Tuesday, November 17, 2015

U ne tonne d’amour


Ces nains de jardin qui nous gouvernent et qui nuisent grandement à notre sécurité ont terminé leur petit caprice : ils nous laissent accueillir du public à partir de ce mercredi ! Trois représentations que l’on a jouées entre amis (et des amis, j’en ai pas des masses à Lyon !), mais trois représentations très belles. Est-ce qu’elles seront aussi belles ? les quatre dernières de N°5, le spectacle « préparé sous vos yeux », maintenant que le grand public va déferler — car j’imagine qu'il va déferler. Il n’y a pas plus de risque d’attentat au théâtre du Point du jour que partout dans la rue, je pense personnellement qu'il y en a moins. Quelqu’un m’a demandé, ce soir, si c’était à cause des événements que nous jouions de cette manière, que nous avions inventé cette forme improvisée ou si c’était prévu. Prévu. La folie et la mort sont au centre du théâtre. On ne peut pas ne pas en parler. Mais la couleur donnée par les événements à ces représentations clandestines, les masses de morts et de blessés, les larmes et le désespoir, la résonance des mots d'Anton Tchekhov en particulier est troublante, « Des milliers d’hommes hissaient une cloche, cela avait coûté beaucoup d’efforts et d’argent, et brusquement, elle est tombée, en miettes. Comme ça, sans aucune raison ».

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L e Monstre


Le dimanche des attentats, nous allons manger des huîtres chez Manu (Le plateau de Manu, 144, bd de la Croix-Rousse), mon père et moi, et mon père me montre ce qu'il a fait dans son assiette : «  Un monstre »

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L éger dépassement de soi


Depuis quatre jours, le maire de Lyon, Gérard Collomb, punit le théâtre municipal du Point du jour en l’empêchant d’accueillir du public. On ne sait pas pourquoi, c’est moi le terroriste ? Partout en France les théâtres jouent et à Paris aussi, mais le théâtre du Point du jour, il n’en est pas question, les ordres sont les ordres. Très bien mon capitaine (on votera pas pour vous), mais vous ne pouvez pas (encore) m’empêcher de respirer, alors je joue, personnellement je joue — avec mon père et mes amis. Nous jouons clandestinement comme dans Le Dernier métro, nous ne jouons que devant et avec les amis (et les amis d’amis d’amis), ce qui, pour ce spectacle — qui est une masterclass —, est assez idéal, je dois dire. La notion de « public » est abjecte. « C’est pareil, lecture, écriture, maintenant on le sait » (Marguerite Duras). « Je suis venu au théâtre, j’ai vu cette pièce, j’ai joué cette pièce, j’ai écrit cette pièce » (Peter Handke, dans Introspection, de mémoire). Les pouvoirs publics ont tout faux, ce qui entraîne des conséquences, dès qu’ils le peuvent, sanglantes. La vie leur échappe, ils sont là pour la tuer. Ce sont des tueurs. Avec leur air de s'occuper de tout, ils savent rien. Nous, ce que nous faisons, c’est le contraire. Nous nous occupons du sérieux, du sérieux de la vie. Nous ne sommes pas des pervers narcissiques, nous. Franz Kafka : « faire un bond hors du rang des assassins ». Ces assassins, ce sont certes actuellement les schizophrènes qui « passent à l’acte », mais surtout les dirigeants qui les manipulent, les récupèrent, mais aussi les nôtres, de dirigeants, qui font passer (toujours) leur avancée dans la carrière avant l’intérêt général. L'une des raisons énumérées par Hamlet pour se suicider est la bureaucratie, « the insolence of office ». Samuel Beckett : « parce que j’avais besoin d’être mal armé ». Franz Kafka encore : « Dans ton combat entre toi et le monde, seconde le monde ». Barbara : « Qu’est-ce que c’est que le talent ? est-ce que ce n’est pas entrer en scène et sourire ? » La disparition des lucioles / Survivance des lucioles… Au théâtre du Point du jour, nous jouons un spectacle « préparé sous vos yeux », comme César Vayssié en a détourné le slogan d'une chaîne d’empoisonnement alimentaire en toute impunité.

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L a Vision la plus belle


« Il lui demandait de jouer à la place la petite phrase de la sonate de Vinteuil, bien qu’Odette jouât fort mal, mais la vision la plus belle qui nous reste d’une œuvre est souvent celle qui s’éleva, au-dessus des sons faux tirés par des doigts malhabiles, d’un piano désaccordé. »

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