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PS : J’ai revu Gérard Depardieu chante Barbara au Cirque d’hiver hier, c’est sublime, il est en meilleure forme physique d’ailleurs, un médecin lui a fait peur en lui disant (il a 69 ans) qu’il avait un organisme d’un homme de 85 ans, du coup il a arrêté de boire (et il a retrouvé du souffle, il chante magnifiquement). L’ami qui m’a placé et qui s’occupe du spectacle (qui lance les roses tous les soirs) a raconté que, dans la loge, juste avant, Gérard Depardieu l’avait fait se bidonner parce qu’il avait lu une lettre d’une fan en y rajoutant des obscénités du genre ‘j’ai envie que vous me fourriez le trou de balle avec des pelures de mandarine et que vous veniez le humer pour une fois qu’il sentirait bon’, etc., ‘que vous me rentriez dans la chatte l’os de l’osso buco que je dégusterais avec vous après le spectacle’, enfin, vous voyez le genre. Le genre des lettres de Mozart à sa sœur. (Je ne sais pas pourquoi, je pense que ça va plaire à Gildas cette histoire.) A la fin, Depardieu a terminé en disant : « Elle est jolie, cette lettre ». Tout ça pour vous dire que c’est possible aussi de faire du comique avec le sérieux et le sacré, c’est même sans doute souhaitable. Bien entendu, les matières que nous proposons ont à voir avec le sacré (vous vous souvenez de la phrase de Bernard Shaw que je cite souvent, à qui l’on demandait s’il croyait que la Bible avait été écrite par l’Esprit Saint et qui a répondu : « Non seulement la Bible, mais tous les livres »), c’est-à-dire avec la croyance (folle comme toutes les croyances) qu’il y a un trésor. Et voici comment Yannick Haenel (l’auteur de Tiens ferme ta couronne) en parlait l’autre jour à la radio : « Le narrateur de ce livre — et sans doute moi aussi — essaye de faire preuve de tactique, de stratégie, il détourne l’attention grâce à ce qu’on appelle l’auto-dérision, voilà. L’idée qu’il y a un trésor, la quête de ce qu’on appelait philosophiquement la Vérité, enfin, qu’il faut continuer à appeler par ce nom, implique de créer non seulement des rapports, mais des nuances de nuances de rapport pour se mettre en route, pour s’acheminer vers là et je pense — moi c’est devenu un peu un réflexe en écrivant ce livre — je pense qu’il vaut mieux en rire parce que le rire n’invalide pas le grand sérieux de la chose, mais rend celui-ci beaucoup plus léger et même admissible, si je puis dire. » A la rigolade !