Thursday, December 18, 2008

M’échappe en corps

Pierre est de 1975 (je viens de comprendre). Je pense à toutes ces années qu’il va encore vivre, que j’ai vécues. Je me retourne avec nostalgie sur ces années (qui nous séparent) et je pense : c’est chouette, il va les vivre, cette insouciance, il va la vivre encore.

Bénédicte, fanatique et surtout une actrice (de textes – qui en cherche à jouer comme un animal sa nourriture) me demande : alors, tu vas monter les textes de Pierre ?
Monter les textes de Pierre ? non, je vois pas comment : les poèmes au théâtre, ça n'intéresse personne – et puis pour une fois qu'il y a une forme qui ne passe par rien ni personne ni éditeur ni rien, un blog, faut laisser, rien ne se perd de ce qui est donné, rien ne vaut la peine d'être gardé ni dans un livre, je crois, ni la (fausse) publicité du théâtre – la seule chose qui m'importerait serait de te donner à toi du travail, ça oui ! – mais peut-être plus Les Frères Karamazov, j'adorais ce moment dans le spectacle (on sortait enfin de la Liliane-story) et tu le faisais très, très bien...

Ici un message pour Hélèna : envoie ton texte sur moi à Marlène, je l’ai eue au téléphone, j’ai pensé que ce serait possible qu’elle, elle joue ça. Au moins, déjà, elle le lira et elle te dira si ça la fait rire ou pas. (Mais y a peut-être une idée.)

Et puis donc on ira à Versailles samedi, pendant que Pierre sera à Valencienne…






http://guarantyofsanity.hautetfort.com/

Labels:

La citation du jour

« Une maladie qui disparaît, c’est une association qui ferme ses portes. »

Labels:

Une lettre à Boris Charmatz

Boris, je viens de visionner le DVD d'un spectacle dont j’ai vu cet été une version dans une petite et blanche église de village perché en Bourgogne et qui représente pour moi, sans aucun doute, CE QUE J’AI VU DE PLUS BEAU DE MA VIE. J’ai eu, pour le dire simplement, l’impression absolue d'avoir devant moi la réincarnation même de Nijinski – puisqu'il s'agit d'un poème de Nijinski au bord de la raison, de la terreur et de la beauté. Ce spectacle est porté par Bénédicte Le Lamer avec qui je viens de travailler à Vitry et à la Ménagerie et qui est, pour moi, la plus douée des actrices de théâtre de France que je connaisse. Pascal Kirsch et Bénédicte ont réalisé, avec les musiciens, plusieurs versions (absolument minutées) de ce travail de deux ans, celle que j'ai vue dans la petite église était la plus dépouillée (mais il en existe, je crois, une plus courte encore) puisqu'elle ne concernait que Bénédicte et un saxophoniste (excellent), Florent Manneveau. C'est celle que j’ai tendance à préférer puisque c'est celle que j’ai vue (et pour toujours : jusqu'à ma mort), mais toutes les versions doivent être merveilleuses.

Je pense que ce travail ne peut que te passionner.

Évidemment le DVD (de qualité) n’est qu'une pâle lumière de ce que j’ai vécu - mais n'est-ce pas pour cette lumière spéciale de la vie que nous faisons des spectacles plutôt que des images ? Je vais demander à Pascal de te faire parvenir ce DVD.

Les gens pensent que la vie dépend du soleil, je sais que la vie dépend des gens.

Pascal et Bénédicte reçoivent un accueil presque glacé comparativement à ce que – nous, quelques-uns – pensons d'eux. Je crois savoir pourquoi, j’en ai une théorie en tout cas. Bénédicte a le génie instinctif – et ne peut-on dire : la santé ? – dans sa vie suprême – de ne parler – quant au sens – que de la mort et de la folie et c’est de ce diapason qu’elle fait sonner – de ce don – qu'elle crée, par déflagration stupéfiante, un espace de liberté et de vérité qui semble insupportable pour certaines personnes – parmi lesquelles (pour ne pas toujours accabler ces pauvres programmateurs) se comptent même des artistes, comme François Tanguy, par exemple, qui, nous le savons, ne peut supporter rien de vrai, de puissant qui soit autre que ce qu’il fait lui-même et qui était littéralement hors de lui, comme une bête enragée, prêt à tuer, prêt à brûler dans la nuit qui a suivi le spectacle présenté à la Fonderie du Mans. Je n’avais pas encore vu le spectacle quand on m’a raconté ça, mais j’ai pensé : ça veut dire que c’est quelque chose d’immense. Je n'ai pas été déçu, ce que j’ai vu, comme je te l’ai dit au début de cette lettre, a dépassé tout ce que j’aurais pu imaginer.

Je pense qu’il s’agit d’une forme qui pourrait se présenter dans le cadre d’accueil-studio ou des ouvertures des centres chorégraphiques plutôt que du côté des théâtres traditionnels – à cause de son sujet, Nijinski, et de son aspect performatif. J’imagine aussi que ce sujet résonne peut-être avec tes dernières recherches.
Tu es en tout cas le premier à qui j’en parle.

Réserve à mes amis ton meilleur accueil, ces gens le mériteront.
Voici leurs coordonnées : cie.pequod@free.fr

Bien à toi

Yves-Noël

Labels:

Donnant un stage à Vitry









Photos de Malo de La Tullaye (lien en cliquant sur le titre).

Labels: