J’émerge peu à peu-je vais
émerger. J’écoute la radio (l'émission d'Arthur Dreyfus que je ne connaissais pas) et le soleil commence
à fuser, percer, quel est le mot ? jusqu’à l’ordinateur, jusqu’au cœur,
jusqu’au crâne (Comme crâne, comme culte). C’est une émission de
chansons. Ma maison est un lac, mais c’est presque un jardin… Je suis dans l’imaginaire du jardin, en ce moment,
et je m’inquiète : l’imaginaire suffit. Philippe Gladieux me dit qu’il est dans la
forêt de Fontainebleau. Il est allé présenter sa fille à sa tante qui est dans
un couvent. Il se promène maintenant dans la nature épaisse. Il m’envoie une
photo, espèce de jardin zen avec les rochers. J’ai la gueule de bois parce qu'hier, je suis resté au moins jusqu’à quatre heures à parler avec Dominique Mercy, il y avait un
espace qui s'est ouvert. Je crois, peut-être pas au début, il avait envie
d’être avec des amis plus intimes, mais finalement
j’étais aussi l’ami intime. Boire ensemble. Ce serait très difficile de dire à
ceux qui ne l’ont pas vécu ce qu’il s’est passé avec 1980, une pièce de Pina
Bausch. En tout cas, Dominique Mercy était plein de
confidences. Il disait souvent : « J’ai l’air de révéler un secret,
mais… » ou : « Puisque nous
sommes sur le registre de la confidence… » Comment partir, comment ne pas
boire ? Nous sommes vivants, nous sommes amis. Le bonheur de la vie, à
partir d’un moment, c’est de voir qu’elle continue. Nous étions déjà là, 1980
(j’avais huit ans). Et nous
le sommes encore – 2012. Trente-deux ans nous séparent d’une absence de
distance. J’ai appelé Claude Régy pour son anniversaire, le 1er mai. Il va retravailler avec des
acteurs très anciens. Le retour de Yann Boudaut, de Nichan Moumdjian, d’Olivier
Bonnefoy. C’est étonnant. J’admire aussi beaucoup
la fidélité de François Tanguy, mystérieuse. Mais ce mystère, c’est 1980,
une pièce de Pina Bausch qui le
montre le plus, qui le fait ressentir. Déjà, à l’époque, la pièce disait la vie,
et, maintenant encore, elle dit la vie. Dominique Mercy, pendant la nuit, chantait de temps en temps des
extraits d’opéra avec Nicolas Johnson et… – son nom m’échappe, réalisateur, son ami… –
il est vrai que j’étais aimanté comme depuis toujours par Nicolas. Il y avait
aussi un violoncelliste russe un peu froid qui s’appellait Alexandre. Comme j’ai déjà un
Alexandre dans ma vie – là, en ce moment – j’ai proposé de l’appeler Sacha. J'ai demandé à Jane
Birkin si elle n'était pas libre. Mais, non, elle ne l’était pas, évidemment, Jane, très
gentille, très belle – le fameux secret du sourire. La nuit, la lune, le ciel
sont des jardins inversés. Maintenant, la petite était fatiguée et elle pleurait. « Mais, enfin, c'était Demarcy-Mota, c'était le directeur de ce théâtre, je ne pouvais pas ne pas lui parler… », disait Valérie Dréville. La petite avait aussi désirer très fort les chocolats de Dominique, un cadeau que maintenant Dominique recouvrait soigneusement avec une serviette de papier pour que personne n'en fasse autant ni ne les lui vole.
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