Monday, March 19, 2012

Contour




Matthias Hejnar
Touché plus que d'ordinaire, déplacé plus que je ne veux bien me l'avouer, je suis bien obligé de vous faire par de mes sentiments. En temps normal, je n'oserai pas, je suis pudique là-dessus.

Je n'avais jamais rien vu de vous. Que des vidéos, photos, écrits. Je vous ai découvert par hasard, je ne sais plus comment. J'ai beaucoup rêvé, fantasmé sur vos spectacles. Je voulais en avoir le coeur net. Savoir si c'était vrai. Je me suis échappé de ma prison dorée (TNS) pour tenter l'expérience. Je ne voulais pas être déçu, j'avais beaucoup d'attente. Ce fût merveilleux/lumineux.

Comme je l'ai dit à Charles, cela faisait longtemps que je n'avais vu des gens aussi beaux sur scène. Cette beauté que les enfants (et d'ailleurs, pas qu'eux) ont après un sommeil profond. Après une sieste. Lorsque l'on a côtoyé le monde des rêves. Ces souterrains immenses.

Il y avait quelque chose de l'ordre de la nature, quelque chose d'indomptable dans ce spectacle. Voir ces corps en flottaison, sorte de missionnaires du chaos, de fantômes sous les villes. Il n'y a de beauté que dans les commencements, je crois, et, leur talent, ce fut de faire comme si c'était une « naissance ».

Tous vous avez réussi à faire advenir un autre monde, invisible celui-là. Le réel n'est pas que du visible !

Il y a peu de temps j'ai fait connaissance avec une citation de Victor Hugo, que j'aime beaucoup, mais que je n'arrivais pas à mettre en résonance avec une de mes expériences. Avec ce spectacle ce fut le cas.

« La beauté n'est pas autre chose que l'infini contenu dans un contour. »

Un grand merci.

P.S: Je ne sais pas comment faire, ni si cela se demande, ni si cela est la bonne formulation... mais... J'aimerais bien que vous passiez faire un stage au TNS.






Eh bien, cher Matthias Hejnar, pour moi, une preuve de réussite de ce travail, c'est absolument la beauté de ce que les gens en écrivent ! On n'avait pas dit des choses si belles depuis le spectacle dans le noir total que j'avais donné, dans ce même lieu, il y a quelques années (Le Dispariteur, dont il n'existe, évidemment, aucune image). Que nous soyons parvenus, cette troupe-miracle, a toucher certains spectateurs de cette manière-là, si intime, si bouleversante, est absolument ce qui rend ce travail infini... Il n'y a pas d'autre sens aux choses. Merci !

Pour le TNS, ce serait, évidemment, avec plaisir, mais il faudrait que vous le suggériez (à Julie Brochen ?) – j'accourrais !

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The Magic Mirror of John Dee

dont parle Smaranda Olcese



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Pamela Is Back In Town !




Pas de Chic By Accident programmé cette semaine... On a tous le baby blues... Heureusement une autre chose excitante (dans le sens qui fout la pêche) : des satsangs with Pamela !

Par la Grâce de Ramana Maharshi, H.W.L. Poonjaji et Neelam



« You are thought's guru. Why wait for thought to realise the self ? You are the self. We have the cart before the horse – waiting for thought and the body to realize its true nature, so we can rest ! » « Vous êtes le gourou de la pensée. Pourquoi attendre que la pensée réalise le soi ? Vous êtes le soi. Nous avons mis la charrue avant les boeufs – nous attendons que la pensée et le corps réalisent leur vraie nature pour que nous puissions nous reposer ! »



Paris : Satsangs : mardi 20, mercredi 21, jeudi 22 mars, à 19h30
Lieu : chez Lydia Rolland, 8 Rue d'Anjou, 75008 Paris, Métro Madeleine ou Concorde. Bus : 42, 52, 72, 73, 84, 94
Code : 6432



(Cliquer sur le titre pour information.)

