Monday, August 23, 2010

Le Point du retournement vers la ville



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Le Film de Jean-Luc Godard

J. me reçoit dans sa maison de campagne, mais couverte de paillettes quand même. Moi aussi, j'ai mis mes plus beaux habits (enfin, les nouveaux), mais plus pour plaire aux adolescents... Maintenant, j'écoute sur le banc devant la maison, au milieu du village, en face de la fontaine tarie d'"eau non potable". J'écoute J. faire ses gammes au piano tandis que de l'autre côté (de la maison) hurlent à grosses voix les adolescents comme dans un film de Jean-Luc Godard. Maintenant, les cloches. Maintenant, la voiture qui passe à allure lente (les occupants me regardent) efface tout. Puis c'est l'enfant au T-shirt jaune et au casque bleu qui dévale la pente en vélo en sifflant - et la remonte - tandis que les cloches balancent à toute volée (sept heures), effaçant définitivement, dirait-on, les adolescents et enfouissant dans le coton le piano de J. Oh, à propos, la fontaine n'est pas tarie, il y a un robinet qu'il suffit de tourner. J'ai cru ça parce qu'on a mis des fleurs dans les bassins adjacents (les lavoirs). Il y a des animaux qui entourent le village : des cochons en haut, des vaches à droite, blanches et prenant la lumière rasante et fraîche. De l'autre côté, une vierge sur son piédestal a la même couleur (absence de) et regarde la vallée, la plaine en direction de Rome.

Caché en Bourgogne

Je suis dans une maison, une maison nouvelle. C’est la Bourgogne, ça regarde le paysage, il y a du bon vin. Je suis seul, J. et B. sont partis chercher les enfants, je suis seul avec la chatte et son petit d’une semaine.
Je suis frustré d’avoir laissé Frankenstein. Comme nous devons l’être tous. Le spectacle – très cher : vingt-cinq milles euros une représentation, vingt-six personnes à déplacer, cent cinquante nuits d’hôtel pour Salzbourg – le spectacle ne sera pas repris. Il n’a pas intéressé le public ou la critique. C’est un cas étrange. Non pas qu’il ne marche pas, ça arrive et il y a toutes les raisons d’analyser pourquoi, non, ce qu’il y a d’étrange (et de paradoxal), c’est à quel point nous avons eu du plaisir à être ensemble, toute l’équipe, spécialement à Salzbourg.
Il y a un livre de Virginia Woolf qui traîne. Un recueil de lettres : Ce que je suis en réalité demeure inconnu. J. a proposé, quand je suis arrivé, de nous en lire à haute voix, à B. et à moi. Quel cadeau ce serait !
Sur la terrasse, on a déjà parlé de Vincent Macaigne, de Bibi la truie, des dindons, de Marie-Thérèse Allier, de Marlène et de Jonathan (prononcer à l’anglaise), de la situation politique, du pape et des catholiques (à propos des Roms), de Charles Dickens, des enfants, de la maison, du vin, de projets fugaces et durables, de rien ; dans la voiture, on avait parlé de Mamie Zinzin, des enfants, de la région, de la souffrance et de thérapies, de la maison, de la prise d’otage (à propos de la maison) et de chantage au suicide de la mère de J. au moment du choix de la maison, du petit cirque, des esthéticiennes du village de Givry, du rôti, des bouchers, de l’équitation (aller chercher les enfants), d’Angelina Jolie, de Jean-Marc Adolphe et du Skite de Caen ; dans la maison, quand on est arrivé, on a parlé de la maison, de la chatte et de son petit, des autres morts de malformation, des pleurs des adolescents, de comment m’appellent les adolescents ("le metteur en scène des strip-teases") et J. a dit cette phrase que j’ai notée : "Ma théorie, c’est que c’est tes partenaires qui t’apprennent à jouer ; or je dois vous dire que le plus grand partenaire qui m’ait appris à jouer, c’est Bibi la truie."
Au cœur d’un petit village, des chambres immenses.

Hors-la-loi

Vincent raconte comment il a vécu un suicide dans le métro, il y a quelques années. Une femme, qu'il avait remarquée, en entrant dans la station, "au comportement étrange", avec des lunettes noires, s'est jetée, au dernier moment, devant la rame qui arrivait. Le cri d'horreur des gens amassés en même temps que leur détournement - et le bruit, comme de bois qu'on casse. Personne n'était allé "voir" ensuite. Les gens étaient lentement sortis de la station en état de choc. Lentement "gagné la sortie" en état de choc.
P. est dans un train de banlieue, E. a fait une tentative de suicide (médicament). P. ne voit pas de solution, de perspective ouverte. La mère de E. va venir la chercher, mais "haine de la mère".
C'est difficile de vivre avec la haine de la mère. C'est rare. (Surtout pour une fille.) Jean-Luc La Verna écrit sur Facebook :
"Le 24 août, je pense irrémédiablement à ma mère et j'espère qu'elle en chie grave."
C'est écrit très vite, avec des fautes d'orthographe, mais cette pensée n'est pas hasardeuse. Jean-Luc est le seul que je connaisse qui arrive à (sur)vivre avec, dans cette haine - absolue - de la mère.

C'était lui



Arié (van Egmond) me demande, comme souvent, un "raccord". Mais, cette fois, la dernière, j'ai l'idée de photographier.

