Sunday, April 13, 2025

L ’Uniforme de son sexe


En fait, il m’aurait suffi de vivre toute ma vie avec Legrand pour être heureuse… En fait, il me suffisait de vivre avec Legrand pour être heureuse parce que j’étais amoureuse de Legrand et je l’avais constaté en Bretagne. Je ne savais pas pourquoi (ni comment) Legrand supportait cet amour pour lui — parce qu’il le supportait, c’était ça, le miracle. Il y répondait avec second degré, ce qui m’allait très bien car le second degré est ce qui permet la vie sur terre, j’en suis persuadée (et, si l’on y étouffe parfois, c’est par goût du premier degré). En tout cas, avec Legrand, c’était la condition de notre existence. Sa gentillesse, c’était qu’il répondait à l’insistance de mon amour par le second degré. Ainsi la vie semblait allégée, rêvée ; tout était possible entre nous, tout était subsidiaire… Une fois Legrand m’avait engueulée. Sévèrement. Je conduisais, j’avais dû arrêter la voiture. Il me reprochait de trop dénigrer le militantisme. Je ne voyais pas trop ce qui produisait ça, cette colère, parce qu’il était bien souvent d’accord avec moi. Mais, pour lui, ce n’était pas le militantisme qui était méprisable, c’était le dogmatisme. Plus tard (comme pour s’excuser ?), il m’avait envoyé une vidéo montrant Annie Le Brun en 78 qui avait écrit un pamphlet contre ce qu’elle appelait le « néo-féminisme » par opposition au féminisme primitif de Louise Michel, Flora Tristan… « dont le souci majeur était justement d’en finir avec tous les ghettos des femmes entre elles ». Contre aussi le militantisme  : « Dans militantisme, il y a le mot « militaire » et, pour ma part, je serai toujours du côté des déserteurs contre les armées normales ». En face d’elle, Gisèle Halimi, le mensonge incarné, le sourire aux lèvres, sûre de son bon droit, la voix d’institutrice (avec le recul, ça ne pardonne pas). ALB : « Pour moi, la question fondamentale, c’est d’en finir avec les meutes hurlantes dont notre époque s’est montrée si féconde ». J’avais aimé que Legrand m’engueule, que le ton monte. C’était sexy. C’était comme si qqch de sexuel se passait entre nous. Oui, c’était comme une forme du sexuel. Marguerite Duras, dans mon enfance, affirmait que tout était sexuel partout, tout le temps. Pour elle, c’était vrai, mais, avec Legrand, pour moi, c’était vivable, c'était possible que tout soit sexuel et seulement ça. La communauté inavouable. La voiture était garée au soleil, sur le bas-côté de la route centrale de la presqu’île de Crozon et, pendant 3 1/4 d’h, nous avions coupé le temps de la promenade pour délivrer violemment, bien qu’imaginairement  les spermatozoïdes et ovaire…


et son beau corps miroitait au soleil sur la plage, il avançait, la plage était immense et son beau corps miroitait

Le monde était beau, à ta semblance

« Et on en vient à refuser aux hommes et aux femmes le seul moyen qu’ils ont ici et maintenant de subvertir la misère des rapports humains car on les dissuade insidieusement de se rencontrer, voire de s’aimer et, ça, pour moi, c’est criminel »

J’étais toujours à deux, j’étais toujours secret, en équipe


« The outside world didn’t matter »

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