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Elle est charmante, ta copine Blandine Costaz, on a parlé de toi à déjeuner, elle m'a dit que tu écrivais une pièce, c'est bien ! Tu me manques ! Sexuellement. Trop envie de poser ma tête dans ton entrejambe. Mais, bon, c'est sans doute ton refus qui laisse le désir durer... Baisers YN

Bonsoir, mon blond,
Je suis heureux que vous vous soyez rencontrés. Je l'apprécie beaucoup.
J'ai revu quelques-uns de tes élèves du TNB qui étaient une nouvelle fois à Berlin pour le FIND festival de la Schaubühne. J'y ai découvert la fausse maternité de madame qui avait réussi à me faire toucher son ventre, sans que je m'aperçoive de rien.
Moi aussi, tu me manques. J'aurais envie qu'on se retrouve en terrasse au soleil, et qu'on parle autour d'un truc à manger.
Et puis, j'en ai marre de rater tous tes chefs d’œuvre, d'être loin de ton travail ! J'en ai besoin, ils participent de ma foi – essentiel, donc. En regardant les images que tu as mises de Chic By Accident, ça m'a donné envie d'être dedans. C'est la première fois que j'ai cette envie parce qu'avant tout cela me semblait trop précieux. Et aussi, j'ai la sensation à force de regards, de connaître (sans savoir) ce que tu trouves (sans chercher). Mais ça semblait possible, là, dans ces images, qui ne disaient rien d'autre que la bienfaisance et la liberté. Et je lis les critiques et je me rends compte à quel point les gens s'autorisent à ouvrir leurs perceptions, à quel point ils peuvent embrasser un travail sans distance. Ça me touche particulièrement.
J'aurais aussi envie que tu viennes avec toutes tes mains sur mon corps, et que toutes les miennes t'en empêchent.
J'espère te voir bientôt, mon blond.
Je pense bien à toi, et t'embrasse.
Arnaud

Dedans comme... acteur ? Mais, y en a déjà trop, des acteurs... Non, ce qu'il manque, c'est des penseurs, des écrivains, des metteurs en scène, des artistes, des amants, tout ce que tu es. Tu pourrais toujours faire acteur, mais, enfin, bon, tu l'aurais déjà fait si c'était vraiment ton truc (les acteurs sont des drôles de bêtes, tu sais...) Je ne veux pas mettre mes sales mains sur ton corps, je veux y mettre ma langue propre ! YN

C'était plutôt dedans comme spectateur ! Non, ce que j'aime dans ton travail c'est quand je le vis par le regard, par la peau. Être dedans en tant qu'acteur, ça mettrait trop de distance. Ce que j'aime avec ton boulot, c'est quand je l'incorpore.
Il faudrait que tu fasses une pièce où le public est dedans, pas comme une entité « public » avec son espace identifié mais d'avantage dispersé, informel, lui aussi à poil en quelque sorte.
Des baisers

Ah, ça, il serait temps ! Une pièce réservée aux naturistes et friendly ! Il faut lancer ça ! C'est une expérience comme une autre ! Ça pourrait être très beau ! Dans des lumières de Philippe Gladieux... Oh, oui, faisons-le ! A Berlin ? Je suis prêt à tout. Dominique Issermann (!) vient de m'appeler pour me demander si je voulais monter un opéra, j'ai dit oui ! Orphée et Eurydice... On pourrait mixer les deux projets ! Un opéra, Orphée et Eurydice, mais pour uniquement un public déshabillé, la foule des enfers ! Orphée et Eurydice, eux, seulement habillés (il faut bien les distinguer...)

J'adore l'idée ! Il va falloir que tu reviennes à Berlin.
La foule des enfers, mais donnez m'en de la foule des enfers, j'en veux !
Chouette nouvelle pour l'opéra.
On a plein de choses à faire et si c'est avec toi, c'est encore - encore – plein de choses à apprendre.

