Les
passants
Yves-Noël Genod : exercice d'admiration numéro 3
Yves-Noël trouve que mes chroniques ne vont pas,
qu'elles sont surracontées, qu'il y a un problème avec le fait de nommer les
acteurs. Yves-Noël fait sa Pina, sa diva, queue j'aime quand il fait sa Pina,
en ce jour d'ascension. Yves-Noël préférerait que je d'écrive sans décrire, il
me dit que quand les acteurs sont « bien » sur le plateau, ils sont
n'importe qui, des passants. Je suis d'accord, je comprends et en même temps
c'est compliqué. Les acteurs d'Yves-Noël, je les aime tant, comment les passer
sous silence ? Marlène Saldana, rien qu'en écrivant Marlène Saldana, j'ai
l'impression d'en dire tant sur Marlène Saldana. Je crois que jamais je ne
pourrai saisir tout ce qui surgit sur ce plateau d'Yves-Noël Genod, c'est trop
vaste. Alors je saisis des trucs au vol, des bribes, des confettis. J'espère
pour Yves-Noël que je ne saisis rien au viol. Le théâtre d'Yves-Noël n'est
plus, n'est pas cet espace délimité dans le temps et dans l'espace (justement)
que l'on voit partout. Les acteurs d'Yves-Noël viennent de la rue, traversent
le plateau et s'en retournent à la rue. Le spectacle a commencé bien avant la
réprésentation, il a commencé dans la vie de chaque acteur, à la naissance de
chaque acteur, de même il se prolonge dehors, dans la rue, le soir, la nuit, le
jour, dans la vie de chaque acteur, dans son futur, dans son lit, jusqu'à la
mort de chaque acteur. Pour les acteurs, je vais adopter une solution
nouvelle : je vais dire Il et Elle. Bien sûr, derrière « Il » il
y aura machin ou machin, derrière « Elle » il y aura bidule et
bidule. Faut donc imaginer un « Il » pluriel et neutre, de la même
façon un « Elle » neutre et plurielle. Idem pour Yves-Noël, je dirai
« Il ». Désormais mes chroniques seront pleines d'îles, pleines
d'ailes. Et autant en emporte le vent. Le vent. L'amour, l'argent, le vent,
comme le chante Barbara Carlotti. Point de vent aujourd'hui. Peu d'amour, pas
du tout d'argent. Aujourd'hui c'est calme et laconique. « Avec l'argent
tout est possible. » « Le verbe acheter remplacera-t-il le verbe
aimer ? » Elle se frotte les cheveux avec de la paille. C'est le
moment du shampoing à la paille. Son portable sonne, elle s'en amuse. Elle
porte une brassée d'herbes coupées comme on porte un enfant. Je pense à
Rousseau. Le Rousseau de l'Emile ou De l'Education. Pauvre Jean-Jacques que
l'on a tant emmerdé. Jean-Jacques qui savait si bien éduquer les enfants, lui
qui avait abandonné les siens. « Journée de bonheur, hallucinant de
bonheur. Le secret vermillon. » « Rien n'est trop beau. Pour vous. »
Rousseau encore : Il faut cheminer dans la nature, c'est là qu'on grandit.
« Quelle imposture, le futur. » « Nouveau jour de vie, la Tour
Eiffel. » De la végétation a pris place dans les cheveux de l'actrice.
« Terre d'ombre, Véronèse. » « Le bonheur ? Pas difficile
du tout. Pas d'effort. Pas le moindre effort. » Une marche de la nature.
La poule est d'accord. Elle caquette un oui massif. Le développement de
l'humanité. Toute de rose vêtue, la petite fille fait une apparition.
« Hi, Kitty, hello Kitty, how are you ? » La mère et l'enfant se
disent des secrets. Des secrets ou des explications. « Capital bonheur. La
minute idéale. » Es-tu passé par Ermenonville ? « Qu'est ce que
c'est, le bonheur ? Le bonheur, comme un parfum. » « Gagner 10 %
à chaque instant. » 10 % sur le temps, 10 % sur la mort, 10 % sur
l'espace. 10 % de bonheur. En plus. La petite fille a des jeux interdits avec
les oiseaux. 1789 / 2012, c'est pareil, c'est du pareil au même. Le Rond-Point
et le Hameau, même combat. Versailles, Champs-Elysées Clémenceau. Marie-Antoinette
is still alive. A cour, à jardin, à la Cour, dans le jardin. Les courtisans,
les jardiniers, des passants. Une passante du Sans-Souci, qui passe.
« Acheter, triomphe. » « Un nouveau bonheur. Un tout petit
bonheur. » « Don't forget, little girl, it is not just a garden here.
You have to organize, delicatly, play with your hands. » Play it like
Partage de midi. Just like that. It's easy. « Do you know this
flower ? Do you know the name ? It is called « Forget me not ».
« Là-bas, il y a quelque chose. » Si. C'est si joli, qu'ils disent. « Que
ne se suicident-ils pas, tous ces prédicateurs de la lune ? » Elle
saupoudre de la paille. « Non merci, pas de ministre. » « Les expositions
de peinture, finies. » « Ici, la nuit éternelle, le noir. » Et
comme dit Gilles Clément : On va mettre le sauvage, la mauvaise herbe,
dans le jardin. On va le faire. Pourquoi se gêner ? Du sauvage, du réel et
de la mauvaise herbe. Dans le jardin. On va semer, asperger, planter. Dans le
texte, aussi.
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