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Jonathan Drillet

De : jonathilion@yahoo.fr
Objet : n,yug rez'é (mon chat marche sur le clavier)
Date : 23 août 2010 15:03:17 HAEC
À : yvesnoelgenod@wanadoo.fr



Il paraît que tu viens avec nous à Bussang ? C'est chouette. J'ai encore jamais été dans ce théâtre dont on dit que l'ouverture du plateau sur la montagne est, chaque été, le clou du spectacle et, peu importe le spectacle, c'est toujours le même clou, la montagne ! Et puis depuis qu'il a joué ma mère, je ne peux pas me passer d'aller voir Jean-Paul quand il est en talons.
Je suis de retour à Paris après la Bretagne. Je me prépare à l'arrivée du mois de septembre, je pense à nos projets Upsbd, Les Alligators, par exemple (et qu'en faire? Marlène veut faire un film, je veux faire une pièce, faudrait sûrement faire les deux alors !) et un nouveau spectacle "fin de race" où je fais François-Marie, le photographe qui parle d'art et d'assurances vie avec un petit minet très XVIIème, pendant que Marlène qui fait Liliane la milliardaire rit aux éclats avec sa bouée-canard comme dans "Paris Match". Angèle écoute aux portes avec un stétoscope, et Robin joue des bouts de Koltès, drapé de rouge dans une poursuite bleue-blanche. A moins qu'on ne demande à Marie-Thérèse Allier de jouer Liliane. Ce qui serait pas mal ! Dans ce cas, Marlène pourrait jouer à la fois Françoise la fille, Claire la comptable, Florence la conseillère fiscale, et quelques bonnes, aussi, bien sûr. Tout le monde est à moitié à poil, il y a toujours du champagne. Et pis on fait tout ça à la Patrice Chéreau. Il y a du boulot !
En attendant, je m'occupe de mon chat, qui est tout nouveau (il m'a empêché de dormir cette nuit tellement il jouait fort). J'écoute "L'histoire de Hanz le cheval qui savait compter" à la radio, et je m'occupe de trouver davantage de travail pour cette année qui arrive, qui n'en est pas très pleine encore (de travail). Et il va bien falloir ! (en trouver davantage).
Oui, je me suis dit que j'allais t'envoyer des nouvelles car j'ai l'impression, quand je lis ton blog, que tu m'en donnes de toi ! C'est toujours un plaisir de te lire d'ailleurs. Quand est-ce que tu fais une somme de tes articles pour l'envoyer à Gallimard ? Ou à Minuit. Ou à JC Laffont. A Christian Bourgeois, oui ! C'était beau ce que tu disais sur la Bretagne. Et sur les subventions aussi, c'était beau ! Les falaises bretonnes et le fric de la Drac, un beau mélange.
Bon j'y vais, à ce week-end alors, peut-être ?
T'embrasse,
Jonathan

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Basket



Photos Simon Siegmann.

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Les Antiapôtres

Toast

Joseph Chance, l'acteur le plus anglais et le plus clever que je connaisse, nous a ébloui d'un toast superbe dans cette cour de restaurant italien - avant l'orage frankensteinien - dans lequel nous étions réunis, nous les vingt-six, pour ce repas de dernière où le vin nous était offert.

(Je précise que ce repas, cette soirée, était une des plus merveilleuses qui soient car, bien que le spectacle ne soit pas passé auprès du public - j'y reviendrai - nous étions une équipe nombreuse qui nous entendions extrêmement bien.)

Or c'était aussi l'anniversaire d'Aurélie et aussi celui de Joseph Chance, cette dernière. Et Joseph, déjà saoul, mais plus clever encore, son intelligence décuplée, a levé son verre.

Il a dit en substance - allez, il faut que je m'en souvienne - il a dit... Il a cité Lord Byron, c'est ça, qui avait écrit quelque chose pour son trente-troisième anniversaire, puisque c'est aussi l'âge qu'il vient d'avoir... et l'âge du Christ. Si je retrouve ce poème, je vous le mets... Enfin, bien entendu, ce dernier repas ressemblait à la Cène... Et Joseph remarquait fort justement que nous n'étions pas treize à table, mais vingt-six et que cela correspondait au double, c'est-à-dire sans doute au même avec son opposé et que c'était fort bien car cela allait bien avec le travail de Claude, "the apostles and the antiapostles". Joseph a failli monter sur la table aussi comme il le faisait dans le spectacle, pour le clore, avec le poème Darkness. "She is the universe." Joseph Chance, notre héros, notre Byron ! Ne meurs pas in your own blood, dans ton propre sang. Jamais !



Le vin était un vin bulgare très efficace et joyeux, servi dans des gros verres ballon, Terra Tangra, un vin de la vallée de la Thrace.






Through life's road, so dim and dirty,
I have dragg'd to three and thirty.
What have these years left to me ?
Nothing - except, thirty-three.

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Joachim

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Belle du soir

"La vie, c'est une pratique, alors, il vaut mieux la pratiquer que l'étudier."

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Belles du soir

"Il y avait chez ce garçon un curieux mélange du primitif inachevé et du civilisé inachevé."

"Quand on sait lire, on ne regarde jamais un livre, même fermé sur un rayon, comme quand on ne sait pas lire."

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Spectres




Joseph Chance.

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Les Sondages

Mon frère s'étonne que je dise que je ne répondrai jamais à une demande de sondage. Et son étonnement m'étonne à mon tour.

Mais voici :

(Extrait - à venir - de l'article de Daniel Schneidermann dans "Libé" du 23.)

On ne peut pas lire Charles Dickens (The Mutual Friend) et répondre à des sondages.