Sunday, October 03, 2010

Belle du cœur de la nuit

« En fin d’après-midi ce jour-là
Quand j’allais te dire mon habituel au revoir,
Ce fut une vague angoisse de te quitter
Qui me fit savoir que je t’aimais. »

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Kairos, suite et fin

Carnet d'Alice



« Il y a une époque où je cherchais à tout dire sur ce blog, sous l’influence de Christine Angot heureusement disparue de la circulation (je l’ai croisée l’autre jour à une première d’une pièce idiote)... Or, maintenant, je ne cherche plus à dire que ce qui est de l’ordre du dire. Je veux dire que je ne peux dire qu’une chose : ce qui a déjà été dit. (Il n’y aura pas de découvertes.) Et ça suffit. On ne peut dire que ce qui appartient au dire. Les clichés. »

Puis, après cette grande et belle déclaration, une jolie expression que j’ai notée : « les chimistes de l’univers. » Et : « Manger, c’est manger l’univers. » On parlait certainement de Michel Bras qui a son restaurant à Laguiole et dont la devise est : « Améliorer la qualité de vie au quotidien ». (Je feuilletais son livre de recettes.) Après avoir fini le disque de Philippe Katerine, celui où il y a mon nom dedans au côté de ceux de Pablo Picasso, La Callas..., on a écouté Jeanne Balibar. Et Jean-Marc riait, riait, riait. Alice expliquait qu’il la réveillait la nuit tellement il rigolait, parfois, comme quand il revient de chez Stéphane à quatre heures du matin. « Il ne comprend pas que je sois de mauvaise humeur. » L’histoire des hommes heureux est infinie et irracontable. Puis, toujours sur Jeanne Balibar (voix très masterisée), une poire fermentée magnifique. Mais tellement doux… un sorbet… « Très minéral. Très, très vieux poiriers. Un Saint-Nectaire là-dessus… tu pleures ! » Mais on avait passé le fromage. « C’est vraiment le contraire du vin de dessert, disait Stéphane, que la fraîcheur… » « L’image de la chair, disait Jean-Marc. Vous trouvez pas qu’on est dans l’extrait ? » « C’est une compote de poires, absolument. » Et Jean-Marc lisait dans la liste des poires sur l’étiquette : la Belle Verge et la Connerie. Puis on a parlé de Georges Charpak, le prix Nobel de physique qui venait de mourir (et qu’on allait brûler lundi) parce que c’était un ami d’Alice et Jean-Marc, une figure de Cargese. Il avait signé, cet été, un article avec Etienne Balibar contre l’expulsion des Roms.

Ici, s’arrête mes notes concernant la soirée du 2 octobre. Je n’ai pas dit une chose que je veux rajouter. Pendant que P. était à Aïda au Stade de France (j’avais décliné l’invitation), il s’est produit en bas de la rue Mouffetard, devant l’église Saint-Médard et sous le balcon d’Alice et Jean-Marc, un concert merveilleux. Des chanteurs encore jeunes (ils avaient commencé, il y a neuf ans, quand ils étaient étudiants) ouvraient leurs fenêtres une ou deux fois l'an et se mettaient à chanter, comme ça, tandis que la foule s’amassait. Rien de plus beau ! On se serait cru en Italie. Alice et moi sommes descendus pour nous approcher. J’étais si heureux de voir que le manque d’argent n’allait pas anémier les possibilités spectaculaires, mais, au contraire, les exalter. Je pensais aussi à mon spectacle de vendredi, à Marseille, avec Thomas Gonzalez.

