Friday, January 04, 2013

Viridiana


« Sois le changement que tu veux voir dans le monde. »

« Ce sont des crétins finis. S'ils ont envie de dormir tous avec Poutine, qu'ils se mettent dans son lit et puis l'affaire est réglée. »

Je pensais à l’homme qui ne reconnaissait pas les visages en regardant le film que je ne comprenais pas. J’avais mis un peu de temps avant de comprendre que la bonne sœur que l’on voyait au couvent était aussi la jeune femme que l’on voyait près d’une calèche puis dans une chambre... Bien sûr, les films n’étaient pas faits pour ne pas être compris, a priori, et on y parlait beaucoup. Néanmoins mon soutien au cinéma était incomparable dans une langue étrangère et sans sous-titres. Mon imagination était reine, mon amour était vierge. Je naviguais enfin dans la vraie sensation, comme dans la peinture. Le cinéma était l’art de la vie, de la lumière, pas de la parole. Je veux dire : pas de la parole circonstancielle, compréhensible. Que les êtres humains parlent, sont « pris dans le logos », disions-nous avec François Tanguy, je ne le sais que trop ! Laissez parler les gens sans les comprendre, c’est ce qui est beau car c’est de la lumière, de l’art, du cinéma ! J’aimais le cinéma à l’étranger. Je ne comprenais pas qu’il n’y ait pas une salle à Paris pour montrer les films sans sous-titres, dans leur eau d’origine, perdus dans une capitale étrangère ou dans une pampa, perdus au milieu de tout, de toute la perdition qui est l’amour et le fleuve et le temps — et le suspens. Et puis un acteur joue beaucoup mieux quand on ne le comprend pas parce qu’il est alors pris dans la réalité. Comme Depardieu. Depardieu est un homme qui existe dans la réalité. Ça ne l’empêche pas d’être « un crétin fini », comme dit Daniel Cohn-Bendit. Cette femme en blanche que l’on amenait sur la musique sacrée dans des couloirs et des maisons qui me rappelaient l’Espagne et le Mexique (le Mexique étant la réalité de l’Espagne). Ce qui était insultant, c’était la délicatesse. Il fallait lire en transparence, il fallait vivre en transparence. L’amitié, l’amitié entre les peuples. Ce que je comprends de Viridiana, c’est qu’elle vit, c’est qu’elle n’est pas finie, c’est qu’elle n’est pas datée. C’est que je vais vers elle. Ce que je n’ai pas compris du film est bien supérieur à ce que j’en ai compris. Elle me parlait de ces soirées d’hiver à la campagne où il faisait nuit à cinq heures, où toutes ces heures qui venaient étaient pour la lecture. Comme elle aimait l'hiver pour ce temps disponible ! 

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« Ah, les livres... Evidemment, ils font tout ce qu’ils peuvent pour nous, mais nous devons les y aider et les compléter. »

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Dime si eres dichoso


J'allais écrire, j’avais trouvé un titre : Dis-moi si tu es heureux, Dime si eres dichoso... J’allais me battre encore avec cette vieille langue qui m'envenimait, m'affadissait, m'enfermait comme une drogue. C'était un moyen de me recentrer. J'étais si nerveux dans cette grande ville et j'avais été si heureux à la campagne. Je ne m'intéressais qu'à moi-même, je le reconnaissais, les gens me paraissaient vivre des choses terrifiantes, et, moi aussi, je vivais des choses terrifiantes — mais j'étais épaulé par Dieu. Qu'on me foute la paix ! Le couvent, le monastère, c'était moi. Indifférence pour l'humanité en mouvement, la fête, les hôpitaux, les faillites, l'effacement des uns par les autres... Diam's. Son plan de com. Elle ne voulait être interviewée que par des femmes, elle était devenue religieuse. J'avais lu qqch là-dessus le matin. L'humanité était merveilleuse, mais je n'avais plus la force. La force revenait en déposant ces mots. J'étais dans la cathédrale et j'essayais l'application « Notes » de mon iPhone, la cathédrale qui recouvrait Mexico. Je pensais à Dennis Cooper. Je pensais à lui écrire. La chose la plus importante qui m'était arrivée depuis des siècles avait été de lire son livre, Guide, pendant cette journée de « mauvais temps » à Santa Catarina. Là, j'avais su ce qu'était l'écriture, la littérature, la pensée, la vie, la solitude-vie reliée au ciel. Je voulais être chercheur. Je voulais étudier le ciel. Je voulais vivre dans le luxe. Aimer m'importait peu. Je voulais me battre pour les bêtes, les flux, les étoiles. La littérature était l'accès. Encore fallait-il trouver le bon livre ! ou la musique. Dieu laissait les hommes libres de se décimer, de s'aimer. J'aimais Dennis Cooper, sa matière-livre. Je n'étais même pas sûr que ce que j'avais lu eut été écrit par lui (il y a déjà longtemps), mais, en tout cas, j'étais sûr de l'avoir lu. On invente les livres qu'on lit. Encore faut-il trouver le bon livre. Aiguille dans une botte. Le bon livre et le bon lieu. Je haïssais Mexico. Je ne voulais rien apprendre de Mexico. Je voulais que Dennis Cooper « ait écrit ce livre » encore à l'infini, soit encore à l'écrire, ne s'en soit pas détaché, n'ait jamais rien vécu d'autre. Allons ! Je m'étais calmé. Il était temps de me lever de ce banc de cette église — cette silencieuse, glissante église de tes yeux, ô mon lecteur, de tes deux yeux silencieux pareils aux yeux de Dieu car, comme chacun sait, il est possible que Dieu soit un plouc comme les autres. Je n'aime pas trop écrire par ce système d'exercice pour le pouce. D'ailleurs je n'aime pas trop. Es-tu heureux ? C’était de nouveau la fin d'été — en Bretagne —.

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Un document sublime
« Il faudrait que je vous dise qqch d’utile, Marcel. »

La Transparence des livres



« « Voir un texte par transparence ». 
— Oui. Expliquez-moi cela. 
— C’est-à-dire ne jamais s’arrêter à la lettre du texte, voir toujours ce qui est derrière, tâcher de deviner ce que l’auteur n’a pas su, pas pu ou pas voulu y mettre et nous-même le rajouter. D’ailleurs, il disait : « La langue est tellement pauvre ! » L’auteur, au fond, a fait ce qu’il a pu avec les mots qu’il a trouvés et c’est à nous à regarder par transparence ce qu’il a voulu exprimer parce que c’est par transparence que vous apercevrez — dans le filigrane — la réalité de ce qu’il y a dans ce texte qui n’est pas réellement tel qu’il est imprimé, mais qui est autre. »

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