Friday, July 12, 2019

« Je suis le miroir de l’infini extérieur, c’est impossible, pour moi, de me définir. »

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« Il faut enterrer les morts et réparer les vivants. »

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Alléluia ! Dieu m'a exhaussé ! Je priais depuis que je t'ai envoyé ce message pour que tu ne sois pas à Paris ! Je t'ai affreusement dans la peau, tu sais... Ma vie risquait de s'effondrer dans un chaos indescriptible. Heureux homme ! Tu es à Toulouse ! Je suis sauvé ! Merde... j'y passerai dans quelques jours. Je te recontacte. Surtout ne bouge pas ! YN

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À minuit, il y était. Il me roulait une cigarette. J'étais stone. Je lui demandais si c'était du tabac. Oui. J'étais stone. C'était du tabac qu'il avait trouvé juste en s'asseyant à côté de moi. Il connaissait des gens. Beaucoup de gens. Mais déjà quelques personnes en s'asseyant à côté de moi. Je désirais ce garçon. Il était souple comme la vie. Il glissait. Il était beau. Le plus beau de tous. Le moins image. Le garçon efféminé qui lui parlait lui montrait son « mega coup de soleil ». Et à moi aussi. Il disait (il montrait) qu'il avait une tache « à la Gorbatchev ». Je me demandais d'où il sortait cette référence. Peut-être était-il russe aussi. Je ne demandais pas. 

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L e Théâtre politique


« Est-ce qu’il reste du théâtre publique qui se dirait absolument pas politique ? Apolitique. Parce que ce serait pas une contradiction dans les termes d’être subventionné et donc d’avoir… On a forcément une mission politique, non ? si on est subventionné par l’Etat ? Est-ce que ce serait possible de dire : Oh, non, moi, c’est juste faire des textes que je trouve sympa…
— Mais c’est peut-être ça qui va redevenir politique »

« Je crois vraiment qu’on ne sait pas ce qu’on produit au théâtre et qu’il faut arrêter de se poser la question. Je pense que le théâtre politique le plus émancipateur — ça veut pas dire que y a pas d’autres théâtres politiques et le théâtre militant est un théâtre politique, mais le plus émancipateur, c’est un théâtre qui arrête de vouloir produire des effets sur les autres, qui arrête d’anticiper les effets qu’il va produire parce que c’est encore une manière de manager quelqu’un, c’est encore une manière d’organiser la réception. Après, on verra, peut-être que dans quelques mois, dans quelques années, il faudra revenir à un théâtre frontal et immédiatement efficace comme Piscatore dans les années 20, bon, on va voir où va nous amener cette conjoncture abominable dans laquelle on est en ce moment. »

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« La scène est un lieu privilégié du monde où tout est un spectacle auquel on ne croit pas. »

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Salut Ireïna, 
J’espère — je suis sûr — que ton concert s’est bien passé à Pantin.
Je voulais te dire, comme on avait parlé de reprendre la pièce, et tu parlais de septembre (peut-être est-ce moi qui en avais parlé), septembre, c’est impossible pour moi, j’ai deux autres spectacles à faire en septembre. J’espère qu’on la reprendra un jour. En tout cas, moi, je n’en ai pas fini avec Tchekhov ni avec cette pièce. Mais je voulais te dire, en attendant, si tu veux en reprendre des extraits pour toi-même dans tes récitals ou dans d’autres circonstances, fais-le (je dis extraits à cause de ce problème de temps non résolu). Mets alors mon nom juste dans les remerciements. Mais fais-la à ta manière.
T’embrasse, 

Yvno

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T earoom, de William E. Jones


Ahahah ! Enigma ! C’est vraiment des pd, là, y a plus de doute, on tient la preuve ! J’ai vu hier à la cinémathèque un film très ennuyeux (donc très bon) fait avec de la pellicule... je sais pas comment quelqu'un a récupéré ça... la police avait décidé de surveiller une pissotière et un policier (ou plusieurs se relayant) filmait en caméra cachée les pd qui se mattaient, se branlaient, etc. Ce qui est émouvant, c’est la répétitivité des actions et des affects (le sexe, la peur et l’excitation d’être découverts) et les différences minimes des individus, tous à peu près beaux et à peu près moches et c’est que ces hommes sont tous morts, c’était dans les années 50 ou 60 aux Etats-Unis... Je n’ai pas reconnu Merce ni Cage dans le défilé, mais…
YN

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E crivait Maeterlinck


« Voici ce que je voudrais faire, écrivait Maeterlinck en 1898 : mettre des gens en scène dans des circonstances ordinaires et humainement possibles, mais les y mettre de façon que par un imperceptible déplacement de l’angle de vision habituel apparaissent clairement leurs relations avec l’inconnu. » 

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R ien avec rien


Tu vois où j'en suis réduit : mendier des soirées, mendier l'amour nocturne...

