Le prof. Le prof a une scène
et une vision du monde. Il est plus mordant que Fabrice Luchini. C’est facile,
il a un public de débutants en español : on est prêts à être malmenés comme des
bulles de savon (« pompas de jabón » ; bulle de bd : « burbuja »).
Bon, des exemples. J’ai le cerveau lessivé, mais il faut que je note car demain
sera pire (et ce n’est que le premier niveau). Qui a dit que l’español était
facile ? La Vietnamienne a annoncé il y a qq jours qu’elle redoublerait ;
du coup, on ne l’entend plus et on lui fout la paix (faire la paix : «
hacer las paces con » (au plur.), vivre en paix : « vivir en paz
con », avoir la paix : « tener paz »). « Acostar »,
c’est coucher, « acostarse », se coucher, et « follar », c’est
baiser, mais « acostar », c’est aussi baiser (coucher dans le sens de
baiser). Ce soir, je comprends l’allusion du prof qui nous fait deviner les
mots (il adore ! on se souvient de « la messe est dite »...) —
donc « acostar » ? Accoster ? « Oui, dit-il, accoster peut
mener à acostar… » Voilà l’esprit. « Costar », c’est coûter.
« ¿ Cuánto cuesto el libro ? » « ¿ Cuánto cuesto el consolador ? »
Qu’est-ce que peut vouloir dire el « consolador » ?
Certains osent le « mouchoir », d’autres le « doudou »…
et, de fil en aiguille, on en arrive au vibromasseur ou godemiché, le dildo,
quoi ! L’art de manipuler les foules. « Consolar », c’est consoler.
« Consuelo », c’est « je console ». Mais c’est aussi un prénom,
je fais remarquer. Oui, surtout en Espagne, un prénom démodé, mais enfin, oui. Et le
prof nous explique ces prénoms étranges, « Consuelo », « Milagros » (les
miracles), « Remedio », « Purificación »… Il y
avait à Formalangue une prof qui s’appelle Purificación et qui se
faisait appeler Puri, diminutif, mais elle y avait renoncé et était revenue à
son nom complet (et si étrange) parce que, dans la bouche des petits Français... Ces prénoms viennent de la Vierge qui dit : « je
console », la Vierge Marie des miracles, la Vierge des remèdes (Maria
Remedio), la Vierge Marie de la Purification, etc. Puis le prof dit, je ne sais
pas à propos de quoi : « Te muestro el culo » : je te
montre mon cul. « Recordar », il s’amuse parce que, tous comme un seul
homme, là, on a dit que c’était clair, c’était : enregistrer. Non : se souvenir.
Il dit : « Recuerdo esa puta canción ». « Inolvidable ».
« Para enamorarse » : pour tomber amoureux. Quelqu’un chante :
« Enamorame… » (fais-moi tomber amoureux…) « Rogar » :
prier de, « Te ruego sentarte sobre mis rodillas » « Mis
rodillas » ? Genoux. Ouf, échappé au pire. Mes roubignoles ou je ne
sais pas quoi… « Acostumbrarse » : s’habituer. Ex : « Haces
eso para acostumbrarte a mis besos fogoso » Et il illustre la situation en
proposant d’imaginer que c’est DSK qui dit ça, « …à mes baisers ardents ».
Puis on change de registre : « Jean-Marc gobierna durmiendo »
(Jean-Marc gouverne en dormant). « Negar », nier, « Negarse »,
refuser. Ex : « Me niego besar a ese camello ». Pas
parce que c’est un camello, ajoute-t-il, parce que c’est un « camello feo »,
un camello moche. « Sentar », c’est asseoir, « sentarse »,
s’asseoir, mais « sentirse », c’est se sentir ; ce qui donne
la phrase réversible : « Me siento bien cuando me siento bien ».
Une facilité : « contar », c’est compter, mais aussi conter. «
Contar el chiste », raconter une blague et alors le prof se met à raconter
une blague, c’est un type qui rentre dans une librairie et qui dit : Je voudrais
un livre d’Ernest Hemingway et le libraire lui répond : Il y a Le vieil
homme et la mer et l’autre lui dit :
Je vais prendre La mer, pour l’instant.
Elle est pas mal, cette blague… Puis il dit encore : « ¡ Hijo de mil
putas ! », fils de mille putes ! — et je dis : c’est joli…
Ce n’est que la moitié du cours. Mais après la pause, on est des légumes. C’est
intensif.
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