
semblait comme prêt à tirer, sur un farfadet un beau jeune homme nu 3/4 de dos
libre et heureux de s'entraîner à sauter à la corde imaginaire, celle par
laquelle il aurait pu se pendre, être condamné comme l'autre homme avec son
bout de sexe rose qui dépassait de sa
braguette. Des touristes qui deviennent une parabole de notre époque. O comme
vous, ma sœur, j'ai eu envie d'embrasser le sol, la pierre froide du monastère pour qu'enfin ma vie
ralentisse un peu !?!
Labels: bouffes, correspondance
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