Sunday, October 23, 2011




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Nous étions partis en forêt avec l’enfant. L’enfant voulait un sac en plastique non biodégradable. Pour mettre son butin. L’enfant voulait trouver des fruits & s’en fichait des animaux. Il voulait trouver des fruits pour les hommes. Il voulait aussi trouver, à la rigueur, un animal mort pour le manger. Comme un loup (mort). Dans la liste des courses, il y avait aussi : « fleurs ». Tout le reste, glands, vilains champignons, mousses & autres verreries ne l’intéressaient nom de nom pas & pas. Ne me troublez pas, Yves-Noël, nous sommes là pour trouver du concret ! & n’essayez pas de me détourner de mon but en me disant que les animaux qui occupent la forêt tous les jours quand nous n’y allons qu’occasionnellement s’intéressent aussi aux fruits délicieux que nous recherchons ! Dressons-en encore la liste : noix, noisettes, fraises, mûres, pommes sauvages, châtaignes, fleurs, champignons bons, animaux morts, prunelles, framboises, prunes, poires, baies inconnues (et délicieuses), framboises, bananes… Ah, non, bananes, quand même pas ! ça ne peut pas pousser par ici. – Et, ça, est-ce que ça se mange ? Attention à la réponse, c’est vie ou mort, blanc ou noir. – C’est une faîne, le fruit du hêtre, euh... je ne sais pas si ça se mange… Pour les écureuils, certainement. Certainement…






Photos Anaé Genod.

C'est génial, non ? Je trouve ces photos incroyablement plus belles que les miennes... Elles sont de ma nièce, Anaé, sept ans le jour même... (23 octobre.)

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Le Mot frèrejumeau dans un angle de village




Il y a un pays de toujours moins d’angoisse qui n’est pas sans angoisse. Vivre, cela doit s’occuper, mais l’occupation, on le sent, n’est pas concrète. C’est dans ce jeu du concret & de l’inconcret que l’homme habite en poète. Ce jeu du manque & du désir s’appelle l’amour. La société est incroyablement tournée vers les enfants, mais que font-ils de leur vie adulte, ces petits monstres ? Ils apprennent tout très bien, grâce aux jeux. L’éveil, l’éveil, ils sont certes très éveillés. Un être humain, c’est dans la discrétion infinie qu’il se reconnaît, presque une absence. A lui-même, certainement, non à Dieu. Les forêts sont encore pleines. On (...) sent si peu sur la terre. Oui, la mort, c’est difficile d’y penser toujours & que ça ne soit pas une attente. &, la vie, c’est difficile, oui, de n’y penser jamais et que ce soit lavie. La vie si actuelle des arbres aussi avec nous et des vaches dont nous ne voulons plus le lait, plus le lait, gardez-le, c’est mauvais. C’est mauvais comme le ciel. (Que le lait soit mauvais, c’est aussi de la poésie, mais c’est une poésie dure : « lait noir ».) Toimoi, toi qui voulais être aimé, je me penche vers toi, toi qui tuerais père&mère, comme disait Lætitia Dosch, pour réussir, pour y arriver... « & n’omets pas de passer mon bonjour à Vanessa, petite peste. » On ne peut se satisfaire de rien, c’est peut-être la clé, mais c’est aussi un problème. Oui, chacun. « Bonjour, madame, vous avez 30 enfants ? – 29. – 29 ? – Nous, on a compté 29… » Il est tout sourire comme une brute adorable. Oui, ça m’ennuie, ça passe beaucoup par les yeux. Le coucher de soleil aussi passe par les yeux, mais, après tout, que savent les savants ? Cette planète… avec sa lumière… & l’homme aussi est sa lumière… Une lumière de luciole un petit peu solitaire quant à sa capacité à ne pas l’être... Solal hoquetait de rire à travers ses larmes. J’avais toute une histoire pour arriver à cette phrase. Soyons paresseux. Arrêtons l’histoire, allons à la phrase (si elle se présente). & le rapport à l’autre ? Préférez-vous ou ne préférez-vous pas ?... D’être gonflé par l’être, est-ce si régulier ? « A voile & à rame », avait écrit mon père sur le menu de leurs noces d’or. « Encore heureux qu’il n’ait pas écrit « A voile & à vapeur » », a dit son jeune frère surnommé John. C’était un Festen sans violence, cette réunion de famille, très doux même, très discret. Les gens vieillissent d’une voix si suave – dans cette famille – d’une voix si suave, si douce et si suave… Un peu de dureté chez celle qui n’était pas là, peut-être, Suzanne, qui va tous les jours au chevet de Marius atteint de maladiedeParkinson. Marius a dit : « Si je ne peux pas rester une après-midi seul, c’est que je suis déjà mort », mais elle n’est pas venue, dédiée infiniment, quotidiennement. On sent qu’il y a des parts de nous qui sombrent et qui se taisent... La poésie progresse en rien, c’est étrange, la vague au « sourire innombrable », non, ce que je lis aujourd’hui – de Stéphane Bouquet – n’a pas progressé par rapport à Eschyle, Prométhée enchaîné – toujours, toujours.

