Thursday, February 07, 2013

Tub

Sur un cheval



Toi et toi, qu’est-ce qui déambule ? 






Et je dessinais sur le sable un motif de tapisserie...

Oui, j’étais jeune et je ne rencontrais que ça, déjà des gens qui ne pensais qu’à ça, j’étais jeune et le trouble de ma jeunesse, c’était ça. On m’ouvrait des chambres. Les hôtels étaient évidemment pour ça. Mais, moi, jeune, je ne savais que faire de ces adulteries dont j’étais le rouage. J’étais jeune et ils ne pensaient qu’à ça.

Il y a ce bruit de portes qui passe et qui trouble, tous ces bruits de grincement et de lit et de toux, dans la couleur jaune des peintures refaites — ou bleue — ou mauve. Les hôtels étaient évidemment pour ça. 

L’odeur, sur cette côte méditerranéenne dans ce paysage décalé, à Sète, du pétrole dans le sable et sur les rochers qui forme des boules d’une matière comme le pneu ou la réglisse, si elle n’était liquide, pâteuse... Tout livre est dans le livre de la langue française.

C’est la première fois que je vois une femme nue. La femme nue, c’est un dessin que c’est la première fois que je le vois. 



Dans le grand vide, si on ouvre le visage comme un réceptacle, un sucrier, on écrit. On écrit quoi ? Ce qui vient, ce qui se recueille dans la coupelle, dans la conque. On écrit ce qui est déposé, on lit.

L’heure brève, elle est brève, elle chatouille, il faut se dépêcher. Il faut se dépêcher pour que toi-même, lui — et toi — brillent, comment dire ? brillent d’inexistence vivace. L’opacité, elle éclaire. Ce n’est pas la peine de redire, de transformer, mais elle éclaire. 

D’une certaine façon, Dieu existe. 
De même que la gentiane. 
D’une certaine façon.
Le temps des odeurs, le livre des odeurs, d’une certaine façon.

Dans les textes, on lit : « ... serra sa taille... passa la main... prit ses lèvres... une main sous la robe... une main avide sur ses seins..., etc. »

Dans la concomitance des mots, des mots et des choses et des animaux. Vous ne pouvez pas avoir un doute (rapport à — voir plus haut). Parce que, les mots, vous les avez écrits avant, d’autres que vous. Et si vous vous retrouvez là, devant la charcuterie Bataille, Georges Bataille, qui fait traiteur, alors, vous savez que, cette année-là, vous ne lirez pas, mais mangerez (même si la sauce est un peu chère).
Il y a tout comme si c’était fini. Sur les étals des marchandises, aux devantures, sur les seuils et à l’angle des rues. Là où on retire de l’argent, la où on descend une marche, là où on peut rouler dans une pente. 
Les pentes sont assez trompeuses car elles ne descendent pas toutes vers la mer. 
Parfois elles remontent, elles descendent pour remonter.

Maintenant vous vous tournez, où que vous vous tournez. L’heure a changé. Les mouettes, les mouettes d’été, la désorientation du vent, l’abîme. 
Maintenant ces églises désaffectées servant théâtre... Les pizzas, les morceaux dans la rue. Vous êtes libres, tout s’écoule, dégringole... C’est une drôle de ville, Marseille. Une drôle de vie, ai-je voulu dire en m’écoutant parler...






A l’angle rose des rues... Il fait nuit encore très tôt, tu ne sais plus quoi raconter, tu paniques, déjà l’été, il n’est que six heures.
Un chat ? Qu’est-ce que ce bruit ? Le bruit est un mélange de bruits — comme un parfum est fait d’autres parfums mélangés par un métier, parfumeur — bruiteur. Le chat dans la voiture, le mélange de bruits et d’odeurs. 

Ces voitures qui nous transportent, capables de traverser des pays. Des paysages inventés comme celui que je suis en train de rêver. Une fille et une église. 
L’église est un clocher, la fille est trapéziste. Si on parle, on dit tout. 
Faites-le avec confiance, il n’est que tôt. Même s’il fait nuit. La nuit respire, vous ne voyez pas ?
La fille est à la lune, à la terrasse. Elle ne sait pas. Là aussi, jeunesse. Et les adultes ne pensent qu’à ça. Mais les enfants ? La fille trapéziste anglaise parlant anglais, parlant français et javanais. Tu n’as plus d’âge, plus de nuées... Tu es, de loin, le long de la fille dans les rues.

