C’est chouette, Gwénaël Morin – la vie parisienne (3)
C’est chouette, Gwénaël Morin
« Le bagne ? On s’en évade. »
J’ai vu Gwénaël Morin ; j’ai dit : « C’qui m’plaît, c’est qu’y a pas une tapette. »
Cet Albert Camus, quel baiseur !
« Ne pense pas au suicide. »
« Pour se suicider, il faut s’aimer. »
« La révolution, bien sûr, mais la révolution pour la vie. »
C’est bizarre, ces Russes qui parlent français (ces Russes révolutionnaires), c’est parce que c’est traduit. La pièce est traduite du russe par Albert Camus.
Quel baiseur, cet Albert ! (Cet Albert K.)
« La haine me viendra au bon moment (et m’aveuglera). »
C’est beau les néons qui scintillent dans la nuit (quand ils sont éteints).
« Alexi, vite. »
Je pensais à cette expression (stupide), « l’épaisseur du silence » (Daniel Larrieu) : y a pas d’silence, y a pas d’épaisseur et, pour moi, c’est d’la danse. Total – désolé : total. La danse des comédiens est incroyablement plus dense que la danse des danseurs. Pour une fois je suis d’accord avec Christine Angot : « les danseurs avec leur corps idiot ».
« Je n’ai pas vu la grande duchesse, je n’ai vu qu’eux. »
J’aime Gwénaël Morin parce qu’il me laisse faire autre chose. Il me laisse écrire dans mon carnet. Il n’y a pas de silence ou très peu et pourtant l’épaisseur est dense.
« Autrefois j’allais comme le vent. »
J’aime les responsables.
« Pourquoi fermes-tu les yeux ? »
« Eh bien, c’était pour mieux imaginer la scène. »
« T’es une femme et t’as une idée malheureuse de l’amour. »
La bonne humeur, la bonne disposition qu’il faut pour aller au théâtre… Surtout en France ! La tête des endormis au Théâtre de la Bastille ! Ils « écoutent religieusement ». Qu’est-ce qu’il y a à écouter ? On entend tout. (C’est ça qui est tranquille : il n’y a rien à écouter, on entend tout.) – Et c’est d’la danse ! –
Quel baiseur, ce Camus.
« Ah, Les Justes, Les Justes, eh bien vous êtes guère justes, vous êtes vraiment limite ! »
« Quand je dis « Silence. », tout le monde fait silence. « Noir. », c’est silence ! »
« Et c’est valable pour tout le monde ! »
Ils jouent la pièce dans le noir.
Ils sont bien, ces crétins sur scène – il est intelligent, le Gwénaël ! Tous ces hommes qui gueulent, quelle merveille ! Ils ont des voix sublimes et ils ne les ont pas cassées. Y a-t-il un training ? Sans doute pas. Du sperme partout. Quelle partouze de oufs !
« Stéphane, personne ici n’est de ton avis. La décision est prise. »
C’est drôle, il y a l’histoire des clous que j’ai vue passer par mail (Gaétan Palourde). Not every object used to nail is a hammer.
Je prétends qu’une pièce est bien dès le premier jour du travail. Je prétends qu’un spectacle est bien dès le premier jour du travail. Je prétends qu’il n’y a pas de répétitions.
Ce qui est bien aussi chez Gwénaël Morin, c’est qu’ils ne cachent pas la pauvreté de leurs moyens. Ils ne cachent pas la vérité : que quatre-vingt-dix pourcent de l’argent de la culture, des subventions de la culture payent le secteur tertiaire et que les artistes sont pauvres comme Job. Les vrais artistes. (Et je rigole car vous savez les noms, des faux artistes, les noms que la censure m’empêche ici de nommer. La censure, ici, sur le blog. )
Un homme en noir avec un sac noir (sur la tête) comme s’il allait être exécuté. Un homme exécuté. La queue d’un homme exécuté sans tête.
« Depuis deux jours la vie n’est pas rev’nue. »
« Un mois d’repos en Finlande et tu reviendras parmi nous. »
« On risque sa vie, bien sûr, mais à tâtons. »
« Par chance, je n’ai pas d’imagination. »
« Il me fait dire qu’il t’aime. »
Ces non-tapettes, quel amour ! Quel coquin, ce Camus ! Passion des hommes entre eux. Les femmes font éclater la bourse.