L'opéra, c'est un rêve d'une femme sublime qui veut m'aider (elle a adoré le Chic By Accident). Mais nous pourrions le monter underground, en attendant...

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Mettre le feu au printemps

(l'étincelle restante)




Photo Philippe Gladieux.

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La Débutante

Objet : Précisions (Naviguer, c'est précis...)



Mon Yves-No, my dear,
Juste, parce que cela m'est venu dans la nuit, quelques précisions sur ce bonheur calme dont je te remerciais hier par sms...
Ce que j'ai adoré dans Chic By Accident, cela a été de me sentir débutante. Timide en fait, cherchant à ne pas abîmer ce qui existait déjà beaucoup avant que je ne vous rejoigne... Timide, mais tranquille, pas timide et apeurée et obligée de prendre d'assaut le centre (obligée au sens français et au sens anglais : contrainte et reconnaissante) comme je l'ai été à mes débuts... Ça m'a impressionnée que tu me racontes que quelqu'un avait pensé au baiser de Dom Juan parce que moi je n'y pensais pas du tout. A ce moment là de la pièce, je pensais plutôt être une troisième Phèdre. Comme si Wagner avait eu affaire à 3 Phèdre en rafales, Marlène, Valérie, moi, 3 visages de Phèdre. Et cela me plaisait beaucoup parce que cela me faisait penser à ce que j'avais tellement aimé dans le Hamlet de Vanves: voir plusieurs visages d'Hamlet présentés par plusieurs acteurs et qui représentaient – sans les artifices du rôle d'emblée distribué à plusieurs – l'infinie multiplicité de ce qu'est un grand personnage de théâtre. Tu sais comme j'aime aussi retrouver les traditions (donc j'aime aussi le « personnage »). D'ailleurs, du coup, j'adorais cette histoire qui s'était nouée toute seule autour de mon désir de Phèdre : avoir apporté le livre, vous l'avoir laissé, qu'il ait construit le spectacle en mon absence, jouer le rôle sans le jouer, en partager la responsabilité sans même en avoir parlé... Mais si je n'ai à aucun moment pensé à Dom Juan, j'ai beaucoup pensé à la cour d'Honneur, surtout quand tu nous demandais d'imaginer l'univers au moment des saluts, mais à d'autres moments aussi. Je replongeais chaque soir avec un bonheur indicible, irracontable, dans ce premier moment de ma vie d'actrice, cette scène primitive : la toute première fois sous les étoiles, c'est quand même incroyable...! Et je me disais, mais c'est fou, c'est littéralement impensable, d'avoir eu des débuts à ciel ouvert, cosmiques, comme si c'était Epidaure... Donc, oui, j'étais ramenée au commencement, mais c'était comme si au lieu que ce soit trop brutal et trop central comme début, cela respectait cette fois ma timidité foncière – ma réserve naturelle. Car je prends beaucoup conscience en ce moment d'être naturellement réservée, infiniment plus que ce à quoi m'ont exposée, amenée, provoquée, ce grand miracle et ce grand cadeau que sont bien sûr ma présence. Timide aussi, d'une timidité que mon fils Pierre m'apprend à aimer, lui qui dit toujours « Je suis timide », alors qu'il est aussi si solaire et si exubérant, mais il ne cède pas d'un pouce pour faire reconnaître son droit à la timidité. Bref, j'ai plus qu'aimé, j'ai ressenti comme vital, d'avoir pu sous ton regard donner pleinement droit de cité (puisqu'on remonte jusqu'aux Grecs, soyons cohérents) à la discrétion, d'avoir pu la chérir en scène autant que je le fais dans la vie ! C'était pour moi comme de tout recommencer. C'était merveilleux. Merci grand et véritable ami ! Et donc, oui, du coup, peut-être ai-je inconsciemment repris les choses en leur début, repris les choses au baiser de Dom Juan : formidablement amusant me suis-je dit ce matin en me réveillant !
Mille baisers de printemps
Jeanne



