Monday, June 06, 2011

Jeunesse communiste

Ce soir, on a vu Le Procès, d’Orson Welles. Déçu. Très déçu. Mais pas désappointé. Dans les grands lacs de l’incompréhension, se déshabiller et – nuitamment – rêver – et dériver.

On a évoqué l’Afrique, le matin, très bien. Enfin... On avait vu – revu – le film de Jean Rouch, Les Maîtres fous. On a dit que la voix du présentateur avait vieilli, était pénible – et ce qu’il disait aussi – alors que les images étaient absolument modernes, qu’on pouvait les regarder sans fin, modernes et mystérieuses à l’infini. C’est comme ça que ça a commencé, ce dimanche. Lucien a dit qu’en même temps, c’était difficile de ne pas se sentir comme un colon quand on se retrouvait en Afrique et il a parlé de son expérience. Bénédicte aussi. Avec Langhoff, l’école du TNB. Et l’Afrique a été là pendant une heure ou deux. Ensuite, Lucien m’a montré son travail, une vidéo sublime, qu’immédiatement j’ai trouvé sublime alors qu’il s’excusait d’avance, que, sans doute, j’allais trouver ça kitsch. Et nous étions désormais amis. (Toujours sa manière de dire : « Puisque tu acceptes n’importe qui comme ami, je vais te demander comme ami. »)



Je n’peux pas me branler, dans la caravane. Je ne sais pas comment ça se fait, le moindre mouvement met en branle toute la caravane, tout vibre, la caravane devient très bruyante. J’ai ma pudeur, quand même, je n’ai pas envie d’ameuter tout l'quartier pour juste un peu de détente. J’ai essayé plusieurs fois de faire le moindre bruit possible, le moindre mouvement, mais il en faut quand même un peu, j’ai renoncé, à chaque fois. Trop fatigant, trop scabreux (penser que les images suffisent…)

Il y a des étoiles et une nuit complètement muette. C’est mystérieux. Personne ne fait du bruit ni la rivière ni rien. L’autre fois, il y avait quand même un grillon (même en plein hiver). Il ne fait pas froid, ce soir, il y a des étoiles, mais plus rien ne vit.



Je n’savais pas qui j’étais, si même si j’étais. Ce temps blanc cotonneux… J’avais rêvé de François Tanguy qui disait : « Il est plus facile de travailler avec les faibles qu’avec les forts. » Et je lui avais dit que je comprenais ce qu’il disait, qu’en ce sens, oui, c’était vrai. Il voulait travailler avec Felix et avec moi (avec d’autres aussi) et j’avais failli abandonner toute activité sur le champ. Puis j’étais venu vérifier – sur place – s’il s’agissait de l’immédiat ou du futur ou du futur immémorial. Du futur – immémorial. Ouf. (En un sens.) Il y avait mon père, sur un banc, dans une bizarre position, mais que je ne remarquais pas immédiatement. Je l’embrassais. Sur lui. Comme j’aurais fait avec Felix ou comme l’aurait fait un enfant grimpé sur lui. Et il me disait : « C’est pour pas que ça colle. – Comment ? – C’est pour pas que ça colle que je me tiens comme ça (la main vers le haut). Ça colle, mon survêtement. » En effet, son survêtement usé et sale, violet, violassé, mauve-sale était poisseux, en plus. Comme du sucre. Et il tenait sa main au-dessus de lui « pour pas que ça colle ». Je l’embrassais comme un enfant. J’avais dit à Tanguy que Felix était le plus fort que j’aie jamais rencontré, pour dire qqch et le détourner de ce problème de dates – et personnel – que j’avais eu la grossièreté – et l’irrespect – de venir lui soumettre – et, en même temps, quoi de plus naturel ? – c’était ma mère qui m’avait suggéré de passer – mais, maintenant, j’invente – qu’est-ce que ça change ? C’est la première fois que je parle de François Tanguy. L’évènement est là. Il y aurait à dire ! Et ne pas savoir s’il fait beau ou non à travers la dentelle très lourde du filet qui sert de rideau, à travers le plexiglass couvert de colle, grossièrement recollé, à travers le gris-blanc et le bleu-faible (peut-être) – me mine – me mine, de toute façon. Rien n’aura eu lieu qu’un écran d’ordinateur. Et un très beau spectacle de François Tanguy. Onzième, est son prochain. Du film de la veille (home cinema) me restait des images, des images impressionnantes. Là où Bénédicte et Lucien avaient dit : « On comprend l’inspiration de Boltanski. » C’était vrai, Christian Boltanski semblait n’avoir rien inventé avec ses boîtes et ses empilements de dossiers, ses petites lumières et ses piles de tissus, l’anonymat, le nombre, tout était créé – et bien mieux, plus virtuose – par Orson Welles. Christian Boltanski – encore un mystère – représentait la France partout dans le monde. Avec des œuvres, mon Dieu, tellement dérisoires... Qui n’arrivaient pas à la cheville, même pas à la cheville – ce qui n’était pas difficile – du Procès d’Orson Welles. (Lequel pourtant était très loin du Procès de Franz Kafka.)

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