Friday, December 23, 2022

C’était le livre de mon adolescence. Je ne sais pas à quelle époque je l’ai découvert, probablement quand je fréquentais Marguerite Duras puisqu’elle en avait écrit une préface, mais à partir du moment où ce livre m’est tombé dans les mains, je n’ai eu de cesse de le donner autour de moi. Je n’offrais que ça, toujours, à tous les gens, je répandais la bonne nouvelle. Et, voyez, je vous l’offre encore. On le trouve toujours, c’est la bonne nouvelle, à l’état neuf. Les éditions de Minuit ne pilonnent pas leurs livres. Il y a un grand entrepôt avec tous les livres (c’est mon libraire qui me le dit). C’est encore l’édition originale de 1980, avec la photo sur la couverture. Qui a décidé de cette photo, je ne sais pas (ça ne se faisait pas aux éditions de Minuit). Jérôme Lindon n’aimait pas ce livre, il n’a accepté de le publier que s’il y avait une préface de Duras (qui, elle, l’adorait comme elle adorait son auteur, je crois). J’avais aussi rencontré Jean-Pierre Ceton à l’époque. Il était très beau. Très, très beau. Il couchait avec mes copines du conservatoire, enfin, pour lui, ça n’arrêtait pas… On ne parle pas assez de ce phénomène, je trouve, que les beaux baisent comme ils respirent. Ça doit changer la vie, je me suis toujours dit. Ou pas ? 


C’est un livre qui finit tout le temps, qui n’avance pas, qui finit, finit tout le temps

Le temps du livre… Oui, le livre est un temps…

Il ne commence pas vraiment, en fait

C’est un livre qui est déchiré de la jeunesse, mais c’est la même déchirure maintenant. Vous pensez que les jeunes ont gagné en confort depuis 1980 ? Non, je ne crois pas, c’est toujours aussi terrible pour la jeunesse malgré les réseaux, les idées de communautés… C’est toujours les mêmes manières de dire : nous n’en sommes pas, malgré les faux-semblants d’en être — et du bon côté — de l’époque. C’est toujours La Maman et la Putain et c’est toujours, plus encore peut-être, le suicide… parce que quand on s’aperçoit que rien n’a strictement avancé depuis 1980, qu’on est toujours au bord de la fin, qu’il y a un espace très réduit qui est celui-là — oui, c’est dur pour la jeunesse que tout le monde a essayé d’aider entretemps… Heureusement qu’IG limite la longueur des posts, sinon je vous ferais des livres et des livres sur le sujet…

C’est un livre infini, alors, ce que je vous en dis là, je pourrais le continuer (continuer de le dire) dans un an, dans dix ans — si on y arrive…

Ce livre contenait quelque chose comme de l’amour que j’aurais pu distiller à tous ou du moins à beaucoup et que, peut-être — les biographes vous le diront — j’ai finalement distillé, qui sait ?