Sunday, August 25, 2013

C ontinuidad de los parques



« Había empezado a leer la novela unos días antes. La abandonó por negocios urgentes, volvió a abrirla cuando regresaba en tren a la finca ; se dejaba interesar lentamente por la trama, por el dibujo de los personajes. Esa tarde, después de escribir una carta a su apoderado y discutir con el mayordomo una cuestión de aparcerías, volvió al libro en la tranquilidad del estudio que miraba hacia el parque de los robles. Arrellanado en su sillón favorito, de espaldas a la puerta que lo hubiera molestado como una irritante posibilidad de intrusiones, dejó que su mano izquierda acariciara una y otra vez el terciopelo verde y se puso a leer los últimos capítulos. Su memoria retenía sin esfuerzo los nombres y las imágenes de los protagonistas ; la ilusión novelesca lo ganó casi en seguida. Gozaba del placer casi perverso de irse desgajando línea a línea de lo que lo rodeaba, y sentir a la vez que su cabeza descansaba cómodamente en el terciopelo del alto respaldo, que los cigarrillos seguían al alcance de la mano, que más allá de los ventanales danzaba el aire del atardecer bajo los robles. Palabra a palabra, absorbido por la sórdida disyuntiva de los héroes, dejándose ir hacia las imágenes que se concertaban y adquirían color y movimiento, fue testigo del último encuentro en la cabaña del monte. Primero entraba la mujer, recelosa; ahora llegaba el amante, lastimada la cara por el chicotazo de una rama. Admirablemente restañaba ella la sangre con sus besos, pero él rechazaba las caricias, no había venido para repetir las ceremonias de una pasión secreta, protegida por un mundo de hojas secas y senderos furtivos. El puñal se entibiaba contra su pecho, y debajo latía la libertad agazapada. Un diálogo anhelante corría por las páginas como un arroyo de serpientes, y se sentía que todo estaba decidido desde siempre. Hasta esas caricias que enredaban el cuerpo del amante como queriendo retenerlo y disuadirlo, dibujaban abominablemente la figura de otro cuerpo que era necesario destruir. Nada había sido olvidado: coartadas, azares, posibles errores. A partir de esa hora cada instante tenía su empleo minuciosamente atribuido. El doble repaso despiadado se interrumpía apenas para que una mano acariciara una mejilla. Empezaba a anochecer.

 

Sin mirarse ya, atados rígidamente a la tarea que los esperaba, se separaron en la puerta de la cabaña. Ella debía seguir por la senda que iba al norte. Desde la senda opuesta él se volvió un instante para verla correr con el pelo suelto. Corrió a su vez, parapetándose en los árboles y los setos, hasta distinguir en la bruma malva del crepúsculo la alameda que llevaba a la casa. Los perros no debían ladrar, y no ladraron. El mayordomo no estaría a esa hora, y no estaba. Subió los tres peldaños del porche y entró. Desde la sangre galopando en sus oídos le llegaban las palabras de la mujer: primero una sala azul, después una galería, una escalera alfombrada. En lo alto, dos puertas. Nadie en la primera habitación, nadie en la segunda. La puerta del salón, y entonces el puñal en la mano, la luz de los ventanales, el alto respaldo de un sillón de terciopelo verde, la cabeza del hombre en el sillón leyendo una novela. »

Lecture.


« Il avait commencé à lire le roman quelques jours auparavant. Il l’abandonna à cause d’affaires urgentes et l’ouvrit de nouveau dans le train, en retournant à sa propriété. Il se laissait lentement intéresser par l’intrigue et le caractère des personnages. Ce soir-là, après avoir écrit une lettre à son fondé de pouvoir et discuté avec l’intendant une question de métayage, il reprit sa lecture dans la tranquillité du studio, d’où la vue s’étendait sur le parc planté de chênes. Installé dans son fauteuil favori, le dos à la porte pour ne pas être gêné par une irritante possibilité de dérangements divers, il laissait sa main gauche caresser de temps en temps le velours vert. Il se mit à lire les derniers chapitres. Sa mémoire retenait sans effort les noms et l’apparence des héros. L’illusion romanesque le prit presque aussitôt. Il jouissait du plaisir presque pervers de s’éloigner petit à petit, ligne après ligne, de ce qui l’entourait, tout en demeurant conscient que sa tête reposait commodément sur le velours du dossier élevé, que les cigarettes restaient à portée de sa main et qu’au -delà des grandes fenêtres le souffle du crépuscule semblait danser sous les chênes.

