Tuesday, February 02, 2010

"Je hais la Suisse", par Yann Moix

Je hais la Suisse.

Roman Polanski, nous venons de l’apprendre, va passer un an de plus dans sa prison suisse. Je dis bien : « prison ». Une prison, ce n’est pas strictement un cachot avec des rats. Une prison, c’est tout prosaïquement un endroit dont on ne peut sortir. D’où on ne peut pas s’échapper. Peu importe que la prison soit une cellule ou un chalet, un terrier ou même un immeuble tout entier. On est en prison quand on ne peut pas être ailleurs. Roman Polanski restera emprisonné en Suisse : c’est la Suisse la prison. C’est la Suisse le bourreau. C’est la Suisse la sentence. C’est la Suisse la trahison. C’est la Suisse la haine et la revanche et la vengeance. Parce que la Suisse n’est pas un pays : la Suisse n’est rien. La Suisse n’existe qu’en détruisant. En neutralisant. Ce n’est pas un pays neutre, non : c’est un pays qui neutralise. Très joli pays qui, pendant la guerre, voyant qu’un peu trop de juifs venaient étrangement faire du tourisme en ses montagnes, a demandé à ce que fût apposé sur les passeports le « J » de Juden. La Suisse n’est pas un pays neutre : c’est un non-pays vendu. La Suisse, ce pays des horlogers, sait manier le temps comme Satan : enfer du temps dans lequel elle neutralise un génie (un an de plus), enfer du temps à l’intérieur duquel, avec une infinie patience, elle guette sa proie : trente-deux ans pour attraper Polanski. La Suisse n’existe pas : pour exister, elle est obligée de faire dans le sale, dans le crade, dans le porno. La Suisse est un pays pornographique. Sales affaires (comptes bancaires, fiscalité), sale comportement (arrestation de Polanski) : tout est propre dans les rues suisses, dans les montagnes suisses, dans les vallons suisses, tout est très propre parce qu’au fond tout y sale dans les tréfonds, dans les fondements, dans les soubassements. C’est un pays qui se vend sans cesse au plus offrant. Qui courbe incessamment l’échine devant le plus fort. C’est un pays qui fait basculer les choses vers le plus dictateur, le plus violent, le plus menaçant. La Suisse ne se donne même pas, comme le feraient des salopes ordinaires : la Suisse se prête au plus fort. Elle prête sa soumission. C’est une pute. Elle ne se donne jamais mais se prête toujours. Elle se prête avec intérêt. Elle se loue. Elle se sous-loue. Elle fait des offres. Elle écarte les jambes quand viennent à passer un officier nazi, ou une très grande puissance comme, par exemple, aujourd’hui, nos amis les Etats-Unis.

La Suisse n’est pas un pays neutre : c’est un non-pays vendu. La Suisse, ce pays des horlogers, sait manier le temps comme Satan : enfer du temps dans lequel elle neutralise un génie (un an de plus), enfer du temps à l’intérieur duquel, avec une infinie patience, elle guette sa proie : trente-deux ans pour attraper Polanski. La Suisse n’existe pas : pour exister, elle est obligée de faire dans le sale, dans le crade, dans le porno. La Suisse est un pays pornographique. Sales affaires (comptes bancaires, fiscalité), sale comportement (arrestation de Polanski) : tout est propre dans les rues suisses, dans les montagnes suisses, dans les vallons suisses, tout est très propre parce qu’au fond tout y sale dans les tréfonds, dans les fondements, dans les soubassements. C’est un pays qui se vend sans cesse au plus offrant. Qui courbe incessamment l’échine devant le plus fort. C’est un pays qui fait basculer les choses vers le plus dictateur, le plus violent, le plus menaçant. La Suisse ne se donne même pas, comme le feraient des salopes ordinaires : la Suisse se prête au plus fort. Elle prête sa soumission. C’est une pute. Elle ne se donne jamais mais se prête toujours. Elle se prête avec intérêt. Elle se loue. Elle se sous-loue. Elle fait des offres. Elle écarte les jambes quand viennent à passer un officier nazi, ou une très grande puissance comme, par exemple, aujourd’hui, nos amis les Etats-Unis.

Je hais la Suisse. Sa gentillesse méchante, sa dégueulasserie bonbon, son calme rempli de dagues et de couteaux, sa surface polie mais comme une lame. Nous voudrions que ce pays relâche Roman Polanski, s’excuse, arrête tout. Nous voudrions que la population suisse ait honte, définitivement honte, pour ce qu’elle fait endurer à Polanski. Que des grèves se déclarent à Genève, à Lausanne, à Gstaad, ou des manifestations. Que les gens sortent dans la rue. Crient. Hurlent. Contre leur « gouvernement ». Autrefois, Alfred Jarry disait (c’est dans Ubu Roi) : « la scène se passe en Pologne, c’est-à-dire nulle part. » Nulle part, ce serait plutôt la Suisse. La Suisse voudrait empêcher que le réalisateur de Chinatown (que je viens de revoir cette nuit et qui est un chef-d’œuvre) continue de nous donner des œuvres d’art. Pourquoi, Suisse, ne laisses-tu pas cet homme partir ? Parce que tu as peur de l’Amérique ? Parce que tu trembles ? Parce que tu suis toute cette meute ignoble, parfaitement aveugle, et qui veut que Polanski représente, pour la nuit des temps, le pédophile par excellence ? Qu’il en soit l’incarnation, le parangon, l’icône ? Suisse, sois digne pour une fois dans ta vie. Suisse, donne-toi une dignité en rendant la sienne à un des grands génies du cinéma qui a suffisamment payé pour quelque chose qui ne s’est pas déroulé comme on le sait, le croit, croit le savoir. Suisse, sois une nation, sois un pays, sois quelqu’un. Sois un homme, Suisse.