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& le constat de notre présence



















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Marseille, ville pauvre dont l’argent public a été volé




Je voulais dire une chose à tous ceux qui pleurent Martine Aubry puisque j’ai remarqué qu’il y en avait beaucoup parmi mes amis & je le comprends parce que, bien entendu que Martine Aubry est cultivée, bien entendu qu’elle lit des livres et qu’elle voit des spectacles, c’est même la tante de Julie Brochen, alors, & bien d’autres choses encore, sur l’habitat, par ex., elle est très bien. Mais enfin, Martine Aubry – & c’est certainement l’une des raisons de sa défaite –, c’est celle qui a couvert le système Guérini, à Marseille, qui est un système ressemblant au système Ben Ali : du vol à grande échelle. Marseille, ville pauvre dont l’argent public a été volé. Martine Aubry a couvert ça parce que Jean-Noël Guérini lui a fourni les voix pour passer devant Ségolène Royal au congrès de Reims (élection qu’elle a – puisque tout le monde l’admet – aussi volée à Ségolène Royal). A Marseille, les primaires ont desserré l’étau du PS guériniste. Les consignes du clan Guérini ont été de voter Martine Aubry, mais cela n’a pas été suivi : Arnaud Montebourg au premier tour & François Hollande au second, ce qui a mis une respiration.
Je retrouve deux citations écrites au crayon sur des post-its. Je les ai peut-être aussi déjà notées ici, mais quand ? où ? – ce blog est comme la mémoire : la mémoire de l’oubli. J’aimerais d’ailleurs beaucoup – j’en sens l’ambition – que ce blog se mette à tourner en rond, que ce blog se repasse et que je me mette à réécrire exactement ce que j’ai déjà écrit – dans l’infini, ce serait possible. Dans l’infini, une bande de singes tapant au hasard sur des machines à écrire finirait par réécrire les œuvres complètes de William Shakespeare. Et pourquoi pas ? Ces citations disent : « Ecrire, ce n’est pas se révéler, c’est projeter de soi-même l’image qu’on voudrait voir retenue par les autres, une image essentielle à découvrir pour chacun. » & : « Il n’y a pas d’âge pour réapprendre à vivre. On dirait même que l’on ne fait que ça toute sa vie ; repartir, recommencer, respirer : comme si l’on n’apprenait rien sur l’existence, sauf parfois une caractéristique inconnue de nous et de nos amis. » Bien entendu, je replace ces citations en situation (où je les ai trouvées), sur une table de chevet, comme tombées du lit-livre.
Au dos, il y a ceci : « Je n’ai rien perdu de grave (au contraire) ».

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C’est étrange comme, pour moi, le comble de la sensualité, c’est une petite fille accrochée à son père. C’est étrange. C’est l’amour fou. Incroyable. Je n’en vois pas d’autre, à ce point.

Oui, je lis bien chez moi car je lis comme si je ne comprenais pas les livres, comme quand je lisais – & lisais – & que – j’imagine – je le sens – que je ne comprenais pas les livres. Ce n’était pas la peine. Cela n’empêchait pas de lire. Au contraire.

L’adolescence. Elle est une éternité. C’est ce qui est proposé. 50 ans de mariage, une adolescence. C’est ainsi. Le récit. & je ne pense pas, non, que c’est parce qu’on retombe en enfance. Ou peut-être. Mon père & ma mère étaient contents. Du bilan. De Faire le bilan. &, en effet, c’était facile : on réunit ses frères & sœurs & puis, voilà, on dit : ça valait le coup. Vous y étiez, nous y étions, c’était facile. Oui, l’époque vit, tourne, on s’en fiche. La seule mesure est la vie d’homme & voilà, voyez, 50 ans après, on y arrive, comme hier, comme si c’était hier.

Je suis heureux de m’apercevoir que le livre est complexe. Il est complexe, c’est agréable, comme la musique, je n’y comprends rien et, pourtant, l’espèce humaine est une espèce musicale…

J’ai mis longtemps à m’occuper de compter les frères & sœurs dispersés autour de la table & dissimulés par la vieillesse. J’en comptais 7, j’en comptais 8, il me semblait qu’il y en avait 9. Je me souvenais d’un enfant mort-né, peut-être… Celui avant René, justement. Les prénoms s’effaçaient, se mélangeaient s’interchangeaient, quelle étrange quantité de choses, 9…

Mon père avait dit, lors d’un petit discours : « J’ai bien essayé de m’échapper… – Du piège ? – Du piège à 2, mais quand on épouse une Bretonne, vous pouvez toujours courir !… »

Dans les mots, il y avait eu aussi qqch, il y avait eu le mot « tremble ». C’était un arbre, un arbre au feuillage clair, qui tremblait dans le vent alors qu’aucun autre arbre ne bougeait parce que, du vent, il n’y en avait pas ou très peu. & mon père m’avait dit : « Eh, bien, justement, c’est un tremble, de la famille des peupliers, un arbre qui a la propriété de réagir au vent même quand il n’y en a pas. » Qu’il était beau, cet arbre, son miroitement irréel, infini, sa musique silencieuse, saviemultiple.

C’est difficile de lire exactement le sens des choses, de ne pas s’arrêter par les mots. Il y a plusieurs niveaux de lecture poss.

Je retire ce que j’ai dit : ton texte n’est pas trop « pédé ». Tes expériences sont tellement mystiques qu’il faut bien que ça passe par du concret &, le concret, pour toi, c’est les garçons. C’est à cause de la nécessité du concret que cela est. Ce concret est, en fait, aisément transposable comme n’importe quel concret pour n’importe quel lecteur. En tout cas, voici le compliment. L’expérience, elle, ne l’est pas, au fond, concrète.

« Il sent simplement que le monde déborde & lui coule dessus & le noie de présence : tout ce qui a lieu dans les moindres détails. Même un paysage presque complètement immobile... »

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Mathias Nouel
Je suis un lecteur du voyage à Bourg-en-Bresse. Ainsi, vous le savez.
(C'est très beau.)


Yves-Noël Genod
Enchanté, monsieur Nouel !

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