Phrase après phrase, absorbé par la sordide alternative où se débattaient les protagonistes, il se laissait prendre aux images qui s’organisaient et acquéraient progressivement couleur et vie. Il fut ainsi témoin de la dernière rencontre dans la cabane parmi la broussaille. La femme entra la première, méfiante. Puis vint l’homme le visage griffé par les épines d’une branche. Admirablement, elle étanchait de ses baisers le sang des égratignures. Lui, se dérobait aux caresses. Il n’était pas venu pour répéter le cérémonial d’une passion clandestine protégée par un monde de feuilles sèches et de sentiers furtifs. Le poignard devenait tiède au contact de sa poitrine. Dessous, au rythme du coeur, battait la liberté convoitée. Un dialogue haletant se déroulait au long des pages comme un fleuve de reptiles, et l’on sentait que tout était décidé depuis toujours. Jusqu’à ces caresses qui enveloppaient le corps de l’amant comme pour le retenir et le dissuader, dessinaient abominablement les contours de l’autre corps, qu’il était nécessaire d’abattre. Rien n’avait été oublié : alibis, hasards, erreurs possibles. À partir de cette heure, chaque instant avait son usage minutieusement calculé. La double et implacable répétition était à peine interrompue le temps qu’une main frôle une joue. Il commençait à faire nuit.

Sans se regarder, étroitement liés à la tâche qui les attendait, ils se séparèrent à la porte de la cabane. Elle devait suivre le sentier qui allait vers le nord. Sur le sentier opposé, il se retourna un instant pour la voir courir, les cheveux dénoués. À son tour, il se mit à courir, se courbant sous les arbres et les haies. À la fin, il distingua dans la brume mauve du crépuscule l’allée qui conduisait à la maison. Les chiens ne devaient pas aboyer et ils n’aboyèrent pas. À cette heure, l’intendant ne devait pas être là et il n’était pas là. Il monta les trois marches du perron et entra. À travers le sang qui bourdonnait dans ses oreilles, lui parvenaient encore les paroles de la femme. D’abord une salle bleue, puis un corridor, puis un escalier avec un tapis. En haut, deux portes. Personne dans la première pièce, personne dans la seconde. La porte du salon, et alors, le poignard en main, les lumières des grandes baies, le dossier élevé du fauteuil de velours vert et, dépassant le fauteuil, la tête de l’homme en train de lire un roman. »

Labels:

V olets clos et recluses





S avannakhet



Très bien, jeudi ! Donne-moi des horaires... (que je puisse caler d'autres rendez-vous.) Mercredi matin, si tu veux/peux, je peux venir tôt...
Tiens, ce soir, il passe la première version — radiophonique — de India Song, dont je t'ai parlé. C'est beau ! Duras raconte beaucoup, dans cette version, mais il y a des voix sublimes...

Mais je sors aussi de la « Trilogie Bill Douglas » dont j'ai vu les 2 premiers numéros : c'est sublime !
Bises, 

Yvno

(Je t'ai dit que c'était super avec Jeanne et Bertrand ? Ils sont vraiment très forts... Du coup, ça met la barre haut. Ils peuvent changer les textes des airs... Injecter du Nerval, peut-être... J'aurais besoin d'un dramaturge... Nerval, c'est la folie... « A mesure que s'opère la montée du bruit extérieur, le temps se couvre dans les allées du parc. » Ça, c'est d'India Song, cette phrase que j'entends à l'instant même, mais ça pourrait être de Nerval... Avant de se tuer, il a écrit une lettre à sa tante : « Ne m'attends pas ce soir, la nuit sera noire et blanche. » Tu vois pourquoi il faudra beaucoup d'enfants (même néerlandais) ? Parce que si on traite de thème comme ça, il faudra survivre...)

Labels:

I ndia Song


India Song. Première version radiophonique. (C'est sublime.)

C osmos / entropie



«  Il y a une phrase de Rilke que j’aime beaucoup : « Cela nous submerge, nous l’organisons. Cela tombe en morceaux, nous l’organisons de nouveau et tombons nous-mêmes en morceaux ». »

Labels:

A mour à mort



Le film de Guiraudie, en un sens, me démolit. J’avais raison — malgré tous les « Vas voir L’Inconnu du lac ! » — d’en retarder la vision. Mais, hier où j’étais parti pour la « trilogie Bill Douglas », au Mk2 Beaubourg, quelqu’un, dans la file, me proposait un billet qu’il avait en trop — et j’aime les changements de programme… hum… Je me suis retrouvé dans le club des homos, c’est-à-dire dans ma solitude.