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Etlrst

On écoutait sur Deezer, en dînant chez moi et sans parler, le String Quartet (n° 15) de Franz Schubert. Puis P. m’avait parlé des Nuits de Paris, de Nicolas Restif de la Bretonne et, moi, je lui avais parlé de tout ce qui me passait par la tête. Avant cela, dans l’après-midi, nous avions vu une excellente mise en scène de Marivaux, Les Acteurs de bonne foi (par Jean-Pierre Vincent). Nous l'avions eue « sous les yeux ». La pièce, la dernière de Marivaux, virtuose, si profonde que j’en pleurais. Pauline Mereuze y était excellente, rayonnante absolument et tous les acteurs jouaient ensemble, formidables, il n’y a pas d’autre mot. On y avait croisé Valérie Crunchant et Laurence Mayor avec sa fille Sarah (au cours Florent). Laurence était très belle et en pleine forme parce qu’elle ne mangeait plus que du raisin depuis un moment. On avait aussi croisé Christophe Pellet à qui j’avais été heureux de pouvoir dire quelque chose de positif (il est si effrayé…) : j’avais dîné à Marseille avec un acteur qui allait jouer sa pièce Erich Von Stroheim et qui m’avait posé des questions sur le sens de quelques détails (que je n’avais pas su lui donner évidemment, je lui avais dit de s’adresser directement à Christophe). Le matin, on s’était couché vers sept heures, je crois. On avait fini la Nuit Blanche à La Java pour la soirée mensuelle Flash Cocotte conseillée par Olivier Casamayou. Plein de jeunes gens merveilleux et très saouls, comme il se doit quand on a vingt ans, heureux comme des enfants. Robin Causse était là, etlrst, comme dit Restif de la Bretonne à la place de « etc. » (« et tout le reste »). J'avais loupé Jessica Battut de peu, etlrst. Avant cela, il y avait eu, pour moi, la soirée chez Alice et Jean-Marc avec Stéphane et Sylvie dont je reprends les notes, celles du « Carnet d’Alice » :

« Il y a une époque où je cherchais à tout dire sur ce blog... »

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Kairos, suite

Les Soirées riches



Ce qui fait sans doute que Jean-Marc a rebondi sur « Il travaille quand son corps est d’accord » (ça se suit dans mes notes) et que Sylvie a parlé de l’annonce chez Marie-Jo à La Petite Brocante à Cargese : « Horaires variables » et que j’ai dû dire (en tout cas, je l’ai écrit dans mes notes) que ça ferait un excellent titre de spectacle, ça : Horaires variables.

Ensuite, les vins : Charmes-Chambertin, Cos d’Estournel. Et Stéphane a dit une chose comme il en dit souvent sans qu’on le remarque (lui et Jean-Marc vont très vite) : « La bouteille de Bordeaux ressemble aux Bordelais, elle s’monte du col. » On écoutait, à ce moment-là (ou un peu plus tard), Alfred Deller dans Henry Purcell, on comparait comme pour les vins deux enregistrements d’un même morceau, quand il avait une vingtaine d’années et quelques mois avant sa mort (vers soixante-dix ans). On buvait ensuite du Chablis. Jean-Marc disait : « En Chablis, il y a deux stars, l’une des deux, c’est Vincent Dauvissat » et continuait de faire des rapprochements : « C’est comme la mise en scène : précis ou non. »

« Chez Alice et Jean-Marc, c’était des repas, des soirées si riches que je ne peux pas les décrire car, lorsque je les vis, elles sont comme voilées. » Voilà ce que j’écrivais sur mon bout de papier. Le morceau de Purcell, c’était : Music for a while. Puis on écoutait Bach, l’Agnus Dei de la Messe en Si. « Il aurait fallu que je ne sois pas de cette soirée et que je l’écrive (comme un scribe engagé), mais je ne pouvais pas me dégager de la soirée parce que la soirée était vivante. C’est comme ça, la vie, c’est une prison et on ne pourrait normalement rien en écrire (demandez à Emily Dickinson). Et quant au vin… Le vin ne facilite pas l’extraction de la vie, oh, ça non… Et la culture, est-ce s’extraire de la vie ? Oui, la culture, c’est s’extraire de la vie, mais c’est être emporté aussi. Et c’est trop tard, la vie emporte par la culture. » Quelqu’un dit (Sylvie) : « Qu’est-ce que t’écris ? » et quelqu’un d’autre (Jean-Marc) : « Tu vois nager des méduses, des raies… » Mais je m’écriais (ou plus tard) : « De toute façon, vous pouvez parler ! Moi, maintenant que je suis une star au même titre que Pablo Picasso et La Callas… »

C’était comme un 31 décembre, une nuit de Noël. Il faisait incroyablement doux. Le T-shirt Balenciaga plaisait, Sylvie était en Margiela, Stéphane en Comme des garçons...