Débuter, c’est ce qu’un acteur ou une actrice peut vraiment espérer toute sa vie et tu le montres bien, toi, toujours prête aux nouvelles aventures les plus improbables et surprenantes (ton art est aussi de les trouver et de les susciter). Oui, tu as un savoir du bonheur qui passe par les débuts ! Comme Handke disait, « Passe par les villages ». Content que tu tiennes en ton jardin les nouvelles exactes du printemps parisien ! Et content des résonances légères des rôles immenses que tu transportes – en les allégeant toujours, en les subtilisant. A très bientôt, très chère

YN

Au fait, Jean-François, il a détesté ou quoi ?
Dominique I. ne va pas à son expo demain, mais y sera mercredi. Je passerai peut-être en début d'après-midi (à 14h45, j'ai rendez-vous aux Beaux-arts) ou en fin de matinée, elle me dit demain ses impératifs, je te dis...

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« Mystérieux alliage entre la chair et sa déréalisation »




Encore un dithyrambe ! (Après celui de Jean-Pierre Thibaudat, par exemple.) Ce qui me trouble le plus, c’est que ces textes, loin d’apparaître comme des supports publicitaires sont pensés, et qu’en cela ils participent de la chose elle-même. C’est très émouvant et très, très troublant. Comme une communauté… Avec des phrases sublimes comme : « Yves-Noël Genod s’adonne à une archéologie de futurs abandonnés. ».
J'avais peur que ce spectacle dont je disais aux acteurs que j'en étais le fan, le premier fan, ne se comprennent pas, mais je suis ébloui du contraire, à quel point, au contraire, ce travail appartient encore plus qu'à moi à celui qui l'a aimé... Bien sûr, beaucoup de gens, des amis, des proches sont passés à côté (c'est inévitable et peut-être – peut-être même – bon signe), mais ceux qui ne sont pas passés à côté en parlent avec une exactitude sidérante... C'était donc un travail nécessaire.






Chic By Accident : Yves-Noël Genod à la Ménagerie de verre dans l’ouverture du festival Etrange Cargo



A partir du 12 mars 2012 jusqu'au 17 mars 2012
Lieu: Ménagerie de verre
Le festival Etrange Cargo continue avec Mon amour, création de Thomas Ferrand



La dernière création d’Yves-Noël Genod se donne à vivre comme une immersion inouïe dans le subconscient du théâtre contemporain. Une expérience fulgurante.

Artiste hors normes dont l’une des plus récentes pièces consistait en une irréelle lecture d’Une saison en enfer, d’Arthur Rimbaud, le metteur en scène accueille son public un livre à la main. Ce soir-ci il s’agit d’une compilation de Pierre Guyotat. Il va partager avec les spectateurs ce que le soir d’avant il avait lu à ses comédiens en guise de directions avant l’entrée en scène. Il scelle ainsi le pacte d’une communauté – il y va d’une responsabilité commune des acteurs et de leur public quant au sort de la pièce à venir. Construisez de vos illusions un berceau de verdure dans les déserts. Cette phrase résonne encore dans l’obscurité qui gagne le plateau, dense, profonde, qui dure. La grande salle de la Ménagerie de verre est l’un des rares lieux parisiens où l’on peut encore faire un noir total. En 2005 Yves-Noël Genod y donnait une création dont la quasi totalité se déroulait dans le noir : Le Dispariteur. Intitulé également du blog qu’il alimente au quotidien, cet attribut embrasse dans son indétermination même une démarche foisonnante, polymorphe, placée peut-être sous le signe d’une salutaire déraison (héritée de l’ancien « disparate » – incartade, action capricieuse et déraisonnable). Yves-Noël Genod tient des fils qui lui échappent perpétuellement, inlassablement. C’est son jeu et la vocation qu’il a faite sienne, dispariteur – rendre possibles des rencontres privilégiés sur scène, disparates présences qui tranchent, moments sublimes, rares comme des poèmes ou des œuvres plastiques.

