Friday, December 30, 2011

« Si no apuestas, no tienes la oportunidad de ganar »



Sur la plage, nous mangeons de petites huîtres sans goût qui viennent de la lagune. On les mange avec du sel et du citron vert comme la Corona (ou Victoria) et la tequila. Le ciel est indubitablement gris, de tous les gris, les profondeurs. Indubitablement vaste (et puissant). Nous sommes dans le golfe du Mexique. Un paysage d’Irlande. Et quelqu’un dit : « Le diamant, ça rend fou. » (Je pense que c’est Camille.)

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Inutile d’apprendre ce que personne ne sait




Le premier jour, François voulait partir sur le fleuve. Nous étions arrivés le soir. Nous avions roulé toute la journée depuis Mexico DF. La journée était tombée. Nous étions à l’embarcadère dans le noir total. Presque total. Nous avions pris une bière, nous devions attendre Christian qui s’était perdu. Il ne fallait pas trop attendre, les pêcheurs plaçaient leurs filets que les passeurs devaient alors éviter, c’était des complications, des ralentissements. On fonçait dans le noir. J’avais noué mon foulard au-dessus de la tête. Nous ne savions pas où nous étions. Nous traversions la lagune. Alligators. François avait voulu aller sur le fleuve. François avait vidé la réserve de bouteilles prévues pour le 31. Et François voulait partir sur le fleuve comme le capitaine Haddock avait brûlé les rames. Il ne voulait pas partir seul. Il voulait convaincre Christian de venir. Il voulait convaincre tout le monde de venir, puis il s’était focalisé sur Christian. Et Christian n’arrêtait pas de dire : « Quelle est ta motivation, François ? » Il ne fallait pas le laisser partir, c’était ce que je pensais. Camille avait pêché un diamant. Je dénonçais à Gaby les bouteilles de tequila que François avait déjà cachées dans la barque encore sur le sol. François était obstiné. Il pensait qu’il n’y aurait rien de plus beau à dériver comme ça sur l’eau dans le noir. Il ne parlait pas des bouteilles de tequila (on pensait d’ailleurs qu’il les avait toutes sifflées). Ensuite, autre complication, les chiens avaient joué avec ses chaussures et ses chaussettes, le propriétaire de l’hôtel n’en retrouvait que la moitié. Et le chien, l’un des chiens (l’autre, inutile de lui demander) ne comprenait pas ce qu’on attendait de lui : qu’il dise où ils avaient enterré la chaussure. François était furieux quand il avait été clair que nous n’allions pas céder et qu’il n’allait pas partir sur le fleuve. Il ne voulait pas partir seul, il ne voulait pas simplement nager, il ne voulait pas partir avec la barque attachée, il ne voulait pas aller même déjà sur le ponton, il ne voulait pas – je l’avais même proposé – aller dans la barque que nous aurions secouée comme s’il avançait parmi les remous. François avait dit : « Comme toujours, alors, je vais sublimer ma frustration en faisant un dessin ! », comme nous tenant responsable de la misère de sa destinée. François est un immense dessinateur. Il avait sorti les gouaches et il avait d’abord rempli une feuille de son carnet au trois quarts de bleu nuit, puis dans le dernier quart, il l’avait remplie de noir : l’eau glissante.

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« La realitad es una ilusion producida por la falta de alcohol »






































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« Ce qui est le plus sacré, ce n’est pas la vérité, c’est le jeu de la vérité. »

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La Fabrication de la peau




De la paresse au bord de l'eau. J'entends de la cour de récré, comme d'une plage, l'infini des enfants et le soleil avance à pas de loup dans la chambre – je lis un livre au lit, une pièce de théâtre, et cet effort ferme les yeux...
Le mot qui me vient le plus facilement pour décrire une sensation est le « on » que je transforme en un « je » – pour la commodité du lecteur.
Il est dix heures vingt, je me suis levé à l'aube avec l'autre, celui qui travaille et qui, en cela, fait l'homme. C'est le problème de ce « on », d'y inclure ma mère.
Mais quand « on » s'écoule dans la sensation pour lire, « on » y est tout de suite suspendu, la tête hors de l'eau, je veux dire : sauvé. Je ne suis que sur une plage, une conque, une anse, ce paysage ouvert et seul à l'heure d'été.