Une lectrice m’envoie — après avoir lu L e Transformisme qu’elle nomme « torsion dissonante » (« Parfois il y a des torsions dissonantes, peu importe si la générosité est là. ») la phrase de Goethe : « Tout ce que vous êtes capables de faire ou d’imaginer, entreprenez-le. Il y a de la beauté, de la magie et de la puissance dans la témérité. » Mais, Goethe, le salopard, Musset en parlait à Avignon : Musset, c’est-à-dire moi ! Ce qui est bien, quand on s’occupe d’un texte, c’est qu’on finit par être d’accord. « Aimes-tu Napoléon ? — Pas spécialement. — Pourtant tu dis : « les 2 plus grands génies du siècle après Napoléon »... »

Le film de Guiraudie est incroyablement réussi — à part la fin, Godard a raison, qui est scénaristique. Mais, à part la fin, il n’abandonne jamais qqch qui est de l’ordre d’un mystère effrayant, l’érotisme au sens de Bataille, « approbation de la vie jusque dans la mort », c’est-à-dire ce que je fuis — et qui a de nouveau résonné, et qui résonne encore ce matin, depuis la vision de ce film qui m’a saisi. J’ai lu aussi un entretien qui confirme (s’il était besoin) que Guiraudie connaît très bien son sujet : le film est réussi parce qu’il connaît très bien son sujet. Il dit (de mémoire) que cette utopie qu’il désire, qu’il a filmé jusque là, de la « communauté humaine » (opposée à la « société »), qui est une utopie (« un lieu qui n’existe pas »), il l’a délaissé, là, pour se confronter au réel de l’amour-passion, de la jouissance. Oui, il trouve que c’est politique aussi parce qu’il y a maintenant une injonction (capitaliste) à la jouissance. « L’approbation de la vie jusque dans la mort… » 

Le film paraît du coup incroyablement bien joué, impossiblement bien joué (surtout Franck, l’amoureux qui m’a rappelé Pierre d’ailleurs (mais ça n’intéresse personne…)) Jeune & jolie, à côté, c’est rien. On ressort en ayant vu une belle fille (c’est déjà ça), mais rien n’est dit sur son sujet, absolument rien à côté de qui est dit dans L’Inconnu du lac. C’est fabuleux, la distance qu’il peut y avoir entre les 2 films...

Mais je fuis ce que dit L’Inconnu du lac, je ne veux pas m’y intéresser (à Bataille). « Moins de jouissance, plus de réjouissance », a été mon slogan (depuis tant…) Aussi avec : « Il est interdit de souffrir ». C’est pour ça que nous ne nous comprenons pas avec les homos, nous sommes de chaque côté du bord. Mais, du bord, qui y tombe ? Qui s’en sort et comment ? Georges Bataille est évoqué tout le long du livre de Thadée Klossovski de Rola (j’adore écrire ce nom, il devrait être plus long encore…), mais tenu à distance. Il (Thadée…) s’occupe de l’édition des œuvres complète de Georges Bataille, mais, lui, sa vie, sa « vie rêvée » — et réussi — est de l’ordre du plaisir, pas de la jouissance sous-jacente dont il cherche à se débarrasser (drogue, insatisfaction, sentiment d’inutilité...) et, comme il dit (en quatrième de couverture) : « ça finit bien ».

« Après la libération sexuelle des années 1970, on se sent aujourd’hui dans une perpétuelle assignation à baiser, dans une obligation à jouir. »

« Cette assignation à jouir va avec la société de consommation, qui inclut une consommation du sexe. »

« Si la libération sexuelle débouche sur une obligation de jouissance, elle peut vite se transformer en aliénation. Je me demande où nous conduit cette recherche du seul plaisir.  J’ai construit le personnage de Michel en pensant à ces drôles d’évolutions. Michel est un jouisseur, consommateur de sexe aux allures de surfer californien. Il est puissant, sûr de lui, sentimentalement froid, et quand il a joui de l’autre, il s’en débarrasse. »

« Franck se situe dans cette tradition « romantique », il va jusqu’au bout de l’expérience. Il vit son envie sur le moment, sans penser à rien d’autre qu’à prendre son pied avec l’autre. Peu importe où ça le mène. S’il prend le temps d’y réfléchir, ce n’est certainement pas dans les moments forts de sexe. »

« J’avais pour l’instant beaucoup fait l’amour camarade, l’amour joyeux, l’amour joueur. Et, là, j’avais vraiment envie de me coltiner : qu’est-ce que c’est que d’avoir qq’un dans la peau, quoi, et d’avoir qq’un dans la peau jusqu'au bout. »

Mais Guiraudie caresse l’eau, le ciel, les arbres. Ça m’avait frappé quand j’allais, moi aussi, dans ces lieux de drague, de la beauté du cosmos, qui étaient, la nuit, au crépuscule, les + beaux du monde. Et qui d’ailleurs, dit-il (il y a longtemps que je n’y vais plus et où je vois cette beauté partout), n’existe plus, tendent à ne plus exister, ces lieux pasoliniens de bord de plage, etc. (Je me souviens de la Côte Sauvage, au-dessus de Royan, d’un parc de ville sublime à La Rochelle, aussi en bord de mer, de Montpellier, des Tuileries la nuit, des canaux, etc.) (Les immenses baraquements en construction pour la fête de la bière, à Munich, où tous les homos de la ville, à cette période, se rassemblaient et qui évoquaient plus, alors, un univers à la Fellini (Cinecittà ).) 