La Messe en Si se déployait en pleine puissance. L’Agnus Dei juste avant le Finale. Vincent Dauvissat, le vin blanc avec le fromage à l’infini.

Lou fait du violoncelle. Jean-Marc proposait de la réveiller pour qu’elle nous en joue (comme le père de Beethoven). J’avais fini d’écrire ma feuille A4 pliée trois fois et Alice apportait un petit carnet marqué « Carnet d’Alice ».

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Une chanson n'est qu'une photographie, une petite mort, un instant précis


Photo Caroline Gillet.

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« Kairos », définition

« Kairos est le dieu de l'occasion opportune, du right time, par opposition à Chronos qui est le dieu du time. Il est souvent représenté comme un jeune homme ayant une épaisse touffe de cheveux à l'avant d'une tête chauve à l'arrière ; il s'agissait de « saisir par les cheveux » lorsqu'il passait...toujours vite. Le Larousse encyclopédique le définit « comme une allégorie de l'occasion favorable souvent représenté sous forme d'un éphèbe aux talons et aux épaules ailés. » Plusieurs auteurs utilisent le mot kairos comme substantif pour désigner l'aptitude à saisir l'occasion opportune. Ce terme est utilisé en philosophie, en théologie, en psychologie et en pédagogie. On l'emploie aussi dans les sciences de l'administration. »



Ça, c’est très important. Je parle de mon prochain spectacle à Marseille (le 8 octobre), de comment il s’est construit encore une fois – et c’est ce qui m’émerveille – par le hasard et les circonstances favorables (uniquement, ai-je l’impression). Et de cette idée du lieu, du contenant, juste un lieu et on y met ce qui vient, et Stéphane Wargnier qui a écrit l’article dans « Mouvement » au mois de juin et qui s’occupait pendant longtemps de la communication chez Hermès du temps où l’entreprise était dirigée par Jean-Louis Dumas me parle de quelque chose qu’ils évoquaient souvent ensemble, il en parle en hésitant sur le nom (qui est juste) et sur le sexe (il voit Kairos comme une déesse). Il dit : « La déesse du bon geste au bon endroit au bon moment, la déesse grecque. » Jean-Louis Dumas et Stéphane quand ils voulaient créer ensemble un événement se disaient toujours : « On va voir l’endroit, on réfléchit au moment et, après, on trouvera le truc. » Je suis toujours ému quand la mode (ou le luxe) corrobore des façons que j’ai pour moi-même découvertes. Comme quand j’ai lu que Coco Chanel, quand elle avait recommencé la mode après-guerre (après une interruption de douze ans, je crois), avait dit aux journalistes qui venaient, au printemps, lui demander comment serait sa collection annoncée pour l’automne : « Comment voulez-vous que je le sache ? Je fais mes robes sur les mannequins… » (car, moi aussi je fais mes spectacles sur les comédiens et je dis toujours (maintenant on me croit) : comment voulez-vous que je le sache...)

Comme des coings




Photos Alice Bourelle.

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Sous la couette des nuages

Disparaître est un métier.
Pour vivre caché, vivons heureux.
Et si tout ceci n’était que de la fuite du temps ?
Balcon des apparences.

Quelqu’un dort, quelqu’un s’allonge… Il fait chaud, il fait doux.
Fenêtre ouverte. Fenêtre ouverte…



Mon pays : balcon des apparences

Et puis P. me lit (de Nicolas Restif de la Bretonne) :

L’Homme qui ne dépensait rien

Avec cette phrase (par exemple) : « Tout lui profite parce qu’il n’a de dégoût pour rien. »

Très Dickens, faudrait que je m’y remette (le livre proposé par Jeanne Balibar).

« Avant d’aller chez la Marquise, je faisais toujours quelqu’excursion, afin de maintenir dans l’abondance mon magasin d’anecdotes. »

Il était 23h12, P. avait dormi deux ou trois heures donc nous étions décalés (de nouveau). P. citait

Sur les corps morts, il emploie cette expression « la dissolution végétale » qui fait penser à Michel Houellebecq (et dont nous avions parlé la veille chez Jean-Marc).

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