« …s’il n’y a pas une réponse quelquefois… »
« Une seule petite heure d’égoïsme. »
Peut-être quand même faut qu’elle fasse de la danse classique, Stéphanie Béghain (sa scoliose).
Ils ont des têtes de fatigue sous les néons magnifiques, des têtes « christiques ».
Je vais demander à Gwénaël Morin s’il veut pas faire une pièce avec moi à Chaillot. Son système de décor est très bien (Thomas Hirschhorn).
Tout est merveilleux, tout est proche, tout est présent. Sous les néons. Le fond de scène a été rapproché. Le noir du théâtre, le noir velours qu’aimait Soulage, qu’aimait Malraux…
« Se détournant. »
« L’amour est impossible, mais je tuerai l’grand duc. »
Quelqu’un qui est mort nous montre le chemin, quelqu’un qui est bien mort, qui a souffert, mais qui est bien mort nous montre le chemin.
Des oranges (je n’ai rien dit sur les oranges). Des caisses d’oranges pas chères.
« À la fenêtre imaginaire. »
La distanciation brechtienne.
La flûte, la flûte de Vitez ! Il disait que si on amenait une flûte sur le plateau, il fallait en jouer parce que sinon les gens croyaient qu’elle était fausse.
J’écris dans mon carnet aussi « salement » que le décor de Thomas Hirschhorn / Gwénaël Morin.
Distribution des oranges.
« Sentir la main d’un homme avant d’mourir. »
« Mais quel affreux goût a parfois la fraternité ! »
« On chantait sur le fleuve en contrebas avec un accordéon. »
Y avait un personnage de Valérie Lemercier, la moralisatrice, assis devant moi. Elle se retournait furieuse chaque fois que quelqu’un toussait au loin comme si elle y pouvait quelque chose. C’était à deux minutes de la fin. Elle ne s’était pas détendue. (Ouvriers, riez.)
9 novembre, dans l'après-midi.
Dimanche suivant : Audrey (Gaisan) me dit comment elle trouve juste le « Il n’y a rien à écouter, on entend tout. » et ajoute : « On peut dire de même qu'il n'y a rien à regarder et qu'on voit tout. » Je dis : « Oui, c'est très direct. »
« Le bagne ? On s’en évade. »
J’ai vu Gwénaël Morin ; j’ai dit : « C’qui m’plaît, c’est qu’y a pas une tapette. »
Cet Albert Camus, quel baiseur !
« Ne pense pas au suicide. »
« Pour se suicider, il faut s’aimer. »
« La révolution, bien sûr, mais la révolution pour la vie. »
C’est bizarre, ces Russes qui parlent français (ces Russes révolutionnaires), c’est parce que c’est traduit. La pièce est traduite du russe par Albert Camus.
Quel baiseur, cet Albert ! (Cet Albert K.)
« La haine me viendra au bon moment (et m’aveuglera). »
C’est beau les néons qui scintillent dans la nuit (quand ils sont éteints).
« Alexi, vite. »
Je pensais à cette expression (stupide), « l’épaisseur du silence » (Daniel Larrieu) : y a pas d’silence, y a pas d’épaisseur et, pour moi, c’est d’la danse. Total – désolé : total. La danse des comédiens est incroyablement plus dense que la danse des danseurs. Pour une fois je suis d’accord avec Christine Angot : « les danseurs avec leur corps idiot ».
« Je n’ai pas vu la grande duchesse, je n’ai vu qu’eux. »
J’aime Gwénaël Morin parce qu’il me laisse faire autre chose. Il me laisse écrire dans mon carnet. Il n’y a pas de silence ou très peu et pourtant l’épaisseur est dense.
« Autrefois j’allais comme le vent. »
J’aime les responsables.
« Pourquoi fermes-tu les yeux ? »
« Eh bien, c’était pour mieux imaginer la scène. »
« T’es une femme et t’as une idée malheureuse de l’amour. »
La bonne humeur, la bonne disposition qu’il faut pour aller au théâtre… Surtout en France ! La tête des endormis au Théâtre de la Bastille ! Ils « écoutent religieusement ». Qu’est-ce qu’il y a à écouter ? On entend tout. (C’est ça qui est tranquille : il n’y a rien à écouter, on entend tout.) – Et c’est d’la danse ! –
Quel baiseur, ce Camus.