C’est l’heure exacte et précise et l’on s’y précipite.



Lire et écrire, c’est un art qui terrasse. Vous êtes allongé, vous ne faites rien et vous ne pouvez pas vous relever : vous avez vieilli de 100 ans !
Les genoux surtout sont cagneux et usés par l’arthrite. L’arthrose. L’arthrite ou throse.

Filles femmes chattes, vous vous levâtes, vous vous touchâtes.
Devant mes yeux. C’était dans les années 2000. 
L’hiver sert à rêver le printemps. 
Rêver l’été, même si l’été est décevant. De quoi parlons-nous ? 
Vous m’entraînez, chacal ! 
(On ne peut pas toujours se réfugier dans le non-dit.) (Quelqu’un attend quelque chose de moi.)

Les canaux sont terreux, verdâtres, gluants. Vous vous faufilez. Verdâtres, gluants, terreux, nauséeux. Un certain plaisir — de ne pas pouvoir s’y baigner — tellement c’est sale. 
Eux qui n’avaient jamais dit, jamais vu...






Elle ne traversait pas encore mes rêves. Je l’aimais sans doute parce qu’elle était la seule petite fille du château.
Fausse campagne, anglaise. Dire, c’est ordonner le souvenir d’un cours de français.
Oui, n’ayez pas peur. (Je me parle à moi-même.) (Parfois la réalité fait peur — ou fait loi.) (La fausse lente réalité du temps perdu ou du temps proche.) Lointain et trouvé, c’est ce que nous voulons. Et, vous, lisez entre les lignes, lisez par transparence. Il faut aller vite, elle est morte. L’héroïne. 
Le film passe vite.

Vous avez dormi. 

Racontez le film. 

Allez...



Si je reprends, où voulez-vous vous retrouver ? En été, en hiver, dans la neige, en Angleterre ? Les plages du Pays de Galles, ça vous dirait ? 
C’est très beau. Il y a des moutons, des collines, du vert à tous les étages, des falaises émeraude. Voilà, si c’était un bijou : émeraude. 

Vous êtes en transparence, vous êtes sur le sable. Vous êtes dans l’eau, dans l’eau salée. Bikini. Maillot de bain deux pièces. 

Les poissons le frôlent comme le vent.

Vous lisez le livre et, à chaque page, vous commencez à comprendre que le livre change entre vos mains. Agnès entortillée à un jeune mécanicien.



Vous êtes dans la montagne. Nuit encore plus maligne, plus tôt. Nuit tôt. Personne ne dort (bien entendu). On vit. C’est éclairé (comme si c’était le jour, d’une certaine manière). Ton histoire que tu n’as pas racontée, certainement pas à ces psychiatres qui la boivent. Ton histoire de L’Amant, celle qui reste pour la fin de ta vie. 

La mort. 

On n’en parle pas. On ne veut pas en parler. Quand il s’agit de la mort, il s’agit de la mort. Mais, la plupart du temps, il n’y s’agit pas. Voyez, les maternités. 
Parfois, c’est le même service, vous accouchez, vous mourez. Paris. Paris ouvre ses expo la nuit. 
Vous attendez dans les couloirs. Vous attendez dans l’ombre. Affalé. Dans l’ombre ou dans la rue. Vous revenez le lendemain. New York. Vous ne quittez pas le musée.

Ce qui est important pour vous. Vous ne savez pas. Et ce n’est pas moi qui vais vous le dire. Raccrochez-vous à une croyance — pourquoi pas ? Cynisme clair. Désespoir joyeux. Choisissez votre secte ! Votre engeance, votre club, votre cercle. Nuées. Ce qui est important pour vous. 