Voilà notre croix, Yves-No ! Je mendie l’amour diurne !

Mais je t'aime !!! Ah, le monde est mal fait... Rien ne va avec rien…

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M erce émoi



Voici une première version. Mais on fera mieux. Je pars sur les routes et je ne connais plus personne pendant dix-quinze jours. Alors voici déjà… D’ailleurs c’est un peu trop long, je crois, 3 561 caractères avec espace et 2 922 sans espace, non ? 
A bientôt, chère Fabienne, 
Yves-Noël 

Merce émoi

Je ne vais pas dire quoi que ce soit d’intéressant sur Merce Cunningham. Ça va pas ? Tout le monde a dit et va dire des choses intéressantes. Mais, moi, mon métier, mon orgueil, c’est de dire des choses inintéressantes. Des choses qui n’ont pas de sens. Alors, comment voulez-vous ? Je sais — mais je ne prétends pas — que ça peut être intelligent de dire des choses inintéressantes. Par exemple, quand c’est Tchekhov qui dit que — eh bien, que la vie n’a pas de sens. Il le dit dans cette pièce de théâtre qui n’est que musique, que neige qui s’appelle Les trois sœurs. Alors, oui, il y a « Merce Cunningham » dans le titre de mon nouveau spectacle. C’est affreux de le remarquer, mais que voulez-vous que je vous dise ? Denise Luccioni — qui me sert de garde-fou, me rattrape — m’assure que « beaucoup de conneries ont été dites sur Merce ». Moi, je trouve que les conneries font partie du corpus. Elle me dit d’ailleurs qu’elle a horreur du mot « spécialiste » — notez que je ne l’ai pas employé à son égard — et qu’elle-même dit des choses un jour, pour se rendre compte ensuite qu’elle aurait pu dire exactement le contraire. Par exemple, moi, j’aime la jeunesse de Merce. Pourquoi pas ? Alors, elle me dit qu’il n’a jamais été jeune, qu’il a toujours été hors d’âge, même jeune, qu’il n’a jamais été « le jeune homme ». Les figures d’étoiles contiennent tout. Si je faisais un spectacle sur Marilyn Monroe, je pourrais tout dire. On a dit que Marilyn prenait sept bains par jour. On a dit qu’elle ne se lavait jamais. Tout peut se soutenir. Les idoles nous sont aussi mystérieuses que cette part de nous-même qui nous pousse à écrire, jouer, danser ou à nous laisser dériver. Au fond, nous ne savons rien de ce qui nous arrime. Nous ne pouvons nous connaître que sous des formes approchées et contradictoires. La seule posture juste concernant Merce serait peut-être de regarder les oiseaux en pensant à lui. Notez que je ne parle de Tchekhov que parce que je viens de finir un spectacle sur Les trois sœurs et que ça ne me gêne pas d’en parler, contrairement au spectacle sur Merce dont je ne ne veux rien savoir ici — et donc, je disais, Tchekhov dit dans une lettre : « il serait temps que les gens qui écrivent, en particulier les artistes, reconnaissent qu'en ce monde on n'y entend goutte ». En particulier les artistes, je souligne. Il écrit ça vers 1900 mais on n’a pas progressé. Rien du tout. Que dalle. Plus tu progresses, moins tu comprends. C’est les astrophysiciens qui le disent. Le cerveau résiste à la compréhension. Paraît. On espère maintenant dans les robots. Il me semble que Merce Cunningham a senti ça, su ça et qu’il l’a dit. Sa danse ludique et métaphysique est sans bruit, sans parole, mécanique. Tchekhov (dans Les trois sœurs) : « Les oiseaux migrateurs, les grues, par exemple, ils volent, ils volent, et quelles que soient les pensées, nobles ou pas, qui leur passent par la tête, ils continueront de voler, sans savoir ni pourquoi ni vers quoi. » Merce dit de la danse qu’elle est « aussi juste et impermanente que la respiration ». Il dit peut-être cela sous l’influence de Duchamp qui, un moment, avait soi-disant renoncer à l’art pour devenir un « respirateur ». Trouver un langage pour la vie, c’est toujours l’idée. Alors je regarde le beau portrait photographique que le festival Echelle Humaine a mis sur son site et je rêve. Rencontrerai-je en rêve Merce ? Ce serait un amour de vacances et nous nous retrouverions en septembre pour un mariage public...

Yves-Noël Genod, le 9 juillet 2019

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