Monday, September 24, 2012

Merci beaucoup, Paris !



Dernière minute : Ce soir, lundi 24 septembre, je me fais couper les cheveux à la radio (en direct) dans l’émission d’Aurélie Charon, à 23h, sur France Culture, « L’Atelier intérieur ». On me demande de ces choses… Pourtant, « Je suis mes cheveux »,  dit Jean-Paul Sartre.






Un jour – j’avais sept ans – mon grand-père n’y tint plus : il me prit par la main, et dit que nous allions faire une promenade. Mais à peine avions-nous tourné le coin de la rue, il me poussa chez le coiffeur en me disant : « Viens, nous allons faire une surprise à ta mère. » J’adorais les surprises. Il y en avait tout le temps chez nous. Cachotteries amusées ou vertueuses, cadeaux inattendus, révélations théâtrales suivies d’embrassements : c’était le ton de notre vie. Quand on m’avait ôté l’appendice, ma mère n’en avait pas soufflé mot à Karl pour lui éviter des angoisses qu’il n’eût, de toute manière, pas ressenties. Mon oncle Auguste avait donné l’argent ; revenus clandestinement d’Arcachon, nous nous étions cachés dans une clinique de Courbevoie. Le surlendemain de l’opération, Auguste était venu voir mon grand-père : « Je vais, lui avait-il dit, t’annoncer une bonne nouvelle. » Karl fût trompé par l’affable solennité de cette voix : « Tu te remaries ! » « Non, répondit mon oncle en se souriant, mais tout s’est très bien passé. » « Quoi, tout ? », etc. Bref les coups de théâtre faisaient mon petit ordinaire et je regardai avec bienveillance mes boucles rouler le long de la serviette blanche qui me serrait le cou et tomber sur le plancher, inexplicablement ternies ; je revins glorieux et tondu.

Il y eu des cris, mais pas d’embrassements et ma mère s’enferma dans sa chambre pour pleurer : on avait troqué sa fillette contre un garçonnet. Il y avait pis : tant qu’elles voltigeaient autour de mes oreilles ; mes belles anglaises lui avaient permis de refuser l’évidence de ma laideur. Déjà, pourtant mon oeil droit entrait dans le crépuscule. Il fallut qu’elle s’avouât la vérité. Mon grand-père semblait lui-même tout interdit ; on lui avait confié sa petite merveille, il avait rendu un crapaud : c’était saper à la base ses futurs émerveillements.

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Chloé Dudzik


Photo Anne Issermann.

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Dominique Issermann / Leonard Cohen



Avec la beauté d’Anne Issermann dedans.


« Tell me again when I’ve been to the river… »

Le Diapason de Lyon



Paris, c’est le pouvoir, Lyon, c’est l’âme.



Passer son temps à se fuir, c’est Paris. Passer son temps à se trouver. C’est Lyon. On me dira. Quelle est cette connaissance que j’ai de Lyon ? C’est tout. C’est creux dedans. C’est Lyon, ça s’ouvre comme une caverne. Une caverne-monde inversé. La terre n’est pas ronde, mais creuse (de mon point de vue).

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Mon métier



Faire du théâtre avec les circonstances.

Réajustement



« Enfin, disons, un peu hétéro… »

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« Show me the place where the word became a man »



Finalement, je vais m’habituer à ETRE A PARIS. Parce que Paris, c’est qqch. Je veux dire, c’est pas seulement Paris, c’est aussi qqch. Je le vois en marchant avec Olivier Steiner. Les petits Parisiens. Eh, bien, les petits Parisiens du samedi après-midi, ils n’existent nulle part ailleurs qu’à Paris... Ils sont moches et charmants, ils n’ont aucune beauté sauvage. Ils sont névrosés, farouches, archi-modés... MAIS PARISIENS... 



Olivier reviens – des toilettes, peut-être ? – enfin, il reviens très excité, déterminé. Nous sommes en terrasse, en face des Cahiers de Colette, au Bouledogue. « J'ai une idée, tu vas la noter, elle est géniale. 

Tu vas mettre une annonce sur facebook :

« Cherche collectif de nègres sans ego pour écrire un livre sur moi. Envoyer texte à telle adresse… » »

Je note très vite, je passe à la première personne : « Moi, j’écris mes remarques, mon avis, je valide ou pas et j’envoie le tout à Liliane. C’est comme de l’autofiction collective. Avec peu de frais, t’as un livre génial ! (Ah, là, je suis repassé dans la peau d’Olivier Steiner.) D’ailleurs, ça peut être le genre. Au lieu d’écrire « Roman », « Fiction », tu mets : « Autofiction collective », t’inventes un genre. Pas mal, hein ? »

(Olivier revient des toilettes : « Je viens d’avoir une idée, tu vas la noter, elle est  géniale, sors ton carnet ! »)
« Les narcissiques, ça va les déranger qu’il n’y ait pas leur nom, mais ça va autoriser aussi d’autres personnes à écrire – parce que ça décomplexe aussi. Mais faut pas qu’il y ait les noms parce que ça ferait recueil ringard… Une quarantaine d’auteurs… Construis le livre d’une telle façon que tu ne sais pas qui parle, tu mélanges tout comme si c’était un seul texte. Cf le livre de Colette Godard sur Patrice Chéreau. » Et Olivier me parle de ce livre que Colette Godard voulait écrire avec Patrice Chéreau. « Et Patrice n’avait pas envie, comme toi, de se replonger dans le passé. Alors il a eu l’idée de dire à Colette Godard de lui envoyer les textes qu’il annoterait. » Olivier dit que le livre est très agréable parce que les textes journalistiques de Colette Godard se tiennent et qu’ensuite Patrice Chéreau fait entendre une autre voix, la sienne, qui dit : « Ce n’était pas exactement ça… Il s’est passé ceci. Dans mon souvenir… Ce que j’en retiens… » J’oublie de prendre le livre aux Cahiers de Colette (mais Olivier me dit qu’il me le passera). Ensuite, j’ai une idée de performance. Il y a une exposition au Grand Palais qui s’appelle « Bohème », qui va commencer (mais qu’Olivier a déjà vue, je crois). Alors, je propose cette performance : Aller vendre à la criée, Bohème, le roman d’Olivier publié il y a quelques mois. Mais Olivier me répond, un peu triste : « Si tu le trouves… il est en voie d’épuisement. – Quoi, déjà ? Mais à combien d’exemplaires l’ont-ils tiré ? – Trois milles. – Oh, mon Dieu, c’est pas beaucoup… Et Aurélien Bellanger ? – Dix milles. » Ensuite, Olivier me donne le montant de l’à-valoir que Christine Angot a touché au mois d’août. PLUSIEURS CENTAINES D'EUROS. (Je ne me souviens plus : plus de deux cent milles.) « Mais, alors, ils savent d’avance que ça va faire un succès ? – Ah, oui. ILS MISENT. »

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