Névrose
« Il aimait le risque, il ne voulait point de métier, il voulait l’aventure : une vie, pas un métier. Pour beaucoup, l’essentiel est de s’arranger avec la vie, de se cacher le plus vite possible, d’affronter la vie avec le maximum de sécurités extérieures. »






Vous avez cette possibilité, debout, fragile, de vous désaimanter de la vie quotidienne. 



Si vous vous entendez parler, vous vous taisez, mais si vous ne vous entendez pas parler... vous continuez... Rue des Saint-Pères, il y a... cette faculté de médecine, elle aussi dans la nuit, dans la nuit du soir... Et, à Berlin, qu’est-ce qu’il y a ? A Berlin, il y a aussi cette faculté de médecine dans la nuit du soir. Là, vous faites une rencontre. C’est rare. 
C’est une rencontre dans le parc. Le parc aux animaux. L’immense parc aux animaux dans l’une des plus belles journées de Berlin, à l’une des plus belles périodes de Berlin. Vous travaillez tard. Vous sortez, il fait déjà nuit.
Qu’avez-vous fait de votre journée ? La nuit s’ouvre. Toutes ces prêtresses...



Je ne veux pas fuir, je ne fuirai pas. Je dirai tout. Avant les vacances. Je ne serai pas paresseux. Dieu m’a permis de taper à la machine, alors je tape. Dieu a permis que je tape des roses. Alors, je tape...
C’est fatigant, ce tapis de roses. Mais à peine. Proust couché dans son lit.

Parfois, il manque des lettres, il saute des pages. Et c’est écrit. Malheureusement écrit. 
Lui, couché dans son lit dans cet immense espace qui est comme une conque sonore. Qui n’a pas de bord tellement c’est grand — et pourtant si, elle n’est que bord, en un sens, mais immense... Elle se déplace, elle se déplace avec ce mouvement de bateau de la mer (je voulais dire de la terre, je pensais de la terre, mais de la mer est plus beau...)

Dans le grand paysage, le seul, celui de la première fois, sans nostalgie, sans tristesse. Les épiques modernes — les épiques inventions moderne permettent la réception, la recension...

Il faut lire les romans comme s’ils n’étaient pas travaillés, comme si les romanciers n’avaient rien fait. Que les pondre. Et, en effet, c’est le plus juste. Comme s’ils ne les avaient pas travaillés (et retravaillés). Le non-travail qu’ils n’ont pas fait, souvent (ou bien l’éditeur qui réécrit), il faut le faire à leur place, le lecteur le peut.
Tous les lecteurs sont des enfants. 

Et, au final, écrire serait le désespoir. Mais peu importe. Je vous aime sans m’éloigner de vous.

Sur la violence, rien à dire. Tout est dit.

Les repas se dressaient comme des oasis.

Si je suis fatigué, changerai-je de livre ou continuerai-je jusqu’à l’épuisement, la tombe ? 
Vous n’êtes pas venu au monde. Vous parlez faux. Vous êtes fatigué. Toute ces stratégies pour aimer. L’amour n’est que stratégie. Et écrire, écrire vite, lors de la vie. 

Ces étoiles.

Sur le pont, sur le pont de la Loire...



« Dans l’être aimé, il arrive souvent qu’on ne s’éprend que de l’amour. »



« Souvent je rêve sans raison, cela vient tout doucement, cela repart tout doucement. »



Déjà elle se courbait sous des caresses invisibles.



Vous savez, il ne vous ai jamais rien arrivé dans la vie. C’est une illusion. (« Je mange une illusion. ») Si vous alliez plus profond en vous, plus profond, sur ce chemin du cinéma, si vous y alliez, encore une fois, sur ce chemin... rien ne vous y oblige... Ce que vous pouvez toucher par la main n’est pas tout à fait ce qui intéressera le lecteur.
— Qui entre dans votre vie, c’est-à-dire dans la littérature sur un vélo.

Les livres, les livres que nous désirons...

Ses longs cheveux blonds se déroulaient sous sa tête dans l’eau lumineuse-à-demi, comme de fins tentacules.

