Thursday, December 19, 2024

R egardez cette couleur tellement de sable


Toujours aux environs de Noël, je me sens capable de plein de choses. Je regrette de partir, j’aime être seule à Paris à Noël, sentir la frénésie autour de moi, inventer de me trouver dans un autre milieu, inventer une autre famille ; ça m’est arrivé rarement, mais les deux ou trois fois dont je me souviens sont inoubliables. C’est comme le mois d’août à Paris (enfin, début août), c’est le rapport à la ville, aux autres qui est changé, qui s’ouvre. C’est comme jouer au jeu, mentir, se masquer. Des ruses, quoi ! Et puis Noël, la crèche ! Et puis ma sœur, une fois je l’ai rencontrée, je lui ai demandé si elle venait à Noël. Non. Et puis elle est morte en janvier. Ça étonnait beaucoup ma mère qu’on se rencontre par hasard à Paris, mais, nous, ça nous paraissait naturel. On se rencontrait souvent, ma sœur et moi, par hasard, dans Paris, on aimait bien. Mais la ville est fermée, partout fermée, sauf dans certaines brèches. La ville n’existe que de ces brèches, la joie à vivre. J’écris cela pour Pépita, je le lui ai promis tout à l’heure 


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On a le plein de la vie et on a le manque. Quelque chose manque. Quelqu’un. Et si l’on inversait, si l’on disait qu’on a tout, mais tout en trop ? Alors, ce qui manque c’est le désert, l’oubli (l'oubli surtout des bons souvenirs, pour ne pas souffrir à les revivre), la solitude, le vide — justement ce que mon grand âge, socialement, me propose… J’aurais vécu l’essentiel de ma vie, il n’y avait pas la guerre 

Il y avait des problèmes, mais il n’y avait pas la guerre


« — Alors, la vie est belle ? 

— Oh, elle pourrait l’être si vous me donniez un espoir »


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Je voudrais aimer le monde. Je suis dans une chambre étrange, dans un hôtel étrange (dont les normes sont un peu décalées) où il faut, pour accéder à la vaste salle de bain, passer par un couloir assez long au sol de carrelage. Et cette nuit, ou ce matin encore dans la nuit, j’ai longé ce couloir pour aller pisser sans allumer, je me suis retrouvée sur la cuvette des chiottes dans le noir total et ça m’a rappelé mes spectacles et que cette expérience du noir total était si rare dans la vie (il faut aller dans les grottes). Je me suis dit que, c’est un fait, on a détruit le monde, le monde des expériences, c’est un fait, mais que, quand même, pendant peut-être les années qu’il me reste à vivre, je voulais rejoindre l’expérience, le peu d’expérience qu’il serait encore possible d’attraper par-ci, par-là. Par exemple, je connaissais quelqu’un qui avait une maison dans un vaste bois, un ancien relai de chasse aux environs de Rennes et, une fois, j’avais dormi dans cette maison et je m’étais réveillée à l’aube au son de milliers d’oiseaux, voilà une expérience