Wednesday, March 07, 2018


Hello Yves-Noël,
Bravo encore pour hier ! J'étais content de pouvoir profiter de ton univers dans un cadre intimiste et privilégié. Et surtout, j'étais de nouveau époustouflé par Aidan Amore que j'avais déjà vu dans La Beauté contemporaine et qui m'avait déjà impressionné. 
Je n'ai pas pu rester longtemps après car j'avais une répétition à l'autre bout de Paris. En tout cas, j'étais content de me préserver cet après midi dans une semaine chargée pour découvrir ce spectacle qui parle beaucoup de toi me semble-t-il.
A bientôt
Bises
F

Oui, curieusement, il parle aussi de moi

F anny et Grégoire


Yves-Noël,
Je t'envoie ce petit mot parce que je n'ai pas eu l'occasion de te remercier grandement de ton accueil hier
(Fanny d C m'a glissé ton numéro afin que je puisse aller jusqu'à toi. Le mot en question était une réponse à sa question : Alors YNG ?)

Après deux heures et demie — qui devaient être — parce qu’annoncées comme tel  quatre presque cinq heures ou six et tant et plus  il n’y a eu en fait que deux heures et demie vraiment d’une durée de deux heures et demie  deux heures et demie autour d’un presque carré de tables  pour jouer autour et dessus et un peu en dessous  presque carré parce que pas fermé  un carré pas fini  pas loin d’être infini donc  deux heures et demie pas loin d’un carré pas loin d’être infini en forme finalement de fosse finalement  parce que recouvert de noir finalement  le carré infini couvert de tissus noirs  donnant soudain la sensation de fosse  fosse absente avant  pas d’idée de fosse avant ça  avant les tissus noirs 
Tout se joue en deux heures et demie dans autour et sur ce qui sera une fosse  immanquablement  tout se joue à l’orée du gouffre donc 
Celui qui joue est seul 
Un seul pour tous les autres  un pour tous un point c’est tout  un seul point pour tous les points  un seul dans deux langues  voilà la musique  voilà l’ordre du sonore  deux langues  et  le visible  un seul point pour le visible  tout le reste invisible  un seul contre tout le reste  même celui qu’on voit marcher en travers est invisible et de fait c’est un fantôme – un fantôme donc un invisible bien vu 
Deux autres  presque invisibles  des acrobates presque invisibles  leurs mouvements  les mouvements  le mouvement est ce qui reste d’eux 
Un reste d’invisible donc 
Le point seul saoulé de solitude parle  dit tout une grande partie de l’histoire écrite de lui 
depuis lui  par un autre  l’autre  auteur célèbre célébré  présent par lui seul  le point le suit l’oublie le singe  traduit trahi récupère distribue  s’approche et s’enfui 
Tout est là las  sans y être 
On est en territoire las là  dans la presque fumée  presque parce que pas fumante  une fumée posée plutôt  fumée faiblement  presque filtrée par l’air qui manque et domine 
Après deux heures et demie  ce qui apparaît  sous la forme d’une idée  qui ne nomme pas ce que le sensible est déterminé à ne pas livrer dans sa forme langage  ce qui apparaît est ce qui est délivré 
Il y a un théâtre qui donne 
Il y a un théâtre qui prend –
Ici on prend 
Ici on est pris 
On nous prend 
Comment qui quoi savoir partager ce qu’on a pris 
C’est l’idée 
L’idée dure 
C’est maintenant le temps qui dure  le temps plus long que lui-même  le temps sorti du temps 
Ce maintenant 
C’est maintenant  depuis alors

Grégoire

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L es Livres

« BORGES : Eh bien, je pense à la Bible, cette très étrange idée, attribuer la beauté, le livre pluriel par excellence, à un esprit unique... 
BANKS : Des voix multiples. 
BORGES : Très étrange, les Hébreux ont fait ça, hein ? C’est comme si Le Voyage du pèlerin, Huckleberry Finn et La Tragédie de Hamlet, prince de Danemark avaient tous été écrits par la même personne — très étrange idée. Ça fait penser que tous ces livres ont été écrits par l’Esprit-Saint, qui est unique, dictés à différentes périodes à des hommes différents dans des pays différents — très étrange idée. 
[...] 
CORTÍNEZ : Je crois que vous partagez une affinité pour la Bible, n’est-ce pas ? 
BORGES : Ah ! certainement. Eh bien, c’est parce que la Bible, je ne sais pas si on peut en parler, est en réalité une bibliothèque, parce que son nom est pluriel, n’est-ce pas ? Quelle idée unique — l’idée de réunir des textes de différents auteurs, de différentes époques, et de les attribuer à un seul auteur, l’Esprit ! C’est merveilleux, non ? C’est-à-dire des œuvres aussi disparates que le Livre de Job, le Cantique des Cantiques, l’Ecclésiaste, le Livre des Rois, la Genèse, les Evangiles aussi. Attribuer tout cela à un auteur invisible. Les Juifs ont eu cette idée unique. C’est comme si l’on décidait de regrouper en un seul tome, et de signer du nom d’un seul auteur, l’œuvre d’Emerson, l’œuvre de Carlyle, l’œuvre de Melville, l’œuvre de Henry James, l’œuvre de Chaucer, l’œuvre de Shakespeare, et que l’on prétende que tout cela est d’un seul auteur. Les Juifs ont eu une idée splendide... réduire leurs livres, leur bibliothèque tout entière, à ce livre qui s’intitule « Les Livres » — la Bible. C’est vraiment une très curieuse idée ; si seulement on pouvait refaire la même chose ! Il y a trop de livres ; et ce serait mieux de les avoir tous réunis. C’est une chose que chaque pays pourrait faire... rassembler ses plus grands livres et les attribuer à un seul auteur anonyme — l’Esprit. » 

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« Pourquoi sommes-nous inquiets que la carte soit incluse dans la carte et les milles et une nuits dans le livre des Mille et une Nuits ? Que Don Quichotte soit lecteur du Quichotte et Hamlet spectateur de Hamlet ? Je crois en avoir trouvé la cause : de telles inversions suggèrent que si les personnages d'une fiction peuvent être lecteurs ou spectateurs, nous, leurs lecteurs ou leurs spectateurs, pouvons être des personnages fictifs. » 

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