C hapeau bas

Arletty

S uite n°3 ‘Europe’

Etre spectateur d’un spectacle de Joris Lacoste (la série de l’ « Encyclopédie de la parole »), c’est être dans une position de prince, de roi, de mélomane et d’ami. Rien de difficile. Tout est donné, tout est partagé. Joris Lacoste est un travailleur immense, il emploie des interprètes virtuoses et travailleurs, il travaille ici avec le compositeur Pierre-Yves Macé. Tout est absolument technique et tout est absolument (en tout cas le soir de  cette dernière parisienne), lâché, délivré. Heureux comme consolant. J’admire infiniment Joris Lacoste. A chaque moment de cette pièce somptueuse, j’admire infiniment Joris Lacoste. Il fait de moi un spectateur vivant et caressé. Ce qu’ils produisent, Pierre-Yves Macé et lui, est beau comme le plus beau spectacle du siècle, indépendant des modes-seconde, des polémiques-instant, en survol et en plein dans la chair. Ce qui est sublime, c’est qu’ils prennent des matériaux très ordinaires, les moins repérables (et pourtant reconnaissables, récents), et qu'ils les portent à l’état d’incandescence. Pierre-Yves Macé et Joris Lacoste sont « d’infatigables producteurs de mélodies », comme tout un chacun. Jorge Luis Borges cite quelque part Bernard Shaw à qui l’on demandait s’il croyait que la Bible avait été écrite par l’Esprit saint et qui avait répondu : « Non seulement la Bible, mais tous les livres. » C’est exactement le sentiment produit par cette Suite n°3 'Europe' : c'est l'idée de faire partie d'un ensemble.