Wednesday, May 11, 2011

Chien blond (animal nocturne)

Petit journal de bord (d'un stagiaire)


A la question « Faut-il coucher pour réussir ? », il répond oui. Sans hésitation.
D'ailleurs, il encourage à se laisser tripoter. Ou, plus précisément, à le tripoter. « Mais tu vois comme Felix a tout compris ? Lui, il me cajole, m'embrasse, me caresse le torse, me lèche les aisselles… » Alors, oui, je comprends mieux ce qu'il attend de nous. « Oh, comme tu es jaloux ! – Mais non. – Si, tu es jaloux ! » Parce qu'après trois semaines de travail, il prétend me connaître. « Je trouve que tu es bien compliqué. » Pourtant j'avais dit oui au costume. Je m'étais mis en bas résille sans broncher. Violet. Avec un costume de prince pour le haut. Trop petit. Et torse nu. Les couilles à l'air. « Ça serait bien que tu mettes ta main devant, comme un jeune prince qui a oublié de mettre sa coque avant d'aller danser. » Et puis, après, les costumes, c'est de la merde. C'est répressif. Ce qu'il faut, c'est le bruit de la chasse d'eau des chiottes. Le faux-semblant, c'est has been. Il faut toucher du réel, quoi. Alors, maintenant, c'est en jean, chemise et surtout pas de perruque. On troque les paillettes pour la moustache. Fini l'ère de la tapette. On est viril au plateau.

Je suis un peu perdu.

« Tu rames pas un peu, là ? C'est la barque au milieu du Sahara, ce que tu nous fais. – Je comprends pas tout… – Oh, mais, moi, je suis l'école de la rêverie et de la confusion ! Peu importe la méthode, ce qui importe, c'est le résultat ! »

« Qu'on ne nous reproche donc point le manque de clarté, puisque nous en faisons profession. »

Simon Pédé, pourquoi lui as-tu filé cette citation de Pascal ? Maintenant il se planque derrière, ce chien blond.

Se plier au jeu. Partir sur le principe que c'est une pédagogie qui commence dans les ténèbres de la nuit. Je la joue romantique allemand pour que ça rentre dans le cadre du stage. Oui, Yves-Noël aime nous perdre dans le noir. D'ailleurs, il parle souvent de labyrinthe ou de backroom. Ce n'est pas par défi ou pour mettre un esprit cartésien comme le mien à l'envers. Non. C'est juste qu'il est un animal nocturne fait pour voir dans la nuit, ce salaud. Si on se perd dans les couloirs sombres du Berghain, c'est pour trouver l'éclair de la grâce qui ne peut luire que dans la nuit la plus extrême. Un peu comme ce qu'il essaye de me transmettre… Une obscurité qui n'existe qu'en vue de l'aurore qui se prépare en elle. Alors puisque Dieu est un dieu caché, je vais aller me paumer dans les couloirs sombres. C'est promis. En espérant qu'il y ait des stroboscopes.

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