Marie-Noëlle pense : Je suis dans une forêt profonde. Marie-Noëlle lit Emily Dickinson. C’est ma sœur, pense-t-elle. Mais Emily Dickinson est la sœur de bien des jeunes filles. Marie-Noëlle s’est promenée dans la foule de Noël. La FNAC, H&M, elle n’était pas venue depuis vingt ans… L’inflation n’existe pas, c’est toujours aussi peu cher, H&M, toujours la caverne d’Ali-Baba, le réassort permanent. Mais elle n’a rien acheté. Elle a de la tendresse pour ceux qui achètent, elle a été l’une d’entre eux. Mais maintenant, elle est un pur esprit, elle n’a besoin de rien. Elle sent que si Dieu existait, il ne permettrait pas H&M. Il ne permettrait pas bien des choses. Mais c’est heureux aussi, il ne réprime pas, Dieu, il laisse leur liberté aux humains, il sait qu’il faut qu’ils en passent par là. La destruction de l’esprit, le vol des morts, la mort des couples, des familles, le parfum, tous ces parfums, toutes ces paillettes, ils veulent rêver, les pauvres. Elle sait tout ça, Marie-Noëlle, mais elle trouve qu’il n’y a rien de plus beau que se promener dans la foule de Noël. Sans rien acheter. Elle habite un tout petit cagibi, Marie-Noëlle, c’est pourquoi elle n’a besoin de rien : pas la place.
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