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Pina




Pina, c'est moi. Je ne crois pas que je pourrais vous faire passer ce que je ressens à l'intérieur de moi des souvenirs des spectacles de Pina Bausch – parce que c'est inconscient.
Pendant des années dans ma vie, j'étais très seul – osons le dire : d'une solitude infinie, métaphysique, irrémissible (j'emploie ce mot à défaut d'un autre).
Et, donc, voyez, je survivais, et j'avais – puisque je ne vivais pas – un temps infini, quasi infini... J'étais jeune, mais ce mot ne veut rien dire et ne vous dira rien.
Je regardais sans fin les films de Marguerite Duras qui passaient à Lyon ces années-là, plus tard les films de Robert Bresson qui passaient à Paris ces années-là, je fréquentais Claude Régy, dont le théâtre avait effacé tout le reste et je voyais tous les spectacles de Pina Bausch, à toutes les représentations, à Villeurbanne, Paris, Avignon, Wuppertal... J'étais fan aussi de la chanteuse Barbara. Vous voyez, rien d'avouable.
Heureusement la jeunesse a changé.
Les époques changent au galop, c'est ce qui fait que les choses que nous avons vécues restent vivantes, inconscientes.
En ce temps-là, d'abord Pina Bausch montrait, à Villeurbanne, Bandonéon, la pièce uniquement sur les musiques de tango. La troupe était jeune et aiguë, acerbe, douce. C'était le début des années 80. L'année du bac.
Quand Pina Bausch a repris le spectacle, vingt-cinq ans plus tard, avec les mêmes danseurs, inutile de vous dire que je n'ai strictement rien reconnu de celui dont chaque détail est pourtant en moi si vivace, si précis, vivant. Les danseurs avaient vieilli, je voyais devant moi une reconstitution poussiéreuse, c'était très intéressant, la couleur du spectacle était grise, ambre, fantomale... Le théâtre n'était pas le même, l'époque avait changé, moi, je n'étais pas le même, j'avais changé complètement, et pourtant j'avais en moi et j'ai en moi – comme je vous dis – le souvenir parfait de ce spectacle peut-être le plus important de ma vie. Ce spectacle dont je pourrais vous décrire chaque moment.

Deux poèmes




Le Mot rayé



Les diamants dégoulinent de ma poche vers votre dos, les foulards

Le chevalier se promène un livre à la main

J'ai fait noyer ma tête dans un bac de linge, de nuit, de lac, mes paupières se sont tues

Il faut tout imaginer, c'est la maison, la meurtrissure, la buanderie

Lire, c'est entre deux nuits, entre deux rives

(Et elle s'amuse si adroitement...)

Les actes, les scènes, une petite scène, ton oeil...

Des scènes d'amour se greffent (dans mon esprit malade) sur d'autres scènes, je confonds la pièce, ou la scène…

Dois-je fermer, ouvrir les yeux – où est ma virilité dans l'histoire ?

Mais l'un des traits du meurtre – du neutre...

La joie, la liberté, qqch lâche, féminin-masculin, cousines aux cheveux courts, India Song...

– Autant de secrets en laissant autant de place aux mensonges –

On lira des carnets décrivant « une vie »…

L'un des pied est froid, je n'ai trouvé qu'une chaussette

« Les mots refroidissent de saison en saison… »






Ce démenti de chef-d'œuvre

L'époque maint'nant

De loin, on dirait des vraies personnes qui parlent dans la vraie vie

Il n'y a rien à couper

Je me sens baigné par une intelligibilité

Courir sur une plage avec une épée

L'hasard

Le bien que l'on me veut

La cave du subconscient

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