Nous pourrions nous étendre sur des dizaines de pages à essayer de décrire l’apparition fantasque de Valérie Dréville, cette démarche lente et mal assurée que partagent tous les comédiens qui entrent un à un sur le plateau comme en train de charrier un trop plein de ressenti – Marchez comme si votre cœur était accroché aux murs ! se plait à dire Yves-Noël Genod en reprenant Martha Graham. Ou encore ce moment d’une beauté primaire, initiatique où l’on prend entre ses paumes de mains et l’on caresse des braises dont la seule lueur donne du contour et fait vibrer à l’espace.

Il serait peut être plus intéressant de faire se refléter cette pièce dans les eaux noires d’une œuvre de Joachim Koester, The Magic Mirror of John Dee*. Prenant appui sur le paradigme qui traverse les créations du plasticien danois, nous pourrions lire l’espace noir de la Ménagerie de verre en tant qu’énigmatique palimpseste : des sédiments, des occurrences, des bribes des mémoires oubliées lui donnent sa texture exquise de paysage mental. Tout d’abord le regard est absorbé par une obscure et dense absence et pourtant cette surface vide, déserte, muette, écrasée par des poutres massives en acier, semble émaner de présences endormies, de possibilités latentes. Yves-Noël Genod y love une persistance narrative insensée. Ses comédiens incarnent ces présences diffuses. Dans un premier temps, ils nous apparaissent en clair-obscur, tels des ombres, éthérées, légères, furtives et pourtant lourdes de sens et de vécu à force de répétitions, redites, tracés. La nécessité de leur présence ou de leurs moindres gestes reste secrète, intime, ne s’impose pas avec évidence, s’apparente d’avantage à la poésie, puise sa force dans des obsessions, hantises et délires. Les acteurs sillonnent le plateau comme autant de strates successives de mémoire. Le travail de la lumière rend palpable cette épaisseur d’espace psychique. Yves-Noël Genod s’adonne à une archéologie de futurs abandonnés. Il libère des possibilités de voyage dans le temps. Accessoires et détails deviennent des indices de ces histoires sans début ni fin. Les allers et venues des interprètes font avant tout signe vers un état de perméabilité improbable et éphémère : les murs entre les mondes deviennent poreux à ce point, les narrations se frôlent avec une infinie tendresse, parfois déraillent et s’entrechoquent avec éclat. Des nœuds de significations s’entretissent dans la boite noire de la Ménagerie de verre, zone crépusculaire entre la fiction de soi et le document brut qui laisse éclore, à partir des limbes du corps et de la conscience, cette précieuse mémoire opaque de la chair. Le metteur en scène semble mener un travail sur l’enfouissement des traces, l’invisibilité, les survivances. Des refrains ou mots oubliés refont surface de manière surprenante. Ainsi les tubes nostalgiques, vintage, crachotés par un téléphone portable, ainsi les mots en langue russe qui montent aux lèvres de Valérie Dréville, ou encore les bribes de chansons paillardes de Marlène Saldana.

Des visions prennent leurs contours dans un bol de cristal ou dans un miroir noir. Tel The Magic Mirror of John Dee, œuvre dans laquelle le plasticien Joachim Koester s’intéresse à des manières de regarder qui ne dépendent pas simplement des yeux. D’un même pas, Yves-Noël Genod entraîne ses spectateurs, tout comme ses comédiens, dans un état à mi-chemin entre l’éveil et le rêve. Des failles se creusent dans la perception et pourtant les sens sont exacerbés. Au plus profond de ce miroir noir qu’est devenue la salle basse de la Ménagerie de verre, nous entendons les talons aiguilles frapper la dalle de béton, les doigts frôler les murs blanchis. L’odeur des allumettes brûlées nous imprègne. Chic By Accident est une création qui se respire autant qu’elle se regarde. Les yeux sont excédés par la flamme incandescente d’un appareil de soudure et son crépitement agit comme un bruit visuel qui brûle et brouille le regard.

