« Toujours, ils disent : « Et vous vous proposez quoi, alors… » A chaque révolte, à chaque insurrection contre un dictateur, la même question. Et nous, on reste un peu bloqués, un peu ennuyés, pendant qu'ils alignent « le chaos en Libye », « Daech en Syrie », « l'extrême-droite en Amérique Latine », et les pires catastrophes sont notre faute bien sûr, dangereux naïfs que nous sommes, à soutenir des rêves de liberté qui bien sûr finiront mal.
Ennuyés parce qu'on ne sait que « proposer ». Ennuyés, parce qu'on ne se refait pas si facilement, qu'au fond de nous, le colon, pas le méchant, non le gentil qui sait comment faire le bien, est toujours un peu là.
On est français tout de même, on a inventé les droits de l'Homme, la manière de s'en servir, n'est ce pas ? Alors on a une responsabilité, la solution, c'est à nous de la trouver, le simple soutien, non, ce n'est pas assez.
Mais si. N'avoir rien à proposer, juste soutenir les aspirations à la liberté. Se détendre, le reste ne dépend pas de nous.
Rien ne dépend de nous, si ce n'est nos propres luttes, et en finir avec la posture stratégique, la posture géopolitique, experts de rien, et après ?
Après, faire le pari que l'histoire n'est jamais finie. Parce qu'en face, le fond de l'idéologie est toujours celui-là, le pire des conservatismes caché sous la rhétorique anti-système.
Avec eux, le pire n'est jamais si mal, au regard des catastrophes à venir, si on soutient les vents qui soufflent contre les bourreaux. Prophètes des dictatures éternelles, car sinon après elles, le chaos. Elitisme assumé se parant des oripeaux des révolutions passées, et pourtant ceux-là auraient hurlé « Et après, bande de fous ? », le soir de la prise de la Bastille.
Et d'ailleurs ici, tant ils sont forts, nous, on ne prend rien du tout, par les temps qui courent, ça reste assis, et de sermonner le monde qui se lève, en ayant le culot, pour certains de se dire insoumis »