« Ah, Les Justes, Les Justes, eh bien vous êtes guère justes, vous êtes vraiment limite ! »
« Quand je dis « Silence. », tout le monde fait silence. « Noir. », c’est silence ! »
« Et c’est valable pour tout le monde ! »
Ils jouent la pièce dans le noir.
Ils sont bien, ces crétins sur scène – il est intelligent, le Gwénaël ! Tous ces hommes qui gueulent, quelle merveille ! Ils ont des voix sublimes et ils ne les ont pas cassées. Y a-t-il un training ? Sans doute pas. Du sperme partout. Quelle partouze de oufs !
« Stéphane, personne ici n’est de ton avis. La décision est prise. »
C’est drôle, il y a l’histoire des clous que j’ai vue passer par mail (Gaétan Palourde). Not every object used to nail is a hammer.
Je prétends qu’une pièce est bien dès le premier jour du travail. Je prétends qu’un spectacle est bien dès le premier jour du travail. Je prétends qu’il n’y a pas de répétitions.
Ce qui est bien aussi chez Gwénaël Morin, c’est qu’ils ne cachent pas la pauvreté de leurs moyens. Ils ne cachent pas la vérité : que quatre-vingt-dix pourcent de l’argent de la culture, des subventions de la culture payent le secteur tertiaire et que les artistes sont pauvres comme Job. Les vrais artistes. (Et je rigole car vous savez les noms, des faux artistes, les noms que la censure m’empêche ici de nommer. La censure, ici, sur le blog. )
Un homme en noir avec un sac noir (sur la tête) comme s’il allait être exécuté. Un homme exécuté. La queue d’un homme exécuté sans tête.
« Depuis deux jours la vie n’est pas rev’nue. »
« Un mois d’repos en Finlande et tu reviendras parmi nous. »
« On risque sa vie, bien sûr, mais à tâtons. »
« Par chance, je n’ai pas d’imagination. »
« Il me fait dire qu’il t’aime. »
Ces non-tapettes, quel amour ! Quel coquin, ce Camus ! Passion des hommes entre eux. Les femmes font éclater la bourse.
« …s’il n’y a pas une réponse quelquefois… »
« Une seule petite heure d’égoïsme. »
Peut-être quand même faut qu’elle fasse de la danse classique, Stéphanie Béghain (sa scoliose).
Ils ont des têtes de fatigue sous les néons magnifiques, des têtes « christiques ».
Je vais demander à Gwénaël Morin s’il veut pas faire une pièce avec moi à Chaillot. Son système de décor est très bien (Thomas Hirschhorn).
Tout est merveilleux, tout est proche, tout est présent. Sous les néons. Le fond de scène a été rapproché. Le noir du théâtre, le noir velours qu’aimait Soulage, qu’aimait Malraux…
« Se détournant. »
« L’amour est impossible, mais je tuerai l’grand duc. »
Quelqu’un qui est mort nous montre le chemin, quelqu’un qui est bien mort, qui a souffert, mais qui est bien mort nous montre le chemin.
Des oranges (je n’ai rien dit sur les oranges). Des caisses d’oranges pas chères.
« À la fenêtre imaginaire. »
La distanciation brechtienne.
La flûte, la flûte de Vitez ! Il disait que si on amenait une flûte sur le plateau, il fallait en jouer parce que sinon les gens croyaient qu’elle était fausse.
J’écris dans mon carnet aussi « salement » que le décor de Thomas Hirschhorn / Gwénaël Morin.
Distribution des oranges.
« Sentir la main d’un homme avant d’mourir. »
« Mais quel affreux goût a parfois la fraternité ! »
« On chantait sur le fleuve en contrebas avec un accordéon. »
Y avait un personnage de Valérie Lemercier, la moralisatrice, assis devant moi. Elle se retournait furieuse chaque fois que quelqu’un toussait au loin comme si elle y pouvait quelque chose. C’était à deux minutes de la fin. Elle ne s’était pas détendue. (Ouvriers, riez.)
9 novembre, dans l'après-midi.
Dimanche suivant : Audrey (Gaisan) me dit comment elle trouve juste le « Il n’y a rien à écouter, on entend tout. » et ajoute : « On peut dire de même qu'il n'y a rien à regarder et qu'on voit tout. » Je dis : « Oui, c'est très direct. »