Thursday, March 01, 2012

Dostoïevski




Romain Brosseau
Yves-Noël, je pensais à toi il y a quelque temps. J'ai rencontré Mohand, nous avons parlé de nos rencontres avec toi. Puis les autres sont à Berlin, alors je me rappelle ce si beau voyage. Puis je suis à La Fonderie, tu y es donc un peu aussi. Je te laisse, François nous a assommé avec Dostoïevski à 00h30. Bye

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« But what you make looks so easy, so effortless.
– Yes, but it’s very hard to do that. »

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Yves-Noël Genod
Hello ! Je t'ai envoyé un mail (au cas où tu ne l'aies pas) :

Hello, Jean Biche, mon chéri, tu penses pas que tu pourrais venir un jour ou deux à Paris la semaine prochaine pour regarder les répètes et améliorer un peu les choses au niveau de l'art, je veux dire, maquillages, costumes, postiches, couleurs, etc. ? C'est pas mal, pour le moment, mais ça pourrait être infiniment plus luxueux si c'était plus précis (haute couture). Peut-être que si tu pouvais agir dessus ne serait-ce qu'un jour ou deux... Je pourrais bien sûr te payer le billet, accessoires et matière achetés et dégager 100 euros pour toi.

Dis-moi

YN

Ci-joint la captation de l'avant-première d'il y a un mois, si tu veux te faire une idée...






Jean Biche
Hello, chou !

Oui j'ai bien reçu le mail, bon alors :

J'ai vu la captation qui est très belle. C'est déjà très chic, je trouve. Mais on peut en effet trouver des petits + pour enrichir l'esthétique.

Je peux prendre le temps de te l'expliquer, de bien l'écrire ou le dessiner pour vous aider, malheureusement je n'aurai pas le temps de venir à Paris ce mois-ci : nous avons eu un problème à la boutique et je dois faire beaucoup de jours supplémentaires. (Et je pars pour le week-end du 9 mars à Toulouse me faire tatouer, je t'enverrai des images aussi, tiens, ce sera sublime.)

J'ai Bas Nylon demain donc c'est encore un peu la course pour moi jusqu'à ce week-end. Je reprendrai le temps de bien regarder la captation et t'envoyer un brief sur les idées et autres. Je suis sur qu'on y arrivera aussi !

Je t'embrasse fort ! xxx Bichette

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Tongue




Puis je rencontre « un ami » à la hauteur de l'hôtel du Nord... Il me hèle... Ça me fait penser à Rauque la ville, le roman indépassable de Jean Pierre Ceton. Il veut bien que je mette la photo sur mon blog, mais il ne veut pas que je mette des conneries. « Je te jure que non. » Finalement, il veut bien que je mette son nom. Mohamed Toukabri. « Comme quoi ? – Non, mais je ne veux pas que tu mettes des conneries... Des photos avec la langue, moi, j'en fais tout le temps... »

Finalement, ce mercredi 7 novembre 2018, saut dans le temps, Mohamed m'envoie des sms : il veut que j'enlève sa photo et son nom, je ne sais ni qui il est ni de quoi il parle, je suis en workshop dans l'amphithéâtre de l'école des Beaux-Arts à Grenoble, mais, cette nuit, j'arrive à retrouver, à décadrer la photo et à changer son nom... Je ne me souviens plus de lui ni des circonstances, des fleuves ont passés et, partout dans le monde, l'extrême-droite gagne le pouvoir, ça ne rigole plus... « Survivre », est le mot qui résume tout.

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La Serveuse




Elle vient vers moi, elle m’apporte mon plat, elle se penche et elle dit : « Je voudrais vous dire bravo. – Bravo pour quoi ? – Pour tout. Pour le TCI… » Je suis à L’Industrie, je suis venu pour prendre un plat. Je ne sais pas pourquoi je suis venu ici au lieu de rentrer chez moi, après le cours de danse. Je cherche qq que je ne trouve pas. J’ai mis une annonce : « Cherche une femme sublime… » Je ne sais pas pourquoi je suis ici, spécialement ici. Je suis à L’Industrie, c’est bruyant, les gens sont beaux, je n’ai pas de livre à lire, je suis heureux. Les gens sont beaux. Curieusement, je suis heureux. Elle vient vers moi, elle est belle, elle est belle comme toutes les serveuses ici, elle vient vers moi et elle se penche et elle me dit : « Je voudrais vous dire bravo. Je sais ça ne se fait pas (comme ça), mais je voulais vous le dire. – Vous êtes comédienne ? – Oui. – Alors, venez demain : je fais passer des auditions, venez demain à 9h30, à la Ménagerie. Vous voyez où c’est ? Est-ce que vous pourriez ? Mais vous êtes prise tous les soirs, ça n’ira pas… » Elle fait un geste de la main pour dire que ce n’est pas si strict. Ce soir, je la crois. Elle est très belle. Métisse. Sa beauté m'éblouit, bouleversante. « Apportez quelques vêtements, des belles choses, du blanc... Oh, en même temps, venez comme vous êtes, c’est parfait ! » Elle sait que c’est déshabillé. Elle le fait remarquer, puis très vite : qu'elle s’en fiche. Je lui dis que je crois aux signes, que je ne savais pas pourquoi j’étais entré à L’Industrie, spécialement ce soir, et que c’était parce que je cherchais qq et qu’en fait, je la cherchais, elle. (Et maintenant, en écrivant, j’ai l’impression de faire du Duras, vous ne trouvez pas ?) Elle m’apporte mon plat. Je vois les gens beaux vivant dans cette société de merde. Je pense à ce que m’a dit mon psy, que c’était impossible, à notre époque, ce que je voulais faire, qu’il faudrait très longtemps, une formation, pour que des gens travaillent ensemble, que l’isolement était au maximum, que 68 était bien loin, etc. Je mange du lapin chasseur. Il est bon. Bien servi. Et je l’imagine peut-être dire au cuistot : « Alors, lui, tu le soignes, hein ? Je l’aime. »

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Borderline




Comment faire avec les acteurs ? Je me demande si je n’ai pas tout faux. Peut-être je n’arriverai jamais à rien… me dis-je à mesure que je découvre les méthodes des « grands », Castorf, Vassiliev… En fait, ce sont des gens qui mettent les acteurs – les plus grands – dans une situation de dépendance. Valérie me dit que Vassiliev la considère comme toute prête à partir du jour au lendemain au fin fond de la Pologne pour ne pas gagner sa vie pendant des mois et – me dit-elle – en un sens, il a raison, parce que c’est vrai… L’inconscient des acteurs est leur vrai ennemi, peut-être sont-ils tout heureux de trouver plus fort qu’eux, maîtres sadiques qui les manipulent pour que l’inconscient accepte, dressé comme un cheval violent, d’aller dans un sens et unique sens, celui du maître… Je renvoie Thomas Gonzalez parce qu’il est capable de s’inverser, de fabuleux devenir débris. Il me dit aussi que ce sombre dimanche à la Bastille, cette représentation ratée, il ne me « sentait » pas. Mais j’étais là, pourtant, suspendu à ses lèvres, à sa respiration, essayant de comprendre ce qu’il cherchait, quel passage aride, dans la confiance du désespoir, me disant, chaque seconde, ce n’est pas ça, il va peut-être trouver, il cherche, c’est qu’il va trouver, sans comprendre jamais et sous les huées du public ce qu’il cherchait. Mais, l’inconscient, quel est son travail ? (En cours...)