A la librairie Tropismes, j'ai vu que Pierre Alféri avait publié un roman. J'ai lu quelques poèmes d'Anne Portugal sortis de
la formule flirt et puis j'ai lu une quatrième de couverture lumineuse (sur fond noir) d'Yves Bonnefoy qui commençait par ces mots d'une chanson fredonnée un jour par Arthur Rimbaud :
"Avène, avène,
Que le beau temps t'amène !"
J'ai trouvé, dans ce même léger volume, quatre vers de Charles Baudelaire :
"Je pense à la négresse, amaigrie et phtisique,
Piétinant dans la boue, et cherchant, l'œil hagard,
Les cocotiers absents de la superbe Afrique
Derrière la muraille immense du brouillard ;"
J'ai regardé encore le volume, court lui aussi, d'Anne Portugal. Par exemple, ce vers :
"dodu ciel si l'on y cultivait".
Ou encore :
"du bois l'air l'herbe partagée et la pluie crayon".
Ou :
"sur un papier l'échange à son ami sauvage".
J'ai finalement décidé d'acheter le volume simple d'Anne Portugal, il n'y en avait qu'un à disposition, comme dépareillé (sur la table des nouveautés). Au moins ai-je décidé pensé l'acheter, voire même seulement pensé écrire cette décision sur le carnet Moleskine que j'avais, là, dans l'un des sacs en plastique blanc, parmi les fraises, la mimolette extra-vieille, le jambon aux herbes, "Le Point", le bicarbonate de soude.
Puis dans une
Anthologie de l'OuLiPo, j'ai lu :
"Je t'aime à ne savoir quoi dire
Dire qu'il y a des gamins qu'on cogne".
Dans l'air, Barbara chantait
Marienbad, "...grands oiseaux de jade... au cœur de vos dédales..." et j'ai aimé l'art, j'ai aimé les signes (ou peut-être seulement aimé écrire cette phrase). A un moment, au moment de vous l'écrire, il m'est venu des larmes aux yeux. (Je m'aperçois à présent que j'avais écrit "cygnes" dans le carnet de moleskine noire.) Au sous-sol de la librairie, j'ai lu cette phrase d'une nouvelle de Jorge Luis Borges :
"L'homme oublie qu'il est un mort qui converse avec des morts."
La quatrième de couverture de ce volume intitulé
Le Livre de sable disait aussi :
"Je n'écris pas pour une petite élite dont je n'ai cure, ni pour cette entité platonique adulée qu'on surnomme la Masse. Je ne crois pas à ces deux abstractions, chères au démagogue. J'écris pour moi, pour mes amis et pour adoucir le cours du temps."
Borges, mon amour, ai-je pensé (ou ai-je écrit). (En le recopiant, je pense aussi : J'écris pour être
non lu.) Et je me suis assis (puisque un salon m'y invitait) pour ce qui avait porté mes pas jusque là, lire
Les Ruines circulaires, la nouvelle de Jorge Luis Borges rapport à
Frankenstein (rêver un homme). Et maintenant la bande-son diffusait une version française de
Vamos a la playa d'une voix masculine et si sensuelle comme ils savent faire...
"L'homme, un jour, émergea du rêve comme d'un désert visqueux, regarda la vaine lumière de l'après-midi qu'il confondit tout d'abord avec l'aurore et comprit qu'il n'avait pas rêvé."
Labels: frankenstein bruxelles