Thursday, June 18, 2009

La chaise d'immobilité

J'ai vu Karin Viard juste devant moi à l'Odéon avec toute sa petite famille se passer du fil dentaire... Pas choquant du tout ! Je le ferai. (Tout en parlant avec ses filles, en expliquant qu'il était "mort en jouant"...) Très jolie nuque (elle avait relevé ses cheveux), vraiment fille, pas du tout les rôles qu'elle joue.

Ensuite, Karin Viard expliquait certains détails de la pièce à ses filles durant la représentation. "Vous savez, la Parisienne, elle est d'Versailles. - Ah, j'm'en fous !"

Elle explique les expressions désuètes. "Il n'y a jamais eu de cornard dans la famille."

Puis à l'entracte, elle dit : "Cette bonne femme, dès qu'j'vous parle, elle se r'tourne, faut pas exagérer !"

Y avait aussi l'affreux bonhomme de chez Ruquier, Eric Naulleau. Avec lui ses garçons du même âge que les filles de Karin Viard.

Il avait juste l'air d'un gros con. A force de jouer le con chez Ruquier, il a beau expliquer dans les journaux qu'il n'en est pas un, on le croit plus.

A un moment, sa plus grande fille - un peu comme les filles de l'ogre, longs cheveux blond-roux, appareil dentaire - l'a chatouillée dans la nuque, cette nuque si charmante : "Pas ici, tu sais bien que je supporte pas !"

A un moment dans un silence, j'ai rigolé très fort (un peu pour me faire entendre de Nadia Vonderheyden) et la grande fille s'est retournée puis Karin Viard puis l'autre enfant. (Je faisais partie de la famille.)

Eric Naulleau, je m'd'mandais comment ses deux fils faisaient pour supporter de voir leur père...






(Dimanche 21 juin 2009.)

To Kate

Le maître-mot est d'avoir du plaisir (surtout toi qui en es si capable) et ensuite, plus particulièrement, de prendre du plaisir à éviter les pièges (la supériorité que nous avons, quand même, sur nos chers spectateurs, c'est que nous les connaissons un peu), éviter les pièges autant que faire se peut pour amener le public le plus rapidement possible là où nous avons envie de l'amener, à ces "vacances dans la réalité" dont parle le poète.
Le spectacle (ta partie, avec Pierre) était très beau sans Felix. Toute l'astuce maintenant c'est qu'il le soit autant avec lui, c'est à dire qu'il garde cette beauté "India song", anthracite, et que néanmoins Felix soit là comme un catalyseur de réalité, d'indépendance (et d'amour vivant).
Toujours dans l'idée d'éviter qu'une idée du spectacle soit perçue à la place de la chose elle-même.
Tu me demandais le sujet du spectacle. Je pense que le sujet, c'est la beauté - mais justement la beauté, ce n'est pas une idée. C'est une perception qui a à voir avec le réel. Ce qui est beau, ce ne sont pas - ou pas seulement - les représentations du beau. C'est le sujet de ce poème de Shakespeare, peut-on dire par exemple. Nous jouons dans la lumière de service pour "aggraver" le réel. Le lieu tel qu'il existe, de ce théâtre, en ce moment.
Les arrangements importent peu. Et pourtant, comme tu le sais, c'est très précis. Il faut rassembler. Il faut rassembler avec des masses de vide. Plus que des masses de matière. (Proportion de la matière dans l'univers : 3%, dit-on, le reste est jardin virtuel). On ne peut pas rassembler avec les moyens ludiques qu'on avait à Chaillot. Mais les moyens du cosmos sont là, dans cette salle parfaite, ludiques aussi.

Je vous guiderai encore deux jours. Nous utilisons le temps au mieux. Tout le temps. Et vous, toi, juste s'ouvrir, la plénitude, l'être, l'inconscient du bonheur.
Le spectacle a été très bien reçu par les amis d'hier.

Je t'embrasse


Yves-Noël

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