Quand il y a la guerre, Suisse, tu te carapates. Tu regardes tes chaussures. Tu vas tranquillement te promener en montagne. Tu respires le bon air parmi les gentils (petits) oiseaux. Rien n’est ton problème, Suisse. Tu n’es jamais concernée. Tu n’es jamais impliquée. Tu n’es jamais inquiétée. Tu n’es jamais là quand on a besoin de toi. Tu es toujours là, sur la planète, mais tu ne sers à rien : tu arrêtes les artistes et tu enrichis les enrichis. Tu ne sais rien faire, sauf pitié. Je te hais, Suisse. Je te demande de m’arrêter, moi, aussi, le jour où je viendrai te voir. Pour cracher sur ton sol immonde.

Yann Moix

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J'ai pas d'espace. Pas d'espace fuit. Les lèvres bleus. A l'or l'orange bleu.

Cherche un acteur inconnu pour jouer

Rework of Dawn

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A l'intérieur il y a tout cet espace de la respiration, ça ne va pas être facile, situer tout cet espace en soi - soi qui est soi qui est torse. Il y a le toucher de partout et même les mots - touchent. (Ce n'est pas qu'on place la poésie comme une chose à part.) C'est à dire...
Neige - maison s'il y a un intérieur. Rieur.

Samedi 05 juin 04



On remarque aussi, si on agrandit l'image, dans cette image en forme de cœur, deux mots importants pour moi : Borges et Di Fonzo Bo.

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Très belle de nuit

"Nuit est le contraire de ton visage : tu disparais et je m'adosse comment."

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Belle de nuit

Et pourquoi l'acteur ne le disait-il pas ? - ou peut-être le disait-il mais je ne savais pas entendre... Pourquoi l'acteur du monologue célèbre ne le disait-il pas, lundi - un lundi en vaut bien un autre : "Le monde est la somme de ces deux sortes d'écoulements, rien d'autre : ce qui est + ce qui n'est pas." Ou peut-être le disait-il...

Si l'acteur a envie de continuer, il faudra que je lui donne ce texte intitulé torse :, page 34.

Les écoulements, les trains, les fleuves, les écoulements de ce qui est + de ce qui n'est pas...

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Belle du soir sortie du livre des merveilles

"Tout ce qui passe comme un rêve - le temps, le langage, la mort - les stoïciens l'appelaient incorporel."

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Le mot frère

Totalement ébloui par le livre de Stéphane Bouquet emprunté à la Ménagerie, je dois dire, dont je ne pourrais parler qu'en le recopiant ou en le paraphrasant - c'est à dire - bien entendu que je le conseille - mais il s'agit du mot rencontre, comme il dirait. Ça fait plusieurs années que j'entends parler de lui - mais, l'ouie, il faut qu'elle s'ouvre - encore une fois, une nouvelle fois, estomaqué par les moyens incroyables de la poésie pour capter la vie - j'ai l'impression d'y être, dans ses histoires (ça m'en rappelle un autre, ça) sur le terrain de cricket en Ecosse avec le pollen des cheveux du garçon blond ou avec le kingfisher au bord de la rivière totale...

Sinon, mon père, tant qu'à parler de moi, il m'écrit son enthousiasme pour des promenades à ski de nouveau (il s'est fait opéré de la hanche il y a six mois), il cite Montesquieu qui a la chance d'une pensée heureuse à chaque réveil... et il finit en s'écriant (et en faisant signer ma mère) : "On t'aime, grand fou !" Je ne dois pas être le seul à pourtant espérer l'être moins que ses parents...



Psychanalyse du lendemain : Je ne crois pas être le seul à espérer être moins moins fou, mais aussi peut-être moins grand que ses parents... Parce que "p'tit fou" ne m'aurait pas frappé autant, je pense.

Belle du soir

"Pour moi, le théâtre, c'est la boue."

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Cherche des acteurs pour jouer un spectacle intitulé

Troupeau de cygnes

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Sur le site de "Télérama"

"...Me reviennent encore la grâce presque toxique du danseur et chorégraphe Raphaël Cottin, ou le geste diaphane d’Yves-Noël Genod, ou le déhanchement du grassouillet Thomas Lebrun…" (Daniel Conrod.)

On retrouvera les deux derniers dans le spectacle intitulé LIBEREZ POLANSKI, les 18 et 19 février au Théâtre Grütli à Genève où Yves-Noël Genod proposera de se livrer à la place de l'atroce délinquant (et d'avouer tout) tandis que Thomas Lebrun devrait, habillé en miss Gruyère, réinterpréter quelques sketchs de Zouc ou raconter l'assassinat de Sissi.

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Belle de jour (proverbe suisse)

"BIENVENUE SUR LE NOUVEAU SITE DES BAINS DES PAQUIS, VOICI NOTRE PHRASE DU JOUR :

L'eau renversée est difficile à rattraper."

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Marlène Saldana et Bernard Genod jouent devant des handicapés

(ou l'empathie)

(On dirait aussi un spectacle de Sophie Perez.)
(Ou La Danse de mort de Strindberg.)



Photos Yvette Louis.

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