Saturday, November 14, 2015

D euil national, mon cul !


Absurdité des attentats. Horreur. Et deuxième absurdité. L’état d’exception. Première mesure : la municipalité lyonnaise ferment les théâtres. Pourquoi ? C’est nous, les coupables ? On est puni ? Mais, ce qu’ils ne savent pas, c’est que leurs théâtres, ce ne sont pas des théâtres, ce sont des hôpitaux. Même en temps de paix, ce qu’ils appellent le « public » arrive dans un tel état que c’est « soigner », ce que l’on fait. Ce n’est pas du spectacle (mais c’est justement ça que la société ne supporte pas : qu’on n’en fasse pas), au minimum du « théâtre thérapeutique ». En temps de guerre, la dépression augmente d’un cran. Comment lutter contre la dépression ? Les politiques (« politiques », vous entendez que je l’entends au sens d’« incapables ») ont la solution :  enfermer la population devant sa télé. Enfermer la population devant sa télé. Ça qui soigne. Dimanche, il y a quinze jours, il y avait quinze personnes au théâtre du Point du jour pour la deuxième avant-première de La splendide actrice. Quand il y a quinze personnes, ça ne s’appelle pas du « public ». Ça s’appelle des amis. Non ? Vous n’êtes pas d’accord ? La notion de public est une notion fausse : le public, ce sont des amis parce que, s’ils aiment le spectacle, ils deviennent des amis. Demain, nous jouons à l’heure indiquée en temps de paix, 20h, et si des amis passent, bien entendu que nous les recevrons. On ne va pas les repousser à coup de pied au cul, ces réfugiés. C’est si rare, en effet, d’arriver jusqu’à se percher jusque ici. C’est si rare un théâtre comme celui du Point du jour (je veux dire : ce qu’en a fait Gwenaël Morin), hôpital, oui. Hôpital du soir. Et nous essayerons de nous soigner les uns les autres. Sans la télé. Sans la police. Clandestins dans la vie, dans le temple. De toute façon, ce sera ça, maintenant, la vie : la dictature claire, l’horreur, et la clandestinité des destinées...

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L a très mauvaise nuit


Déjà, ça fait du bien d’aller au marché. On a honte, on n’ose pas croiser le regard des passants déprimés, honte de prêter le flanc, soi-même, à la dépression. On se répète des mantra : le « scandale de la vie ». On se dit qu’il doit y avoir une solution. Vivre : une solution. Et puis, au marché, les gestes, choisir, demander, sortir sa monnaie, « Passez un bon week-end ! » A la traversée du boulevard, un petit bouchon de voitures et de passants, une femme se fait klaxonner, elle dit « Connard ! » et je ne dis rien, mais j’ai le temps de penser comme elle (parce que, c’est vrai, les automobilistes, à Lyon). Mais, de l’autre côté, une femme sagement arrêtée sur la berge et sous l’indicateur fait remarquer que « pour nous, c’est rouge » et la femme qui a traversé lui répond — mais, là, l’accent lyonnais est important : « C’est vrai… Et je l’ai insulté en plus… J’ai passé une très mauvaise nuit… » Je repars plus heureux du plaisir de vivre (l’accent est important). Je pense que les comiques, les humoristes sont les sages car ils savent tout, ils savent tout ça. La compassion, c’est parce que l’horreur est déjà là. Je pense à Valérie Lemercier… « J’ai passé une très mauvaise nuit… » Gwen m’envoie un message : « Est-ce que ça va pour toi ? » Oui, rien à signaler jusqu’à présent (à part l’accident de Manou qui est tombée de scooter hier après-midi). César avait un ami au Bataclan, mais il s’en est sorti. Au moment des attentats de Charlie, j’étais au ski, au soleil, je priai pour rester loin de ça. Jeanne, bien sûr, était scotchée aux infos, on essayait de la dissuader, Bertrand et moi, je pense à elle, ce soir, très empatique. Je pense aux fragiles. J’étais plus fragile lors de l'attentat de Saint-Michel, je me souviens, ça avait été terrible. Pour les gens déjà déprimés, bien sûr, le plancher s’effondre… Et puis la nouvelle était tombée sur les petits écrans dans le paysage de neige, Philippe Lançon était touché.

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L a Guerre, la solidarité


« Nous continuerons de vivre parce que c'est ce que nous savons faire. »

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