L ’Ecrit contre l’écran
Pour qu’il y ait théâtre, on n’a besoin que d’une chose : l’endroit de la perception. A Marseille, il suffit de mettre une chaise devant sa porte ou de s’asseoir à une terrasse pour que le théâtre ait lieu, à l’infini ou pour la vie entière si l’on veut. Le théâtre est un poison. Regarder est un poison. Le sujet de ce texte, c’est celui-ci : est-ce que décrire le monde — le monde actuel des écrans, des images et de leur déferlement — permet de le rattraper ? C’est peut-être un combat perdu d’avance, troué, mais c’est celui que mène méthodiquement Théo Casciani avec son premier roman calme comme le désert ou la mer intitulé Pourpre. L'écrit contre l'écran. Soigner la blessure. Il y a l’écran qui se reforme, toujours ; l’écran fabrique des espaces forclos. Le théâtre, l'écrit, c’est au contraire un seul espace ; l’auteur ou l’acteur sont présents pour aider le lecteur ou le spectateur à rêver son monde.
La salle où nous jouons ce soir fait écran. De partout où l’acteur se place, il est séparé de l’auditeur par une vitre acoustique. On essaye, ce soir, une dernière solution, le mêler au public. Mais la vitre sera toujours là — combat perdu d’avance ?
Yves-Noël Genod
Extrait du roman Pourpre de Théo Casciani (en préparation). L’extrait sera publié dans la revue « If »
Lumière et son, Erik Billabert. Avec Yves-Noël Genod
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