Si la douce obstination de la présence de Jeanne Balibar, tout près du public, vêtue, dans l’obscurité, de simples fleurs qui encerclent sa tête, s’apparente à la persistance rétinienne, l’intensité de son apparition munie d’une lance, petit gardien d’un espace secret, prend la texture hallucinée des visions hypnagogiques. Il faudrait faire référence à Jean-Paul Sartre et à son essai d’une phénoménologie de la grande fonction irréalisante de la conscience, L’imaginaire, 1940, où il décrit, parmi les modes d’apparition du phénomène d’être, l’image hypnagogique, sa netteté et sa vivacité, prodiguant un sentiment de réalité qui surpasse celui de la perception. Elle « ne se donne pas comme étant quelque part (…) une apparition isolée, « en l’air », pourrait-on dire ». C’est précisément cette qualité que travaille Yves-Noël Genod, ce mystérieux alliage entre la chair et sa déréalisation.

Le temps sort de ses gonds. Cela pourrait durer 2 heures comme la nuit entière. D’ailleurs, tel un écho lointain, puis de plus en plus intense, se font entendre des chants d’oiseaux à l’heure secrète où approche le lever du jour. Tout à coup, les acteurs, Messieurs et Mesdemoiselles (ainsi les nomme, avec un charme désuet, le metteur en scène), nous apparaissent tels des drôles d’oiseaux de nuit, à la croisée d’une ribambelle de rêves suspendus. Ils entreront une dernière fois sur le plateau pour cueillir les riens qui y sont éparpillés. L’espace deviendra bientôt neutre et impassible. Le battement blanc d’un comédien aux ailes trop lourdes, qui peine à prendre son envol, emportera les derniers lambeaux de cette création hallucinée.



* Joachim Koester, 2006, Photographie, tirage gélatino-argentique viré au sélénium Collection Metropolitan Museum of Art, New York
http://www.nicolaiwallner.com/exhibitions/sillyadults2007/magicmirror.html



Par Smaranda Olcese

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« Je suis ta maman, tu sais ? »


Photo Wagner Schwartz.

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… Il faudrait en dire plus, à l’instant, Robin Causse m’appelle parce qu’on retrouve des photos de lui en – comme disent les Américains – en full frontal nudity sur des sites pornographiques. C’est effectivement un problème, le même qui avait été soulevé par Philippe Tlokinski. On est dans une société qui bascule sauvagement du puritanisme à l’obsession sexuelle (ça va ensemble) et Robin, comme Philippe, débute une carrière très grand public (séries télévisées…) Visages d’enfants de cœur, on imagine les dégâts ! Voici, pour information, la dernière lettre envoyée à ce sujet. Je ne sais pas ce qu’il y a à faire. S’en foutre, mais c’est facile à dire. Changer son nom. Retirer les photos (mais qui sont déjà dispersées dans la nature).Terrifiante obsession sexuelle de la société actuelle. Presque aussi effrayante, pour moi, que la monté de l’extrême droite.



Cher Thibault,

Je ne veux pas être associé avec une quelconque idée de « la nudité masculine au théâtre » et, si tu insistes, je considérerai que non seulement tu ne comprends rien à ce que je fais, mais que tu es bête. Je croyais avoir réussi à me défiler en te proposant de me poser tes questions à poil, mais, comme ça n'a pas suffi, un ami me conseille avec pertinence de te dire : « D’accord, mais tu me permets de glisser un mot sur ma détestation des pédés – dans « Têtu », ça leur fera les pieds... »

Voilà où on en est.

Laisse tomber, ça vaudrait mieux !

YN

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