« une envie (…) de fondre un peu les personnages, comme ça, de les faire évoluer dans le vent (…) — c’est des terriens —, sur de la terre, dans la flotte, quoi… »

J’écrivais (car je travaille toujours le même sujet) : « Cette liberté de ne pas consommer… mais d’étudier, de travailler… d’aimer (d’amitié) »



« Pourquoi te déguises-tu 
En vent, en pierre, en oiseau ? 
Pourquoi me souris-tu du ciel 
Comme un éclair inattendu ? 

Cesse de me tourmenter ! Ne me touche pas ! 

Laisse-moi à la gravité de mes soucis... 
Un feu ivre passe en vacillant 
Sur les marais gris desséchés 

La Muse dans sa robe trouée 

Chante d'une voix traînante, monotone. 
Sa force miraculeuse 
Est dans son angoisse cruelle et jeune. »

Labels:


« l'aria, e l'acqua, e la terra è d'amor piena ;
ogni animal d'amar si riconsiglia. »

Labels:

N erval,1808, de la génération Musset (1810)



« La Tête armée



Napoléon mourant vit une Tête armée...
Il pensait à son fils déjà faible et souffrant :
La Tête, c'était donc sa France bien-aimée,
Décapitée aux pieds du César expirant.

Dieu, qui jugeait cet homme et cette renommée,
Appela Jésus-Christ ; mais l'abîme s'ouvrant,
Ne rendit qu'un vain souffle, un spectre de fumée :
Le Demi-Dieu, vaincu, se releva plus grand.

Alors on vit sortir du fond du purgatoire
Un jeune homme inondé des pleurs de la Victoire,
Qui tendit sa main pure au monarque des cieux ;

Frappés au flanc tous deux par un double mystère,
L'un répandait son sang pour féconder la Terre,
L'autre versait au ciel la semence des dieux ! »

Labels:

S educi i tarvestiti svizzeri



— Torino

— Ah, ah, tu te rapproches... (Pas trop vite : ici, il pleut...)

— Mercoledì... Capri sera fini

— Merde !

— Je suis un peu angoissé à l'idée du retour. Paris mi va stretta

— Profite de l'instant, n'y pense pas

— Tu ? che fai ?

— Rien

— Tu écris ? tu dors ? tu fais des photos aux incendies ? Seduci i tarvestiti svizzeri ?

Labels:

L ’Intérieur



« L’univers n’est pas un objet physique dans la mesure où on ne peut pas le décrire sur le modèle de la chose puisque nous sommes à l’intérieur, cette chose serait autoréférentielle. (…) l’univers donc n’est pas une chose, c’est un ordre à retrouver et cet ordre est temporel. Il y a plus dans l’univers qu’une cosmographie, il y a une histoire. Et donc nous avons daté l’univers. (…) »

Labels:

V ick and Vicktoria




— Tu savais que Thomas avait fait du porno ? 

— Ohohoh ! ça lui va tellement bien... le coquin ! 

— C'est dingue, cette manière à la marseillaise... même en baisant ! Je suis (toujours) fasciné, je dois dire... 

— Hahahaha ! 

— Il a peut-être un peu vieilli... c'était y a longtemps, visiblement. La fille est rigolote aussi, mais je vois pas qui c'est... J'aime beaucoup le porno, je trouve qu'il y a de telles réussites ! J'en ai fait un peu. J'aimerais en faire plus... (filmer, tu m'as compris) 

— Oui, oui, je comprends ta nouvelle passion. As-tu vu le film de HPG ? Il n'y a pas de rapport sexuel 

— Oui ! parfait ! (et rigolo : on dirait parfois les Chiens de Navarre, la scène où il leur explique l'intrigue, visiblement sous drogues...)

Labels:

L e feu (2)








U n obstacle à l’amour



« La nuit qqfois, ou dans la somnolence des matins, je songeais au livre improbable — mais je n’écrivais rien, je pensais seulement, par ex, que le sentiment de n’être pas assez riche (d’être pauvre) est très classiquement un obstacle à l’amour. »

Labels:

T he vital part of the show



« This is as the father of modern science pictured space : as an empty stage. »

Labels:


Ma merde d’une belle couleur verte (me suis remis aux légumes…)

Labels: