Saturday, October 17, 2020

 


C 'est le silence qu'il faudrait pour répondre


« Porte un regard bienveillant 

sur les tristesses de la terre »



Hello Martin, mon frère !

Je ne t’ai pas répondu : ma mère va bien, en perdant de plus en plus la tête, bien entendu. Parfois déprimant, parfois rigolo… Elle sera bientôt en maison de retraite, ce qui risque d’être moins drôle parce qu’avec la situation de la COVID, elle devra d'abord faire une quarantaine en entrant ; ensuite, on ne pourra jamais la sortir pour faire une promenade en forêt, par exemple ; ensuite, on ne pourra pas passer Noël ensemble à la maison (ou peut-être, si elle sort, devra-t-elle faire une quarantaine au retour, mais je ne suis même pas sûr que cette solution existe), etc. Bref, on appréhende, mon frère et moi, de recevoir l’appel de la maison de retraite qui nous dira qu’une place s’est libérée et d'exposer notre mère à cette situation…

Je pense aussi à toi et à vous tous, famille étasunienne tellement aimée, parce que j’ai commencé à regarder Emily in Paris sur Netflix. Choc des cultures. Ce n’est pas stupide, je trouve, mais je regarde ça surtout pour la nostalgie, pour quand Paris était encore Paris, New York New York, et que nous pouvions voyager, et nous faire la bise, etc., et goûter des escargots, etc, et ne pas écrire en écriture inclusive, et aimer ce monde maintenant disparu. Les Etats-Unis gagne tout, gagne partout, mais, oui, j’aimais tellement ce pays quand c’était ta famille à toi qui en était l’ambassadeur !

Je suis en Suisse, à Lausanne, pour préparer un spectacle qui s’appelle C’est le silence qui répond et qui est très, très beau. Les lumières sont comme des galaxies, des étoiles, des trous noirs… (J’ai envoyé des photos très colorées de la NASA à mon éclairagiste et il a répondu au cahier des charges bien au-delà de mes espérances.) J’espère que nous pourrons le jouer (dans huit jours) ; de nouvelles mesures restrictives doivent être annoncées car les cas augmentent beaucoup ici aussi. A Paris, c’est déjà le couvre-feu (même mot que pendant la guerre). Les restaurants et les théâtres sont foutus. Les théâtres essayent de déplacer les horaires du soir en « matinée » pour ne pas fermer définitivement, mais on comprend déjà que ce couvre-feu ne marchera pas non plus et qu’il faudra reconfiner… 

Dans les journaux on ne parle que (ou presque que) de Trump depuis des semaines, des mois, des années, des siècles et je ne comprends pas pourquoi. Pour ma part, j’ai compris dès le début il y a quatre ans (ce n’est pas pour me vanter) que 1) il allait être élu et que 2) il était élu à vie (comme Poutine). J’espère me tromper, mais, bon… La gauche étasunienne est dans un tel état de déliquescence, engluée par le politically correct… Tout sert Trump, dans tous les sens, toujours. Tout dessert son adversaire, toujours, qui lui sert de faire-valoir. Je me disais qu’il n’y aurait qu’un moyen, peut-être, pour le défaire : ne plus en parler du tout. Ne jamais relayer. Effacer son nom. Il n’y aurait plus que Fox News qui deviendrait chaîne officielle (n’est-ce pas ?) et ses tweets et le silence de tous autour. C’est le silence qui répond. Peut-être que ça, ça marcherait. Mais c’est le contraire de ce qui se passe. On ne parle que de lui. Et même en France (alors qu’on ne vote pas) — particulièrement ici, quel intérêt ? je ne comprends pas.

Je t’embrasse, mon très cher frère, et toi et toute ta famille : portez-vous bien !

Yves-Noël


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