Sunday, May 08, 2016

Á gua


Eh oh, les jeunes ! Allez voir la pièce de Pina Bausch qui vient de débuter au théâtre de la Ville, Água, et qui parle du Brésil (je pensais à Ana Pi tout du long), c’est ce qu’on peut voir de plus beau sous le ciel de Dieu ! Volez des tickets aux retraités (comme moi) qui remplissent la salle. (Moi, j’ai eu de la chance, l’ultra belle Manou Farine (trop belle pour faire de la radio) m’a trouvé une place in extremis, alors que je n’y croyais plus.) C’est une pièce au savoir-faire invraisemblable (plus personne ne sait fabriquer des spectacles vraiment généreux), invraisemblable, mais, très vite, on oublie de chercher comment c’est fait parce qu’on ne veut pas perdre, une seconde, sa propre sensation. Le plaisir. C’est un spectacle à la limite du spectacle aussi — et tout son savoir-faire pour faire disparaître le spectacle, un spectacle qui n’a rien à « dire » (que la couleur… Matisse), mais qui ouvre un espace. Jorge Luis Borges dit quelque part que, plus il avance en âge, plus il écrit en clichés, parce qu’ « au fond, il n’y a rien de plus profond ». J’ai beaucoup transmis cela dans les stages. C’est une pièce à la vitalité sidérante, à la sensualité unique. Si c’est ça, je me disais, ma formation, mon influence, mon enfance (l’enfance de l’art), alors je ne suis pas perdu. Ah, oui : c’est pas la France (les problèmes de la France, ça va un moment… les tristes tronches des politiques occupés à dissimuler le plus possible leurs exactions). Emmanuel Demarcy-Mota parle de « miracle de l’art ». D’ailleurs, Pina Bausch le dit aussi, une citation que j’ai faite mienne : « peut-être des spectacles qui se situent entre la réalité et le miracle ». C’est de toute façon un miracle de revoir ces pièces somptueuses. C’est encore plus beau qu’à la création, je me disais hier (je n’avais pas le souvenir d’une pièce majeure). Beaucoup de renouvellement dans la compagnie (pièce très dansée, sautée), mais des jeunes talents inouïs comme celui de celui qui reprend les solos de Dominique Mercy — ils les travaillent ensemble depuis trois ans —, danseurs extrêmes dans leur pleine beauté (les plus âgés, on est très étonné de leur voir des rides au cocktail...) 

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