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Jeunesse dorée (4)

« Mais le travail d’un spectacle de la Compagnie Louis Brouillard ne s’amorce-t-il pas bien en amont des représentations, quand les futurs spectateurs se mettent à rêver librement à ce qu’ils vont voir ? »

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Jeunesse dorée (3)

Acteurs inconnus



On travaillait encore sur les images d’Avenue Fuck. Comme c’était long... Marie était très contente d’un système qu’elle devrait breveter. Elle utilisait des photos que j’avais faites et elle les fondait l’une dans l’autre (et parfois dans la même) grâce à d’infinis fondu-enchaînés, ce qui donnait une chose d’ultra-contemplation qui ne ressemblait à rien, au sexe et à tout. Elle appelait ces espaces les « Richter ». Il y avait les traces sur les murs, la pièce au miroir, les tapisseries, les draps, tout était sexe. En fait, tout était sexe, quand on avait le sexe en tête, tout était sexe, la moindre fissure, la prise femelle, l’eau du marbre, le trou... Elle me disait : « En fait, on pourrait dire que t’inventes le porno contemplatif. » « Allo, bonjour Madame Vachette... », l’interrompait son dentiste. Madame Vachette ! On parlait de son nom merveilleux (qui était un problème quand elle était petite, mais qu’elle aimait bien depuis qu’elle était grande). On nommait d’autres gens, comme ça, avec des noms imagés : Max Potiron, Marion Abeille, Charles Chemin, Gwenola Wagon... Marie voulait à tout prix que je rajoute à la liste une amie à elle, ou une amie d’amie, ou, plutôt, si mon souvenir est bon, une ennemie d’amie — oui, c’était par méchanceté —, enfin, une fille qui s’appelait Sophie La Bite ! Bon, mais je ne la croyais pas. Sophie La Bite ! C’est du niveau des blagues de Samuel Beckett ! A propos de blague, « Dior Homme », à l’envers, ça fait « hémorroïdes ». Si, si. Emmohroid. J’avais vu Patricia Brulhart avec qui je fais qqch qui s’appelle la méthode Grinberg et elle m’avait parlé du « point zéro », en physique quantique, c’est-à-dire ce point qui permet de n’être ni purement dans une chose ni purement dans une autre. Par exemple un trou noir, on dit maintenant qu’il n’est pas vraiment noir (mais gris) puisqu’au niveau quantique, avec cette loi du point zéro, il y a quand même des échanges, des choses qui sortent du trou noir. Beckett : « Il fait gris que tu as dit, gris ? (C’est l’aveugle qui parle.) — Noir clair ! Dans tout l’univers. » Patricia m’avait demandé aussi ce que je pourrais faire si je ne faisais plus comédien (comme ça se profilait), j’avais dit : « la nature, m’occuper des animaux ». Et, le soir, Marie m’emmenait voir un film qui s’appelait Bestiaire, de Denis Côté, un Québécois, avec « acteurs inconnus », comme disait AlloCiné. Elle me disait : « C’est la même chose que ce que tu fais avec le sexe, sauf que lui, c’est avec des animaux ; c’est contemplatif. » Le réalisateur qui présentait son film parlait de « livre d’images ». Il disait aussi (quand, plus tard, il y avait le débat) qu’il fallait « trouver une solution hypnotique au film ». Il avait beaucoup travaillé le son. Il avait demandé à l’artiste — ou l’artisan — qui travaillait avec lui : « Fais planer une menace sur tout le film. » C’était le son qui inventait ce hors-champ de la menace qui n’existait pas dans les images. Il l’avait fait parce qu’il pensait qu’il fallait amener une fiction pour que son film soit supportable pour le spectateur — et qu’il ne soit pas un documentaire — de toute façon, il ne croyait pas aux « documentaires ». Il disait aussi que sa vision du zoo n’était ni bien ni mal, il s’en fichait des zoos et des animaux, il n’aimait ni ne détestait les animaux, d’ailleurs, mais, lui, sa vision du zoo, c’était que c’était un endroit « absurde ». Et, en effet, j’avais pensé à Beckett pendant tout le film. Moi, j’aime beaucoup les animaux — et j’avais aimé ce film absurde... 

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