A utorretrato
« J’ai cette espèce de
facilité à voir le côté terrible des choses. »
« C’est quoi, la
poésie ? — et c’est une réflexion qui est compatible avec cette survie.
Cette survie brutale et sauvage. »
« Moi, ce que je veux,
ce sont des corps qui ne s’interrogent pas, qui ne se posent pas de questions,
qui sache être. Et, en fait,
ça se fait assez facilement quand on travaille avec des acteurs qui ne sont pas
professionnels. Ce sont des gens qui ne se posent pas de questions, ils ont une
nature brutale, bestiale sur scène. […] Avec ces gens-là, vous avez une espèce
de tranche de vie naturelle de nature sauvage, ils ne travaillent pas autour
d’un processus intellectuel, ils sont « nature ». Et, après tout, on
a un être vivant sur la scène qui, elle, est par déf un environnement artificiel
et cette mise en relation, c’est ce qui vraiment me plaît beaucoup et que
j’adore, mais c’est, en même temps, ce que j’aime aussi beaucoup et c’est ce que
j’admire beaucoup chez les grands acteurs […] Tous ces gens-là savent
faire ça et, ce que j’aime, en fait, c’est de mettre en conflit ou de faire entrer
en conflit ces 2 mondes, celui des acteurs professionnels et non
professionnels. »
« Moi, ce que je veux,
c’est que la scène soit corrompue
par la vie et réciproquement. D’ailleurs, ça m’a posé quelques petits
problèmes à l’occasion, ça a pu avoir des conséquences sur ma propre vie, des conséquences même définitives dans ma
vie, des changements, des amours, des désamours, des haines, des douleurs…
D’ailleurs, c’est si vrai que ma vie a fini par se transformer en carnet de
notes, un petit carnet où je prends des notes et, évidemment, ceci influence
sur ma vie, sur mes relations — et ça c’est fait sans préméditation de ma part.
On ne peut pas dire que j’ai une sorte de point de vue ou de démarche
intellectuelle initiale, plus maintenant, plus jeune effectivement, alors
j’écrivais des grandes conférences fleuves où j’expliquais, je justifiais mon
travail en parlant de Derrida, en citant l’un, l’autre… »
« Pour pouvoir parler de
la matière de ce dont on parle, il faut se défaire, se détacher de la morale
pour un temps. On peut faire 2 choses quand on fait un scénario, on peut
juger ou ne pas juger. On peut tout à fait regarder l’être humain sans le
juger. »
« C’est avec ce pire de
moi que je travaille. »
« Ce que je ressens, je
dirais, à chaque fois que je viens rompre le pacte social. »
« C’est vraiment sur
scène que je peux rompre ce pacte social sans finir soit en prison, soit dans
une maison de fou, à l’asile. Ce que je fais, en fait, c’est que je construis,
en fait, des prisons et des asiles de fous sur scène. Il est vrai que la pensée
me donne cette liberté absolue, cette liberté de penser qui m’appartient, donc
je peux me permettre de rompre le pacte social sur scène. Si je le faisais,
évidemment, dans la vraie vie, je prendrais des pistolets et je descendrais
dans la rue. »
« Moi, j’ai besoin de
conclure, si vous voulez, la fiction en passant à la confession. Je finis l’un dans l’autre. […] Moi, j’ai
besoin d’expliquer à tous les
niveaux, au niveau de la fiction, au niveau, si vous voulez, documentaire et au
niveau de la confession, la
réalité. Donc je fais un entrelacs entre ces 3 réalités et j’aime cette
bataille qui se fait entre l’aspect document, le côté fiction […] ce que je
veux, c’est que l’on comprenne ce dont je parle, c’est une obsession chez moi.
Et, de la même manière, j’ai qqch qui m’obsède, c’est un véritable besoin de vérité — la vérité par-dessus tout. »
« Je ne me suis pas
confronté à l’écriture dramatique en tant que telle, je me sens plus proche, je
dirais, ces derniers temps, de la poésie, puisqu’il n’y a pas de séparation, dans la poésie, entre l’auteur et
le verbe et le mot, la parole. Alors, du point de vue de l’écriture, je
travaille sans séparation entre ce que j’écris et ma vie. Ça serait pas
concevable, pour moi, de séparer les 2 et, en même temps, je suis tout à fait
consciente du fait théâtral, de la composition et tout ceci relève ensuite
d’une composition en fait, très, très stricte, très enrégimentée ou codifiée,
j’ai besoin d’avoir des images, il faut que tout cadre et fonctionne et
s’emboîte parfaitement et je pense que la vérité, elle-même, elle doit être
construite. »
« J’ai appris à vivre
sur scène. C’est là que j’ai appris à vivre. Donc à chaque fois que je quitte
la scène, je me sens de plus en plus inutile, je me retrouve dans la vraie vie,
je me sens un peu perdue, j’ai une espèce de dépendance un peu brutale. »
« Ce serait très
difficile, pour moi, d’imaginer ma vie sans pouvoir poser ces actes démoniaques sur scène, ce contact avec l’enfer, cette nécessité
de tomber le masque social. Parce qu’on a un être social, on a un être
privé et en l’occurrence, en ce qui me concerne, un être scénique et, moi,
l’être scénique coïncide avec
l’être privé, c’est une libération pour moi de l’être social qui se produit
quand je travaille, cela me retire un poids, le fait d’appartenir à l’humanité,
à la société, devoir être en interaction avec d’autres personnes, avec d’autres
gens. »
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